Il est bientôt 14h et c’est sous un soleil radieux et une chaleur fracassante que la foule commence à se rassembler autour de la scène de la vallée d’Osheaga. Au programme, un spectacle-surprise de celle qui fait beaucoup parler d’elle en ce moment, Kallitechnis. Malgré plusieurs inconvénients techniques, elle s’apprête à performer sur la plus grosse scène de sa carrière. « La moitié de mon band n’était pas là et nous avons dû répéter le jour même. Ce fut un peu stressant, mais avec du recul, je ne changerais rien; ces difficultés nous ont beaucoup appris… », raconte-t-elle quelques jours plus tard, en route vers sa performance au Manifesto à Toronto, festival culturel organisé en partenariat avec Moonshine.

Kallitechnis

De son vrai nom Cassandra Kouremenos, Kallitechnis est née à Montréal de parents grecs. Elle fait ses débuts dans le domaine artistique par le ballet classique, à l’âge de 4 ans. Passionnée d’art en tout genre, elle s’occupe elle-même de l’aspect visuel de ses productions. Comme beaucoup d’artistes actuels, l’essor des réseaux sociaux propulsera la carrière de Kallitechnis. Poussée par son « besoin indéniable de créer », elle commencera à mettre sur la toile plusieurs de ses créations, dans un but d’expression de ses expériences et de son « soi profond ». Son nom de scène lui viendra d’ailleurs de cette réflexion. Mot grec signifiant « maitre de son art », Kallitechnis est un rappel de ses origines, mais aussi de sa personnalité et de sa passion pour les arts en général.

C’est sur SoundCloud qu’en 2015, le réalisateur Rami Bizzle (Planet Giza), la découvre. « Ça a été ma première vraie expérience de composition et d’écriture », se rappelle Cassandra. Quelques mois plus tard, Lou Phelps lui propose de collaborer sur son premier single, Average, produit par notre international montréalais, Kaytranada. « Je n’y croyais pas, Kaytranada a toujours été quelqu’un avec qui je voulais travailler et d’avoir ma voix sur une de ses productions était un accomplissement en soi », confie-t-elle.

Par la suite, comme beaucoup d’artistes en devenir, Kallitechnis se retrouve dans un entre-deux, quelque peu désemparant. Se concentrer sur sa carrière en plein essor, ou poursuivre son parcours académique pour espérer trouver un travail stable et bien rémunéré? Soucieuse de son avenir, elle graduera en Psychologie à l’université McGill et décide de s’engager dans un master à Concordia en Thérapie artistique. Pour ce faire, elle devra faire une année complémentaire à l’UQAM en arts. Cette année sera marquante. Entourée de talents partageants les mêmes intérêts, elle y découvrira la sculpture et d’autres formes d’arts, ce qui renforcera sa passion. En mars 2017, son projet de Master à Concordia tombe à l’eau, sa candidature étant rejetée. Ce fut pour elle, un tournant important de sa jeune vie. Au lieu d’être déconcertée par cette nouvelle, elle se sentit soulagée. Prenant la chose comme un signe de l’univers, elle décide de se consacrer pleinement à sa carrière musicale.

Son premier EP : Wet Paint, verra le jour quelques mois plus tard, en octobre 2017.  Mélange de RnB et de soul, elle trouvera l’inspiration auprès du travail d’artistes tels que Sade, Anderson Pak, Kendrick Lamar… « Si je devais qualifier la musique que je fais, je dirais qu’elle serait une introspection de l’âme.  J’écris sur ce que je connais, sur ce que j’ai vécue et après avoir fait une introspection profonde de qui je suis et de ce que je ressens. J’aime les gens passionnés, en amour profond avec leur art… des gens à l’écoute de leur âme artistique. »

Devenus incontournables, les réseaux sociaux ont complètement changé l’espace musical qui est devenu un terrain de jeu, d’exploration, mais aussi de collaborations improbables. Enfant de la toile, Kallitechnis utilisera les ressources à sa disposition pour collaborer avec des producteurs étrangers comme Intellect (UK), Andrew Void (L.A.), Evil Needle (France)… C’est d’ailleurs le conseil qu’elle lance aux artistes émergents : « N’attendez pas que ça vous tombe dessus, soyez actifs, utilisez les ressources à votre disposition et le plus important soyez patient, une chose à la fois. »

Loin de vouloir donner des leçons à son public, Kallitechnis chante sa perception de la vie et son amour pour l’humain en général, elle chante la force de la vulnérabilité. Se définissant comme une féministe dans ses actions quotidiennes, elle n’hésite pas à parler de son expérience de vie en tant que femme, des difficultés qu’elle rencontre tous les jours, sans pour autant s’associer à la définition communément utilisée, qui, selon elle, a pris une connotation négative.

On attend avec impatience Chromatic, son prochain EP de sept titres qui sortira vers la fin septembre 2018. En attendant, on pourra bientôt se faire les dents sur Complementary, une courte compilation de deux titres réalisés par les réalisateurs montréalais, Chase Wave et Jay Century. Elle nous prépare aussi une belle surprise avec un single qu’elle sortira dans quelques semaines en collaboration avec l’un des plus gros rappeurs américains de la planète… Eh oui, Cassandra ne fait rien à moitié et nous en sommes ravis.

« Je suis ambitieuse, mais réaliste… J’adorerais travailler avec des réalisateurs comme Timbaland, Pharell ou encore BadBadNotGood, pour leur touche jazz. » L’invitation est lancée…