Article par Olivier Robillard Laveaux | mardi 20 dcembre 2016
Pierre Fortin, Charles Perron et les frères Sylvain et Sébastien Séguin s’étaient revus quelques fois depuis qu’ils avaient mis les activités de leur groupe, Les Dales Hawerchuk, sur la glace. Mais ce soir de décembre au Saint-Sacrement, c’était du sérieux.
En direction vers le bar de la rue Mont-Royal, Sébastien Séguin savait que l’ordre du jour comportait un seul et unique point : le retour des Dales. Dans sa poche se trouvait justement de quoi jeter de l’essence sur les braises encore chaudes de la formation, une maquette de ses deux nouvelles compositions, la fondation de ce qui allait devenir leur quatrième album.
« C’était il y a un an, presque jour pour jour. On venait de se donner beaucoup de temps pour vivre autre chose. Certains sont devenus papa, d’autres ont trouvé des jobs stables, mais tous avaient cette même envie de revenir au rock’n’roll. Nous avions soif, nous avions faim », explique Sébastien qui compose la majorité des nouvelles chansons du groupe sur Désavantage numérique paru le 25 novembre dernier.
« Je leur ai fait jouer mes deux compos. Tout le monde a tripé et on s’est mis à parler d’un retour. On a rapidement mis au clair certaines règles. Aller jouer un mardi soir à Shawinigan, c’est terminé. Je n’ai rien contre Shawi, au contraire, on va sûrement y retourner bientôt, mais ce sera un vendredi ou un samedi pour que tout le monde puisse s’éclater sans avoir peur du lendemain. Le reste du temps, on va le passer avec nos proches. On voulait aussi que ce retour passe par des compos explosives, la pédale au plancher. Les compromis pour jouer sur les radios commerciales étaient terminés. On s’en calice. »
Ce dernier point semble le plus important aux yeux du guitariste-chanteur. Né pratiquement avec le succès de sa pièce Dale Hawerchuk en 2005, le groupe rock originaire du Lac-Saint-Jean avait profité d’un appui massif des radios commerciales et de Musique Plus qui avaient alors soif de rock. Les Strokes, les White Stripes et les Hives cartonnaient aux quatre coins du globe. Les guitares électriques abrasives avaient la cote, et ainsi allaient les Dales.
« Lorsqu’on a enregistré notre deuxième disque, on a voulu refaire le coup avec l’extrait À soir, on sort, mais le résultat n’a pas été le même. Et la pression d’un succès radiophonique a commencé à peser sur le moral du groupe. Notre troisième disque est sorti en 2011, et notre compagnie de disque à l’époque, C4, a fermé ses portes. Ça n’a pas aidé non plus. La pause a fait du bien. On revient sans se mettre aucune pression. On veut juste faire le tour de notre réseau de bars et avoir du fun. »
« Il fallait s’éloigner un peu du hockey pour parler d’autres choses. Sauf que tu vois, ces jours-ci, j’ai envie d’écrire une toune sur Radulov », Sébastien Séguin, Les Dales Hawerchuk
Ce retour aux sources s’entend dès les premières déflagrations de Désavantage numérique, un titre influencé par le déclin des ventes de disques, mais aussi l’une des rares références au hockey que contient l’album. Des clins d’œil auxquels les Dales nous avaient habitués. « C’est voulu, confie Sébastien. Il fallait s’éloigner un peu du hockey pour parler d’autres choses. On a vieilli. On n’a plus les mêmes préoccupations qu’un flo de 25 ans. Sauf que tu vois, ces jours-ci, j’ai envie d’écrire une toune sur Radulov. »
En attendant, les Dales Hawerchuk multiplient surtout les hommages aux moteurs à gaz. Faudra d’ailleurs qu’on nous explique cette fascination qu’ont les musiciens du Saguenay-Lac-Saint-Jean pour l’essence. Après le Tigre et Diesel de Galaxie, l’Ultramarr de Fred Fortin et Gazoline le groupe, les frères Séguin chantent leur affection pour les machines et l’odeur du gaz brûlé sur plus d’un titre.
« C’est sûr qu’on est un peu nés là-dedans. On a eu des Ski-Doos et des 4 roues quand on était jeune. Au Lac, les gaz-bars sont souvent des entreprises familiales. C’est un peu moins le cas aujourd’hui, mais dans le temps, on ne disait pas qu’on allait tinquer chez Esso ou Shell, on disait qu’on allait chez Perron ou chez Martel, des familles qui possédaient des gaz-bars. Au fond, les machines à gaz sont dans notre ADN. On parle souvent de l’odeur des tartes aux fraises et aux bleuets de nos grand-mères, c’est vrai que ça sentait bon, mais je me souviens autant de l’odeur de mon père qui rentrait de sa run de Ski-Doo. »
Au final, les deux flagrances opposées auront donné naissance à une génération de rockeurs au cœur tendre. Une génération qui continue de marquer l’histoire du rock québécois.
Photo par Courtesy of Séan McCann
Des membres de la SOCAN veulent sensibiliser la population au sujet de la santé mentale
Article par Stuart Berman | jeudi 22 dcembre 2016
Une bouteille de scotch. Quatre bouteilles de vin. Quarante-huit bières. Pour la plupart d’entre nous, ce sont des provisions raisonnables pour un long week-end. Pour Séan McCann, c’était une journée comme les autres.
En tant que multi-instrumentiste pour le groupe Great Big Sea, McCann a joué un rôle intégral du succès de la musique endiablé de ce groupe pendant plus de 20 ans. Dans ce contexte, le précédent inventaire de boissons — sur son « rider » personnel, la liste des choses requises dans sa loge chaque jour — n’était rien d’autre que son outil de travail. Comme il le dit si bien, « ce groupe était le refuge parfait pour un alcoolique. »
Il y a cinq ans, à l’âge de 45 ans, McCann a canalisé toute sa volonté afin d’arrêter de boire et, peu de temps après, de quitter son groupe. « J’étais sobre pendant ma dernière tournée et ce fut brutal », se souvient-il. « Je crois que les autres membres du groupe s’attendaient à ce que j’échoue, car j’avais essayé d’arrêter avant, sans succès, et cet échec répété me déprimait de plus en plus à chaque fois. Ce n’était pas un endroit agréable. Mais voilà, je me suis dit “je veux survivre”. »
Après avoir quitté Great Big Sea, McCann a entrepris une autre tournée : hôpitaux psychiatriques, centre de désintox et conférences sur le bien-être où il transmettait un message à ses pairs dépendants : la musique peut guérir.
Toutefois, lors d’une conférence prononcée en 2014 à London, en Ontario, McCann a été forcé de prendre conscience que son alcoolisme n’était pas qu’un effet secondaire du fait d’être membre d’un groupe roots-rock endiablé. Lors de la période de questions d’une de ses conférences, une des personnes présentes s’est levée et a raconté que sa dépendance découlait d’une agression sexuelle par un coach de hockey mineur. Dans la foulée de cette confession, McCann a lui-même avoué publiquement — pour la première fois de sa vie — qu’il avait aussi été victime d’abus sexuels répétés par un prêtre avec qui il s’était lié d’amitié lorsqu’il était ado.
« Je vivais encore dans le déni par rapport à ça lorsque j’ai arrêté de boire, même si c’était la cause de mes problèmes », confie aujourd’hui McCann. « J’ai tout dévoilé sur mon passé et, ce jour-là, j’ai appris une leçon sans pareil, j’ai enlevé un poids considérable de sur mes épaules. »
Depuis cette prise de conscience, McCann a canalisé ses expériences pour en faire deux albums solo, le premier, Help Your Self, est paru en 2014, et le second The Sean McCann Song Book Vol. 1 : You Know I Love You, est paru en 2016, et tous deux mettent de l’avant une inspirante philosophie de développement personnel.
Ces deux modestes efforts autoproduits ont toutefois contribué à ouvrir le dialogue au sujet de la santé mentale au sein de l’industrie canadienne de la musique. Et ce dialogue réunit des voix très disparates, que ce soit Serena Ryder qui est porte-parole pour la campagne Cause pour la cause de Bell ou encore le travail de sensibilisation pour le compte de VICE effectué par Damian Abraham du groupe Fucked Up. De plus en plus d’artistes s’ouvrent et parlent de leurs combats avec la dépendance, l’anxiété ou la dépression dans l’espoir de faire changer les choses, que ce soit simplement que les autres personnes souffrant de ce genre de problème se sentent moins seules, ou encore en faisant pression auprès des gouvernements afin qu’ils revoient leurs approches respectives de la santé mentale.
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« Crazy. » « Crazy on You. » « Let’s Go Crazy. » « Crazy in Love. » L’histoire de la musique pop en est une où on célèbre la psychose en la décrivant en termes euphoriques et héroïques. Et cette licence artistique finit même par englober notre perception des artistes eux-mêmes : de Brian Wilson à Kanye West, nous glorifions l’excentricité en tant que corollaire inévitable du génie. Ainsi, lorsque de grandes vedettes s’effondrent en public, il est d’autant plus facile pour les psychiatres amateurs que nous devenons alors de simplement mettre ça sur le compte de la pression qui vient avec la gloire. Une fois notre « diagnostic » posé, nous nous contentons d’en observer les contrecoups, avec l’obligatoire bol de popcorn, lors des divers galas de remises de prix.
Mais pour le musicien moyen — qui n’a pas les moyens de se payer une cure de six mois dans un établissement privé haut de gamme —, les troubles de santé mentale ressemblent beaucoup plus à un enfer sur terre qu’à un épisode de télésérie dramatique : c’est un problème du quotidien qui menace leur subsistance même.
Tous les musiciens vous le diront : la tournée est une des façons de gagner sa vie les moins sécuritaires et les plus exténuantes. Elle recèle une pléthore de pièges et de facteurs extrêmement risqués — incertitude financière, heures de travail interminables, conditions de transport claustrophobes, routine d’une répétitivité ahurissante, mauvaise alimentation, solitude, mal du pays — qui peuvent être hautement dangereux pour les personnes prédisposées à l’anxiété ou à la dépendance. Les mesures de soutien qui existent en environnement de travail traditionnel — service des ressources humaines, counselling, arrêts de travail — n’existent tout simplement pas lorsque les 50 $ que vous avez gagnés au spectacle de ce soir ne suffiront peut-être pas à payer l’essence pour vous rendre au prochain spectacle.
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Vu de l’extérieur, tout semble indiquer que Carmen Elle a une vie de rêve. Son groupe électro pop DIANA a été propulsé à l’avant-scène en 2012 après que son premier simple — « Born Again » — a suscité beaucoup de « buzz » sur les blogues spécialisés et soit signé par des labels réputés (Paper Bag au Canada, Jagjaguwar aux États-Unis) pour lancer un premier album, Perpetual Surrender et partir en tournée sur le circuit des festivals.
Carmen Elle (of/de DIANA)
La plupart des artistes se seraient empressés de tirer un maximum de profit de cet erre d’aller en lançant un deuxième album. Mais Elle, elle, était terrorisée par cette perspective. Les tournées intensives de DIANA dans la foulée de l’album suivant, Perpetual Surrender, n’ont fait qu’exacerber son anxiété reliée aux déplacements, un problème avec lequel elle devait composer depuis sa plus tendre enfance. Chacun de leurs concerts devenait un test d’endurance : parviendrait-elle a finir le spectacle sans provoquer une crise de panique caractérisée.
« C’est beaucoup plus intense qu’avoir le trac ou avoir besoin d’un verre en se disant que tout ira mieux après », explique-telle au sujet de son anxiété reliée à la scène. « J’ai eu une crise de panique vraiment intense sur scène à Montréal, l’été dernier. J’ai complètement perdu la carte. Je fixais le panneau de sortie de secours sans arrêt, et j’étais à un cheveu de jeter ma guitare par terre et de m’enfuir en criant “Je vais vomir ! Je vais mourir !” »
DIANA vient tout juste de lancer un deuxième album, Familiar Touch, un disque qu’Elle « ne voulait vraiment pas sortir », par crainte des exigences promotionnelles qui allaient nécessairement suivre. « Je ne suis tout simplement pas faite pour la tournée comme d’autres le sont. Il a fallu que nous changions notre façon de communiquer, en tant que groupe. Auparavant, les autres membres du groupe me cachaient le plus de choses possible le plus longtemps possible dans l’espoir que je n’aurais simplement pas le choix de suivre. Cela les stressait au plus haut point de me parler de tournée, ce qui me stressait encore plus au sujet des tournées, et cela est devenu un cercle vicieux pour chacun de nous. Maintenant, je suis plus ouverte au sujet des choses que je crois ne pas être en mesure d’accomplir, et ils ont appris à l’accepter. »
Elle est également reconnaissante d’avoir des collègues qui savent désarmer ses crises d’anxiété à l’aide de judicieuses petites doses d’humour. Elle se remémore un voyage en Californie durant lequel elle était convaincue qu’elle souffrait du mal de l’altitude. Leur réaction ? Ils lui ont ri au nez. « Parfois, le fait qu’une personne attire votre attention sur l’absurdité de votre situation peut aider. »
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L’auteure-compositrice-interprète terre-neuvienne Amelia Curran est une autre artiste qui est la preuve que des petits pas peuvent parfois se transformer en immenses enjambées. Elle a été aux prises avec l’anxiété et la dépression pour la majeure partie de sa vie adulte et, dans son cas, « les solutions sont parfois si simples qu’elles en sont décevantes. Ça peut être un changement dans l’alimentation ou les habitudes de sommeil, voire surveiller son taux de glycémie, et ce sont des choses dont on perd totalement le contrôle lorsqu’un est en tournée si on n’use pas d’un minimum de discipline », confie-t-elle. « Le privé et le public s’empressent d’adopter des mesures de santé mentale en environnement de travail, et c’est merveilleux en entreprise. Mais il faut que les musiciens définissent leur environnement de travail, et ça devient très compliqué, même lorsqu’on n’a pas de problèmes de santé mentale. »
Amelia Curran
C’est pour cette raison qu’Amelia Curran est devenue partenaire du Fonds de bienfaisance Unison, un OSBL caritatif fondé en 2010 par deux vétérans de l’industrie, Jodie Ferneyhough et Catharine Saxberg, qui vient en aide aux membres de l’industrie, artistes et artisans, en leur offrant un service de counselling 24/7 par téléphone ou clavardage ainsi qu’une aide financière d’urgence financée par de nombreux partenaires importants, dont notamment la SOCAN. « La communauté musicale canadienne n’avait aucune ressource d’urgence vers qui se tourner », explique la directrice générale d’Unison au sujet de la genèse de son organisation. « Les musiciens sont des travailleurs : ils sont souvent sur la route et sont sensibles aux mêmes facteurs de stress que vous et moi. S’ils ont besoin d’un coup de pouce pour payer leur loyer ou leur épicerie, nous leur offrons une aide de courte durée pour qu’ils se remettent sur pied. »
De nombreux autres membres de la communauté artistique ont fait campagne au nom d’Unison, mais Amelia Curra s’implique bien au-delà de la sensibilisation de ses pairs. En 2014, elle et son ami et cinéaste Roger Maunder ont publié une vidéo mettant en vedette de nombreux Terre-Neuviens connus — dont McCann — ou pas afin de sensibiliser la population aux problèmes de santé mentale et aux stigmates qui les accompagnent trop souvent. Sa vidéo devenant virale, Curran a eu l’idée de lancer un site Web intitulé It’s Mental visant à faire pression sur le gouvernement de Terre-Neuve et Labrador afin qu’il réforme le système des soins de santé mentale de la province. « Ce sont des luttes qui existent depuis des décennies, nous voulons un minimum de service dans les régions rurales », dit-elle. « Nous ignorons ces communautés éloignées jusqu’au jour où quelque chose d’horrible se produit. »
C’est le genre d’effort qui lui aurait semblé impossible il y a à peine quelques années, alors que sa dépression était si sévère qu’elle était incapable d’accomplir quoi que ce soit pendant des mois et des mois. Accepter la maladie mentale est quelque chose de très intime et c’est pourquoi de nombreuses personnes préfèrent souffrir en silence plutôt que de faire face aux conséquences d’en parler, qui vont de l’isolement social à une aptitude au travail diminuée. Mais comme l’ont constaté Curran, McCann et Elle, le courage peut parfois devenir contagieux et transformer une affliction qui entraîne l’isolement en une cause commune. Et comme chacune de leurs histoires respectives le démontre, une conversation peut parfois être plus bénéfique que des médicaments.
« J’ai beaucoup parlé de dépression et d’anxiété », explique Amelia Curran, « et elles font partie de ma vie, et je compose avec elles du mieux que je peux. Même en ce moment, je sous-estime la valeur de ma propre expérience. Si ça peut toucher et aider d’autres gens, alors je n’ai aucune raison d’en avoir honte. »
Quant à son ami McCann, il propose une prescription encore plus succincte : « Un secret peut vous tuer. La seule façon de combattre un secret, c’est de le dévoiler. »
Photo par Christopher Taylor Jones: Neville Quinlan & Cheryl Link, of de/peermusic Canada Inc.
Placements, collaborations, réseautage
Article par Christopher Taylor Jones | mardi 20 dcembre 2016
Les éditeurs de musique soutiennent la carrière de leurs créateurs d’une myriade de façons, que ceux-ci aient déjà connu des succès commerciaux importants ou qu’ils en soient à leurs premiers pas dans l’industrie.
« Chaque situation est unique », affirme le directeur général de peermusic Canada Inc. (Peer), Neville Quinlan. « The Tragically Hip ou Sarah McLachlan n’ont pas les mêmes attentes à notre égard que peut en avoir un auteur. »
Les plus gros efforts sont déployés pour les créateurs qui tentent de s’établir ou qui cherchent à changer de genre ou de domaine, par exemple afin de composer pour la télé ou le cinéma.
« Personne ne va être “hot” durant toute sa carrière », affirme Quinlan. « Toute carrière a des hauts et des bas. Nous aidons nos auteurs à faire ce qu’ils doivent pour que leur carrière puisse se poursuivre même pendant ces inévitables bas. »
« Peer est arrivé dans ma vie à un moment plutôt sombre de celle-ci et ils m’ont toujours soutenu » – Hawksley Workman
Hawksley Workman (Photo: Dustin Rabin)
Un des créateurs de peer qui a persévéré malgré ces hauts et ces bas est Hawksley Workman, sous contrat avec l’éditeur depuis 2010.
« Peer est arrivé dans ma vie à un moment plutôt sombre de celle-ci et ils m’ont toujours soutenu », dit-il. « J’étais une étape de ma carrière où je me “divorçais” de ma grande maison de disques, et c’était très inconfortable en raison des sentiments d’échec et de ne pas être à la hauteur. »
« Mais Neville et Cheryl [Link, directrice film & télé et A&R] m’ont quand même vu comme quelqu’un qui pourrait valoir un million de dollars un jour, et c’est très réconfortant. »
Peer a accordé beaucoup de ressources à la carrière de Workman et lui a déniché d’importants placements télé, a organisé et financé des voyages de cocréation un peu partout dans le monde et a même créé un studio temporaire dans ses bureaux de Toronto pour l’enregistrement des albums Meat et Milk en 2010.
« Outre mon agent qui est avec moi depuis le premier jour, la plus longue relation professionnelle que j’ai eue est celle avec peer », constate l’artiste. « Ils croient en moi et je crois en eux. »
Lorsque peer a mis Workman sous contrat, il avait déjà lancé plusieurs albums et jouissait d’une réputation internationale. Toutefois, les éditeurs canadiens sautent généralement dans l’arène beaucoup plus tôt afin de donner le coup d’envoi à une jeune carrière.
Gary Furniss (Photo: Jamie Quaile)
Lorsque nous joignons le président de Sony/ATV Music Publishing Canada, Gary Furniss et le vice-président, créativité, David Quilico, ils sabraient le champagne en compagnie de Kiki Rowe pour célébrer leur entente fraîchement signée. Les éditeurs avaient un œil sur Rowe depuis des mois et ont finalement décidé de lui offrir un contrat. Ils l’avaient jumelée à des créateurs établis afin de voir comment elle tirerait son épingle du jeu et l’ont également invitée à rencontrer des superviseurs musicaux à New York et Los Angeles, ainsi qu’avec les filiales de Sony/ATV qui la représenteront aux États-Unis.
« Il est bien évident que lorsque vous songez à offrir un contrat à un artiste, ce dernier doit avoir du talent », explique Furniss. « Mais il faut également une attitude géniale et une éthique professionnelle hors du commun, et Kiki possède les deux. On ne sait jamais d’avance s’ils connaîtront un succès à tout casser, mais on sait qu’ils ont tout pour y arriver si tout est en place pour que ça arrive. Notre travail est de nous assurer que les choses se concrétisent grâce aux bons réalisateurs et aux bons cocréateurs. »
« Lorsque je leur ai fait entendre ma musique, je voyais qu’ils étaient sincèrement ravis. Ils aimaient mon son et croyaient en moi. Que puis-je demander de plus ? »
Furniss et Quilico croyaient tellement au potentiel du duo danceUSS qu’ils ont financé l’enregistrement de leur premier album en 2008 et les ont présentés à Coalition Music pour une entente de représentation. Les éditeurs ont adopté une approche similaire avec Elise LeGrow, en payant pour l’enregistrement de son premier EP en 2012, disque qui contenait son « hit » du Top 10, « No Good Woman ».
Même son de cloche du côté de Red Brick Songs, qui a récemment mis sous contrat le Vancouvérois Nygel Asselin. Captivés par son travail de réalisation sur Dark Eyes de Half Moon Run, l’équipe créative de Red Brick, Jana Cleland et Amy Eligh ont invité Asselin à un camp d’écriture qu’elles organisent tous les deux ou trois ans afin de le voir à l’œuvre. En fin de compte, il en est ressorti avec la cocréation de « Drifting », la chanson qui est devenue le premier simple du groupe américain On An On.
Jana Cleland & Amy Eligh (Photo: Chris Robinson)
« Drifting est sans doute notre plus gros “hit” à ce jour », confie Cleland, soulignant qu’Eligh et elle croyaient tellement au potentiel de cette chanson qu’elles ont publié le démo sur les sites de diffusion en continu afin de mousser l’intérêt des gens. « Nous offrons des contrats aux artistes que nous aimons déjà, puis nous les mettons en contact avec de nouveaux environnements et de nouveaux collaborateurs. Nous tentons de trouver la connexion magique qui provoquera des flammèches. Nous voulons trouver de bons créateurs qui se complèteront et créeront quelque chose de spectaculaire. »
« Je ne suis pas sûr comment elles font, mais elles comprennent vraiment mon style musical. Elles me poussent parfois hors de ma zone de confort afin que j’essaie de nouvelles choses. Elles m’ont inscrit au camp de création SOCAN [“on the Farm”] en Colombie-Britannique il y a environ un mois et j’ai rencontré des gens avec qui je n’avais jamais écrit auparavant. Le réseautage que cela nous permet de faire est renversant. »
À l’instar des plus grandes maisons d’édition qui possèdent des bureaux affiliés un peu partout dans le monde, Red Brick tire profit de son réseau de sous-éditeurs internationaux pour générer de l’intérêt et créer des opportunités de cocréation. « Les éditeurs sont une communauté », explique Cleland. « Nous sommes des concurrents, mais également des collaborateurs. »
Peer exploite à fond son réseau d’affiliés afin de créer des opportunités de cocréation. « Nous avons des bureaux un peu partout et nous sommes toujours à quelques degrés de séparation d’un créateur avec qui l’un de nos artistes aimerait travailler », poursuit Quinlan.
C’est ainsi que Royal Wood, sous contrat avec peer Canada, s’est retrouvé à collaborer avec le réalisateur et auteur-compositeur britannique Jamie Scott. Ils étaient justement dans un studio du nord de Londres lorsque nous avons parlé à Wood au téléphone à la fin novembre.
« Je n’ai jamais été aussi heureux ou reconnaissant de ma vie », dit-il alors qu’il vient tout juste de terminer un voyage de création à Los Angeles avant de reprendre la direction de Nashville. « Je suis dans un studio et on travaille sur une console que les Beatles ont utilisée pour l’enregistrement de Abbey Road ! Peer m’a permis de collaborer avec des auteurs et des producteurs que je n’aurais jamais pu rencontrer sans leur aide. Les gens de notre industrie pensent que votre réputation est faite simplement parce que vous êtes sous contrat avec une compagnie comme peer. Disons que ça ouvre des portes, c’est clair. »