Pour une troisième année consécutive, on vous présente quelques-uns des artistes rap québécois qui se révéleront assurément à un plus grand public cette année.

 Shreez

Originaire de Laval, Shreez a commencé à rapper à l’âge de 16 ans dans le studio de son ami Young Mic. À ce moment, l’adolescent n’avait aucune ambition claire : le rap n’était qu’un passe-temps comme un autre. « C’était vraiment pour le fun. On envoyait seulement nos chansons à nos amis, on ne les publiait pas sur Internet. Mais, plus j’en faisais, plus je voyais l’intérêt des gens. Un jour, il y a eu un leak. Certaines de mes chansons jouaient dans des fêtes, dans des clubs. Ça m’a vraiment surpris. »

Épaulé par son fidèle ami Tizzo, qu’il a rencontré en 2014, le rappeur lavallois a commencé à prendre son hobbie au sérieux en 2018, lorsqu’il a vu l’intérêt que générait sur la toile son collègue avec sa mixtape Tu sais vol. 1. Depuis, il a fait paraître quatre mixtapes à ses côtés, notamment le classique en devenir 51tr4p Fr4p50, qui contient la chanson On fouette (primée par la SOCAN). « Tizzo est un mentor pour moi. Si c’était pas de lui, je ne suis pas certain que je ferais encore du rap. Il est vraiment venu me chercher chez moi, alors que j’avais presque tout arrêté! »

Paru il y a un an, son premier projet solo La vie gratuite porte bien son nom : on y parle de commerce illégal et de transactions douteuses. Des sujets qu’assume toujours le rappeur de 25 ans, mais qui rejoignent de moins en moins son emploi du temps. Par le fait même, sa prochaine mixtape, qui devrait paraître en mars ou en avril, abordera d’autres sujets. « Mes chansons parlent de cette transition, du fait que ma vie change et que la musique fait maintenant partie de mes plans. J’essaie de filtrer davantage ce que je dis, tout en gardant mon style. »

 Franky Fade

Gaspésien d’origine, Franky Fade a déménagé à Saint-Bruno-de-Montarville à l’âge de deux ans, puis a tracé son chemin jusque dans la métropole à la toute fin de son adolescence, en 2014. À ce moment, le jeune pianiste étudiait dans le programme d’interprétation jazz du cégep de Saint-Laurent.

C’est là qu’il a rencontré six de ses très bons amis, avec qui il allait former le groupe jazzy rap O.G.B peu après. « C’était un projet instrumental au départ. On cherchait activement un rappeur, mais on n’en connaissait pas vraiment. Disons que ça courait pas les rues dans nos entourages de petits gars de banlieue ou de région. J’ai décidé d’essayer d’écrire un texte, juste comme ça, et la réaction des gars a été super bonne. Je me suis rendu compte que j’avais toujours eu ça en moi, l’ambition du frontman. »

Avec trois projets derrière la cravate (dont l’excellent Volume Un), le septuor a tiré son épingle du jeu aux Francouvertes, en remportant la finale de la plus récente édition. Depuis, il planche activement à la création d’un premier album officiel, qui paraîtra dans la première moitié de 2020. « On compose tous ensemble, à sept têtes. Ça donne un résultat assez spécial, quelque part entre l’acoustique et le synthétique. »

Mais pour ce qui est des textes, c’est à lui seul que revient l’écriture. Avec sa verve franglaise implacable, le rappeur aborde des sujets qui touchent l’ensemble de la formation, tels que son désir d’indépendance dans le milieu de la musique et ses fortes ambitions de réussite. « Ce sont des réflexions sur le succès. Est-ce que le but, c’est d’atteindre un certain statut ou si c’est plutôt d’emprunter le bon trajet pour t’y rendre? » explique le rappeur, qui fera aussi paraître un deuxième projet solo cette année.

Backxwash

C’est dans sa Zambie natale, là où elle a passé les 17 premières années de sa vie, que Backxwash a découvert le hip-hop. « Ma première interaction avec le genre a été le clip de Mo Money Mo Problems de Notorious B.I.G. avec Puff Daddy et Mase. Après ça, je suis tombée amoureuse de tout ce qui touche à cette culture. »

Pas assez fortunée pour s’acheter des beats, la jeune artiste a rapidement pris sa nouvelle passion en main, apprenant par elle-même les rudiments du logiciel FL Studio 3. Puis, à Montréal, la rappeuse et productrice trans a développé un univers artistique propre à elle, c’est-à-dire un hip-hop abrasif aux influences rock industriel et nu-metal marquées. Sur Deviancy, un deuxième projet paru l’été dernier, cet alliage plutôt virulent se conjugue habilement à un flow ravageur, très mordant, et à un propos social on ne peut plus original, évoquant à la fois la sorcellerie, l’identité de genre ainsi que les dérives du patriarcat et de la religion.

Très inspirée, Backxwash planche actuellement sur deux projets fort différents : un opus dungeon synth (style alliant l’univers du black métal et des bandes sonores de jeux vidéo RPG) et un autre dans lequel elle racontera en détail ses expériences avec l’institution religieuse. « Et il y aura probablement encore des chansons qui abordent l’identité de genre, car ça me semble essentiel pour être intersectionnel dans ma pratique artistique. »

Composé à partir de vieux enregistrements de chorales, cet album mêlant hip-hop et noise paraîtra cet été.

 DawaMafia

Formé de deux frères brossardois d’origine marocaine, DawaMafia a bâti sa réputation bien avant d’amorcer sa carrière rap. « Chez nous, ‘’dawa’’, c’est synonyme de bordel. On nous appelait les frères Dawani, car on était des frères turbulents et qu’on aimait bien foutre la merde », se rappelle Tali B, 24 ans, le plus jeune des deux.

Aux côtés de Zacka (six ans son aîné), le cadet a commencé à rapper, et DawaMafia a pris son envol en 2016. Signé sous Disques RER, l’étiquette du promoteur de Québec Rico Rich, le duo a fait paraître trois mixtapes depuis : D’où je viens, MDV et Mafia. Dans la tradition du gangsta rap, les deux frangins y décrivent sans détour certains épisodes violents de leur vie. « C’est la vérité qui nous anime. On rappe ce que les gens n’osent pas dire. Ce qu’on vit dans la rue, certains pensent que ça se passe juste dans les films. Moi, je pensais ça au début… Mais non, tout ça est très réel », explique le rappeur, mentionnant qu’il a écrit la chanson Fugueuse après avoir été atteint d’une balle perdue dans une fusillade près de chez sa mère.

Prévu pour cet hiver, le premier album officiel du duo (qui contiendra notamment des productions de E-Beats et de Farfadet) s’intéressera tout particulièrement au parcours sinueux de ses deux auteurs. « Ça met un accent sur tout ce qu’on a vécu. Ça va plus en profondeur. Au début, on a connu la misère, c’était franchement dur, mais maintenant, on se démerde quand même assez bien. Bien sûr, on n’est pas encore rendus où on le voudrait, mais un petit pas, c’est déjà un bon pas. »

David Campana

Révélé au sein du duo HDC X LTK en 2015, David Campana a grandement évolué depuis. Après avoir assumé sa véritable identité sur la mixtape double MYNB, le chanteur et rappeur montréalais s’est joint à son ami de longue date Shotto Guapo pour le projet CE7TE LIFE, EP conceptuel qu’ils ont habilement défendu sur scène lors des dernières Francouvertes aux côtés du producteur Major.

C’est lors du concours que l’artiste de 29 ans a été approché par Hydrophonik Records, nouvelle branche de musique urbaine de l’étiquette rock montréalaise Indica. « Ce n’était pas dans mes plans de signer avec un label, car j’ai toujours voulu rester autonome et indépendant, mais je trouvais que la mentalité hors-norme d’Indica concordait avec la mienne. »

Reprenant la recette trap soul qui a fait le succès de CE7TE LIFE, David Campana proposera sous peu un deuxième projet solo : Bonjour, Hi. Produite par Novengitum, talentueux trio de compositeurs qui a notamment fait sa marque auprès de dope.gng, cette deuxième mixtape solo témoignera de l’évolution musicale et humaine de l’artiste.

« Avant, je parlais beaucoup de la réalité du hood, mais maintenant, j’ouvre mes horizons à un plus large public. Je crois que ça a un lien direct avec les productions de Novengitum, qui sont parfois un peu plus pop. Je veux me présenter tel que je suis, de manière simple, avec mon style franglais… De là, le titre. »

Autres révélations rap québ à surveiller de près cette annéeLK Tha Goon, dope.gng, MikeZup, Malkay Lacrymogene, Kay Bandz, Raccoon, Tyleen, Miles Barnes, Shotto Guapo, Soubillz



Tate McRae

TATE McRAE
Vedette adolescente de la danse. Future idole de la pop. Sa première chanson, One Day, a immédiatement explosé sur YouTube. Son simple tear myself apart a été signé par RCA Records.

Voir la vidéo pour « tear myself apart ».

 

 

 

 

 

Stephanie KowalSTEPHANIE KOWAL
Compositrice en émergence originaire de L.A. Gagnante du prix du meilleur thème musical original de la Fondation SOCAN en 2018. L’une des huit compositrices et compositeurs gagnants de l’édition 2018 du Los Angeles Live Score Film Festival. Assistante du compositeur Tony Morales, finaliste aux Emmy Awards. Elle a travaillé sur les séries Scorpion (NBC) et Elena of Avalor (Disney).

Voir la bande-annonce de « Sir John A and the Anti Quenched ».

 

 

Nk.FNk.F
Alias Nikola Feve, né en France, mais installé au Québec depuis deux ans. Producteur de renom, il est également compositeur, arrangeur et ingénieur du son. Il fait partie du collectif TrackBastardz. Il a créé des « hits » en compagnie de PNL (certification Diamant), Booba, Damso, Orelsan, Angèle, Kobo, Niska. Bref, c’est un habitué des palmarès. En 2020, Sébastien Tellier, Yelle, PLK et Éli Rose profiteront de sa touche magique.

Voir la vidéo pour « Au DD ».

 

 

Manila GreyMANILA GREY
Duo rappeur-chanteur canado-philippin formé des amis d’enfance Soliven et Neeko. Actifs ensemble depuis 2016. Leur style « West Coast wave » est influencé par leur héritage de l’Asie du Sud-est. Leurs chansons sont produites par azel north. Ils cumulent plus de 26 millions de diffusions en continu.

Voir la vidéo pour « Silver Skies ».

 

 

 

 

Lou-Adriane CassidyLOU-ADRIANE CASSIDY
Sur son premier album paru en février 2019, C’est la fin du monde à tous les jours, elle écrit des chansons sur la nature quotidienne de la mort, des petites choses qui nous glissent entre les doigts, des souvenirs qui ne meurent jamais et de ce qui reste quand nos cœurs se vident. Depuis, la choriste de Hubert Lenoir fait tourner les têtes ici, mais également en Europe où les invitations se multiplient pour 2020.

Voir la vidéo pour « La pluie ne tombe jamais sur toi ».

 

 

 

 

Shay LiaSHAY LIA
Elle s’est fait connaître en chantant sur l’album 99,9 % de Kaytranada qui a remporté le prix Polaris en 2016. Lui-même nommé dans la longue liste du Polaris, le EP Dangerous de la vocaliste franco-djiboutienne montréalaise est un brillant exemple de R&B contemporain mettant en vedette Buddy, BadBadNotGood et, bien entendu, Kaytranada. Stratégiquement bien entourée, la suite est franchement prometteuse.

Voir la vidéo pour « Good Together ».



KTOE est un jeune vétéran de la scène hip-hop torontoise. Bien qu’âgé d’à peine 21 ans, KTOE (prononcé KAY-toe) crée des « beats » depuis l’âge de 12 ans et il a collaboré avec des artistes à la grandeur de la métropole en plus de proposer des simples qui ont fait tourner bien des têtes, don notamment « Holy Ghost ».

C’est toutefois sa collaboration Jazz Cartier, lauréat d’un prix JUNO, qui a été le moment charnière du jeune producteur audionumérique et MC. L’imposante « Right Now » est ses « drops » massifs était l’une des meilleures pièces de Fleurever, l’album de Cartier paru en 2018.

« Quand “Right Now” est sorti, je collaborais avec d’autres artistes torontois et les gens se sont dit “OK, c’est le temps de respecter son nom et de prendre ce qu’il fait un peu plus sérieusement” », raconte KTOE. « Ça a fait boule de neige et de plus en plus de gens me prenaient au sérieux. “Right Now” a définitivement été le coup d’envoi de plusieurs autres trucs. »

Parmi ces trucs, on retrouve le lancement de son premier EP, I’m Mad, où il rappe en plus de produire ses « beats ». Malgré le fait qu’ils ne totalisent que 12 minutes, les six morceaux de ce EP prouvent avec éloquence de l’étendue du talent du jeune producteur audionumérique.

« Le truc avec ce EP, c’est que c’est en quelque sorte un projet expérimental », dit-il. « Je voulais montrer aux gens, ceux qui me suivent depuis le premier jour comme ceux qui m’entendent pour la première fois, un aperçu de tout ce que je suis capable de faire. Comme ça, les gens ne peuvent pas me mettre dans une boîte et dire “KTOE ne fait que du trap” ou “KTOE ne fait des trucs que pour une seule catégorie de gens”. »

“Quand je trouve un “flow” que j’aime, je le garde.”

Ainsi, les très énergiques trois premières pièces voient KTOE créer un amalgame de sonorités inattendues et peu orthodoxes pour créer un résultat minimaliste et addictif sur lequel il y va de ses rimes dans le style qu’il qualifie lui-même de « rap ignorant ». Les cascades de claviers de « Goldie Rock » sont un excellent exemple de son approche. Ailleurs, sur une pièce comme « Tap Phones » et la pensive « Yellow Bandana », on découvre d’autres facettes des productions de KTOE et un style vocal plus posé.

« Il m’arrive de savoir exactement ce que je vais dire dès les premières minutes de la création de mon “beat” ou de la mélodie », confie KTOE. « J’ai créé toutes ces chansons à, genre, 3 h du mat’, dans ma chambre, dans le noir. Ce ne sont que des expérimentations, vraiment. Ce n’est pas comme si j’avais un style d’écriture qui m’est propre et que dès que j’ai un “beat”, je me dis “fais ci, fais ça et ensuite corrige les erreurs”. J’expérimente avec la musique et lorsque je trouve un “flow” que j’aime, je le garde. C’est une question d’être confortable avec le “beat”. »

En bonne compagnie
KTOE a collaboré avec plusieurs producteurs audionumériques et interprètes talentueux, dont notamment :
* CMDWN
* Rockie Fresh
* Smiley
* Tripsixx
* Ty Senoj
* Uno The Activist
* Valee
* WondaGurl
* Yung Tory

Le fil conducteur entre toutes les pièces du EP est le cri de ralliement « This is a KTOE beat! » que l’on entend au début de chaque pièce, à l’instar de Rick Ross et sa phrase « Maybach Music » ou de producteurs audionumériques comme Metro Boomin et Just Blaze qui ont aussi des « empreintes sonores ». « Les gens viennent me voir et me disent “This is a KTOE beat” », dit l’artiste qui utilise ce même slogan sur les réseaux sociaux afin de mousser encore plus son image de marque. « Les gens aiment cette accroche. J’aime l’utiliser dans mes “beats” et tout ça fonctionne bien ensemble. »

Sa stratégie fonctionne, de toute évidence, car en plus de sa propre musique, KTOE élargit son réseau auprès d’artistes hip-hop comme Big Sean et le Torontois Roy Woods, entre autres. Nous avons justement attrapé l’artiste au vol alors qu’il arrivait de Miami où il a soumis plusieurs de ses productions comme candidates pour le prochain album de Cardi B. Pas surprenant de l’entendre déclarer qu’il est actuellement en mode producteur audionumérique.

Il est de toute évidence sur le chemin de la gloire et de l’importance que d’autres producteurs hip-hop canadiens comme Murda Beatz, Frank Dukes, WondaGurl et d’autres ont cultivé et il est sincèrement reconnaissant des opportunités qui se sont présentées à lui jusqu’à maintenant.

« Quand je sors ou que je me rends aux États-Unis, je suis ce jeune de Toronto, je porte la ville sur mes épaules, et j’adore ça », lance KTOE. « Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de se retrouver dans les endroits où je vais, et le fait de venir de Toronto et de représenter ma ville m’ouvre bien des portes. »