Quand Steph Copeland a eu 16 ans, son père lui a réservé un studio d’enregistrement local pour qu’elle puisse enregistrer quatre de ses propres chansons. Steph Copeland, qui crée sa propre musique depuis sa plus tendre enfance, avait une idée précise de la manière dont elle voulait que ses chansons sonnent. « Je savais ce que je recherchais », dit-elle en riant. « Je voulais que ce soit massif. » Déçue par le résultat final, Copeland a décidé qu’elle allait devoir trouver comment faire les choses elle-même. Mettant la main sur un enregistreur numérique 8 pistes, elle a lu le manuel et a progressivement acquis les compétences nécessaires pour générer les sons qu’elle voulait. « La courbe d’apprentissage a été longue », se souvient-elle.

Mais pour Copeland, c’est un choix qui a porté ses fruits. Au cours des deux dernières décennies, elle a laissé ses intérêts musicaux la guider – de la composition de musique pour le cinéma, la télévision et les publicités, aux tournées en tant que chanteuse et musicienne de tournée – notamment pour Ria Mae de 2016 à 2018 –, en passant par l’écriture de chansons et la production de ses propres albums solo. Et en apprenant elle-même ce qu’elle doit savoir en cours de route. Heureusement, elle aime être occupée. « Je pense que je suis peut-être un peu un bourreau de travail », confie-t-elle, admettant que les gens ont effectivement du mal à suivre ses différents projets.

« Si je peux imaginer un son, je vais faire tout ce qu’il faut pour le réaliser »

Dans la vingtaine, Copeland, qui a grandi à une heure de Windsor, s’est intéressée à la scène électronique de Detroit et a commencé à se produire, à la fois en tant qu’artiste solo sous le nom de Perilelle, et en collaboration avec d’autres artistes hip-hop et techno. Elle s’est toutefois vite rendu compte qu’elle était plus intéressée par le perfectionnement de ses sons que par la construction d’une personnalité sur scène, et a orienté sa carrière vers le studio. Puis, une opportunité d’écrire la musique d’un film d’horreur indépendant s’est présentée à elle. « Je n’avais jamais fait de musique pour un film », dit-elle, « et j’ai dû apprendre très vite, en mettant à jour tout mon studio ».

C’était un pari à prendre. Le film a bien marché et a donné lieu à un contrat pour huit films, dont sept ont été signés par Copeland. « C’était un coup de chance vraiment merveilleux », dit-elle. « J’ai toujours su que ma musique avait un côté cinématographique. » Depuis, Copeland a composé la musique d’un grand nombre de drames, de thrillers et de films de genre plus sombres (Vicious Fun, The Oak Room et I’ll Take Your Dead, entre autres), ainsi que de séries télévisées (The Wedding Planners, Turning the Tables) et de publicités (NBA Canada, The Pan Am Games et The North Face).

Mais Copeland, qui chante depuis son enfance, se réserve toujours du temps pour écrire ses propres chansons. « Je n’arrive jamais à décider ce que je veux faire », explique-t-elle. « Je suis toujours attirée par le côté spectacle et l’écriture de chansons, alors entre deux trames sonores, je lance des simples et je travaille sur des albums. » La sortie de son premier LP solo Public Panic, en 2015, l’a vue signer avec un éditeur de musique basé à New York, et l’a conduite à écrire et produire pour des artistes internationaux, et à placer des chansons dans des films et des séries, notamment Tiny Pretty Things sur Netflix. Elle parvient encore à sortir deux ou trois de ses propres titres chaque année. Son dernier simple (avec Brigit O’Regan), « Gas Light », est accompagné d’une vidéo.

Et elle continue de chercher à relever de nouveaux défis. En tant que productrice, Copeland a supervisé la performance de l’orchestre entièrement féminin qui a fait l’ouverture des Prix SOCAN 2018, et a été deux fois juge du Prix du jeune compositeur à l’image de la Fondation SOCAN. Cette année, elle participera au programme Women in the Studio offert par Music Publishers Canada, un accélérateur national pour les producteurs-compositeurs s’identifiant en tant que femme, et a récemment produit une chanson pour Oleyada et KINLEY dans le cadre du 2021 Canadian Songwriter Challenge de Music PEI. « Chaque fois que je travaille sur la chanson d’une autre personne, j’apprends quelque chose et je veux ensuite l’explorer dans mon propre monde et voir ce qui se passe », dit-elle.

Lorsqu’elle pense à son avenir, Copeland laisse sa curiosité la guider, toujours à la poursuite du son qu’elle recherche, tout comme elle le faisait lorsqu’elle était jeune fille. Qu’il s’agisse de continuer à produire pour d’autres ou de composer des musiques de film, Copeland se permet de rêver en grand et de repousser ses propres limites. « Maintenant que je suis consciente qu’il existe des sons plus grands et plus complexes, comme ceux de l’orchestre, je veux aller les chercher », dit-elle. « Si je peux imaginer un son, je vais faire tout ce qu’il faut pour le réaliser »



Hildegarde, Ouri, Helena DelandC’est la collision de deux astres qui ont déjà leur place au firmament des playlists Spotify les plus suivies, la rencontre de deux musiciennes qui cultivent une aura de mystère presque malgré elles. Lorsque Helena Deland et Ouri créent ensemble, le tout est plus grand que la somme des parties. Le résultat tient presque de la magie.

La première, Helena Deland, vient du folk, d’une bourgade-dortoir de la Rive-Sud de Québec où on rêve à la métropole dès que l’âge nous donnera le droit de partir. Ourielle Auvé, dite Ouri, aspirait aux pavés de Montréal elle aussi, mais depuis les rues de Paris qui l’ont vue grandir et pratiquer son violoncelle, du temps où elle enchaînait les airs classiques. En équipe, les deux femmes confectionnent quelque chose d’inclassable, mais de profondément envoûtant, à la jonction de leurs univers respectifs si distinctifs. « Je pense que notre style de musique est un peu un point d’interrogation », résume habilement Helena.

Et selon elle, c’est précisément cette forme hybride qui attire l’attention au-delà des frontières des genres, des limites des villes. Pitchfork a recensé leurs parutions en duo, idem pour Stereogum, Nylon, Les Inrocks et The Fader… Rares sont les projets qui font pianoter les claviers d’autant de blogueurs, et dès l’écoute des premières notes. « On est chanceuses, admet Helena. Je me rappelle du moment où on a sorti Jour 2… C’était vraiment émouvant de voir toute la presse relayer l’information. »

Scellées sous vide depuis 2018, les morceaux de l’album ont été composés puis enregistrés en format démo d’un seul jet, entre les quatre murs d’un studio de l’Est de l’île de Montréal, au-dessus du Village des Valeurs, coin Pie IX et Ontario, un étonnant refuge que les gérants des filles avaient loué à leur attention pendant huit jours. Huit jours top chrono pour accoucher d’autant de titres, des pièces qui semblent avoir gardé leurs codes d’identification minimalistes d’origine. Jour 1, Jour 2, Jour 3 et ainsi de suite.

Mais pourquoi avoir patienté si longtemps avant de les partager ? Ouri a la réponse : « On a toutes les deux nos carrières solos et c’est un projet qui est né de manière tellement inattendue que c’était important, je crois, de le laisser fleurir dans nos esprits doucement pour trouver les manières de le mettre au monde. Il y a aussi une structure de label qui s’est créée et dont on a pu bénéficier. »

Cette étiquette de disques, c’est Chivi Chivi. Une maison fraîchement inaugurée, celle de Robert Robert (formidable parolier aux ambiances house), de Valence (la prochaine «grosse affaire» en provenance de Québec), de Lydia Képinski (électron libre déjà bien établi) et maintenant Hildegard. « Je pense qu’on avait envie d’avoir une relation spéciale avec le label et de ne pas sentir qu’on était un projet parmi tant d’autres, confie Ouri. On sent une réelle connexion avec notre équipe. C’est une première fois pour tout le monde, il y a vraiment une énergie spéciale qui circule. »

Hypnotisantes, résolument sensuelles et quasi méditatives, les chansons du duo Deland-Auvé ont tout de la précurseure qui les inspire. Leur muse ? Hildegard Von Bingen. Une compositrice allemande du XIIe siècle, l’architecte des Cantiques de l’extase, une artiste aux propensions féministes qui s’adonnait aussi à être une dame de foi, une nonne de l’ordre des Bénédictins. Un fascinant personnage que Helena et sa collègue mettent en lumière par la bande, par l’entremise de leur propre production.

« Ce qu’on partage avec Hildegard, c’est notre autosuffisance féminine, c’est notre prise de position par rapport à la féminité. Je suis consciente qu’on lit son travail comme ça à travers une lunette moderne, mais en même temps… Son travail s’intéressait à ça ! Elle avait quand même fondé une abbaye de femmes. C’est fou comme elle était en avance sur son temps. »

Au-delà du nom qu’elles se donnent, de réelles références médiévales s’allient fluidement à leur écrin musical d’avant-garde. « C’est une influence qu’on entend un petit peu dans l’album, même si ce n’est pas extrême, admet Ouri. C’est sûr qu’il y a une partie de moi qui réfléchit à la possibilité de faire un genre d’album médiéval moderne. Ce serait quand même une aventure musicale extraordinaire ! »

D’ici là, promettent-elles, Helena et Ouri poursuivent leurs explorations sans intentions esthétiques spécifiques, portées par leur intuition qui les sert et leur sied si bien.



Les chiffres

  • 150 millions de vues YouTube
  • 950 000 abonnés YouTube
  • 65 millions de diffusions en continu sur Spotify, Apple, Amazon
  • 1,2 million d’auditeurs mensuels sur Spotify

Pendant toute sa jeunesse à Vancouver, Alex Porat a fait tout ce qu’elle pouvait pour devenir une vedette pop. Elle a passé son enfance à assister à des auditions pour des concours de talents pour enfants et ses samedis à chanter des tubes de Whitney Houston et de Christina Aguilera dans l’aire de restauration du centre commercial local, où il y avait une petite scène et un micro installés pour les karaokés improvisés. Au secondaire, elle a commencé à mettre en ligne des reprises sur YouTube pour se bâtir un public. « Quand on est jeune, on ne sait pas vraiment comment faire entendre sa voix », dit Porat. « YouTube était un moyen pour les gens d’entendre ma voix ».

Ce n’est pourtant qu’à l’université que Porat a connu sa grande chance. Dans une vidéo du magazine Glamour, Shawn Mendes regarde la reprise YouTube émouvante de Porat sur sa chanson « In My Blood ». « Alexandra », dit Mendes dans la vidéo, « tu es incroyable, ta voix est géniale, et tu l’as chantée parfaitement ».

« À ce moment-là, j’ai réalisé qu’il était possible d’être musicienne », dit Porat. « Soudain, j’ai eu l’impression que si je continuais à faire de la musique, peut-être que les choses pourraient continuer à se développer. » À l’époque, Porat venait de terminer sa deuxième année d’université et envisageait déjà de ne pas y retourner à l’automne. Cette vidéo lui a donné l’impulsion finale pour poursuivre la musique à plein temps.

Depuis, elle n’a cessé de travailler. En 2020, elle a sorti son premier EP, bad at breakups, qu’elle a enregistré pendant la pandémie. Ses chansons alt-pop accrocheuses sur le chagrin d’amour, la solitude ou le fait de voir ses ex passer à autre chose sur les médias sociaux est en quelque sorte comme un précurseur de Sour par Olivia Rodrigo. Son simple le plus récent, « Dimension », est parfait pour les pistes de danse. Porat est également prête à monter sur scène plus tard en 2021 : « La première chanson de mon EP est sortie le week-end avant le confinement au Canada », se souvient Porat. « Pouvoir enfin chanter mes chansons sur scène est comme un rêve. »