L’exposition Rock « n’ Roll Icons – Photographs by Patrick Harbron est présentée à l’Albany Institute of History and Art jusqu’au 12 février 2017. Les images, tant sur scène que des portraits, sont des artistes établis de la scène rock n’ roll captés sur pellicule par ce vétéran-photographe de la scène musicale entre 1976 et 1992, puis encore en 2001. The Guardian, le quotidien britannique, a publié un portfolio d’images tirées de cette exposition le 16 novembre 2016. Nous vous présentons à notre tour une sélection de ces clichés d’icônes canadiennes du rock n’ roll accompagnées des commentaires de l’artiste pour chacune d’elles.

Leonard Cohen

Leonard Cohen
Cette photo a été prise au Massey Hall de Toronto le 9 novembre 1988 durant la tournée I’m Your Man
J’ai rencontré Leonard Cohen pour la première fois à l’été 1973. J’écrivais un article pour la Une du Beetle Magazine au sujet de Cohen et de sa nouvelle pièce de théâtre Sisters of Mercy. Elle était basée sur ses paroles et ses musiques et elle a été présentée en première au George Bernard Shaw Theatre de Niagara-on-The-Lake. Nous avons passé tout l’après-midi à discuter de la musique, de la gloire, de la scène et de ce que signifie avoir du succès. Je n’étais pas encore photographe. Il s’est écoulé 15 années avant que je le recroise alors que j’étais à son concert du Massey Hall comme photographe. Beaucoup d’eau avait coulé sous les ponts et je n’avais pas suivi sa carrière de près, mais de le revoir, et sur scène de surcroît, fut un réel plaisir. Lorsque je l’avais interviewé en 1973, il avait avoué ne pas vouloir monter sur scène trop souvent, mais au fil des ans, il a semblé apprécier la scène de plus en plus tout en élargissant son auditoire. Ses spectacles sont passés d’événement sporadique à événement précieux.

kd lang

kd lang
Photographiée au Harbron Studio de Toronto en février 1987
Une de mes séances préférées a été celle avec kd lang. La journée d’avant avait été complètement chaotique et faite de vols ratés et de mauvaise météo. J’étais pris dans un taxi en direction de l’aéroport de Newark au beau milieu d’une intense tempête hivernale. Je suis arrivé juste au moment ou on fermait les portes et que je ratais mon vol pour Buffalo. Je devais rencontrer kd et mon équipe à Toronto pour une séance d’après-midi, mais tout semblait indiquer que je n’y arriverais pas. Après m’être finalement rendu à Buffalo, j’ai loué la dernière voiture disponible et j’ai rapidement quitté l’aéroport pour me rendre chez moi. Je suis arrivé en début de soirée et la neige avait cessé de tomber. Je me suis rendu à mon studio pour y déposer mes trucs et je suis ensuite descendu au Montreal Bistro. kd et mon équipe étaient assis au bar. La séance que nous avons eue est une des meilleures de ma carrière. kd débordait d’énergie et nous avons eu un plaisir fou à trouver des idées et à leur donner vie les unes après les autres jusqu’à deux heures de matin. Tout le monde était concentré et plein d’entrain. Nous n’aurions pas pu planifier une séance aussi réussie même si nous l’avions voulu. Il en a résulté tant d’images qu’il a été très difficile de faire une sélection finale pour la Une et l’article de Canadian Musician. Cette image-ci illustre l’interprétation de kd lang lorsque je lui ai demandé d’incarner une note de musique.

Rush

Rush
Photographiés le 29 décembre 1977 au Maple Leaf Gardens de Toronto durant la tournée « Drive “Til You Die » dans la foulée de l’album Farewell to Kings
Rush est l’une des plus importantes exportations rock canadiennes et leur carrière n’aurait peut-être jamais pris son envol sans l’aide de Donna Halper de la station WMMS de Cleveland. Lorsqu’elle a décidé d’ajouter le simple « Working Man » à sa liste, la chanson a été reçue avec beaucoup d’enthousiasme et a ouvert au groupe des portes qui ne se sont jamais refermées.

À l’été 1977, j’ai écrit un article et produit des photos pour le Globe and Mail qui traitait de Farewell to Kings. C’est à cette époque où j’étais déchiré entre continuer d’être journaliste ou devenir photographe, et lorsque le Globe a publié mon article avec une immense photo, ma décision était prise. Nous sommes tous de Toronto et j’ai rencontré les gars de Rush après l’enregistrement de leur premier album. Lorsque j’ai commencé ma carrière de photographe, c’est un des premiers groupes avec qui j’ai travaillé. Lorsque j’ai pris cette photo, le groupe était au sommet de sa gloire en tant que tête d’affiche dans de très grandes salles, et ils y sont demeurés depuis. Depuis leur premier album en 1974, Rush a lancé plus de 30 albums, 10 compilations et d’innombrables DVD.

En février 1997, les trois membres du groupe ont été nommés officiers de l’Ordre du Canada et le groupe a également été intronisé au temple de la renommée du rock n’ roll en 2013.

Buce Cockburn

Bruce Cockburn
Photographié dans les bureaux du magazine Canadian Musician à Toronto en 1987
En tant que Torontois et fan de Bruce Cockburn depuis toujours, je ressens toujours un peu de nostalgie au sujet de l’hiver dans ma ville natale lorsque je vois la pochette de son deuxième album, High Winds White Sky et que j’entends « Happy Good Morning Blues ». Le disque est paru en 1971, l’année où j’ai commencé à œuvrer dans l’industrie de la musique. Ça ma rappelle à quel point il est important pour un artiste et ceux qui apprécient cet artiste d’avoir un sens de l’appartenance. Ça nous rappelle d’où nous venons et qui nous sommes. Ça n’est pas très difficile de comprendre pourquoi Bruce est une véritable légende vivante de la scène musicale canadienne depuis la fin des années 60. Cette image date d’une séance en 1987. Je voulais présenter Bruce dans toute sa simplicité. J’ai délibérément choisi de le photographier sans guitare, juste l’homme grâce à un portrait sérieux, mais ouvert. J’ai photographié Bruce à de nombreuses reprises au cours des années 80, incluant la séance pour la pochette de son deuxième album en concert, Bruce Cockburn Live, en 1990.

Joni Mitchell

Joni Mitchell
Photographiée durant la tournée « Conspiracy of Hope » d’Aministie internationale au Giants Stadium de Rutherford, au New Jersey, le 15 juin 1986
La relation de Joni Mitchell avec les grands concerts rock n’est pas au beau fixe. Elle a dû affronter une foule dissipée au festival de Isle of Wight, a carrément raté le festival de Woodstock afin de profiter d’un passage au Dick Cavett Show, et son passage sur la scène du « Conspiracy of Hope » était très tendu. C’est la dernière fois que je l’ai photographiée et cette image est ma préférée. Il n’existe aucune autre artiste ayant une voix aussi remarquable, des paroles aussi songées et sagaces ou qui utilise les accords polyphoniques d’une manière aussi unique. Elle est aussi à l’aise dans le folk que dans le jazz et elle a créé une œuvre des plus originales. Ma première opportunité de la photographier s’est présentée en 1983, durant sa tournée Wild Things Run Fast, puis lors des concerts d’Amnistie internationale où elle a donné une prestation impromptue juste avant U2 et The Police, qui étaient les clous du spectacle. Cette photo de Joni me rappelle ses débuts, elle semble transcendante.

Kim Mitchell, Pye Dubois

Kim Mitchell and Pye Dubois of Max Webster
Photographiés sur Grandview Avenue à Toronto en mars 1978
Ça, c’est une de me premières commandes venant de Roxy, une publication torontoise qui n’a pas eu la vie très longue et un des premiers magazines pour lesquels j’ai travaillé à la fin des années 70. Pour ce magazine, j’ai eu la chance de photographier The Tubes, Peter Frampton, Bob Marley, Garland Jefferies et, lors de cette séance, le gars de Max Webster et son parolier, Pye Dubois. Max était un groupe puissant rock avec un côté satirique, voire cynique. Leur album Mutiny Up My Sleeve est paru en avril 1978. Il y a habituellement une dynamique intéressante entre un coauteur qui ne monte pas sur les planches et son partenaire qui est à l’avant-scène. C’est dans cet été d’esprit que j’ai voulu illustrer leur relation et les liens très évidents qui les unissent. Nous avons donc eu l’idée de sortir le sofa dans la rue et d’en faire notre studio. La joie de vivre de cette image est devenue une marque de commerce de mon travail de portraitiste. J’ai photographié tous les membres du groupe sauf claviste Terry Watkinson, qui n’était pas là ce jour-là. Lorsque le temps est venu de partir, la fourgonnette s’est approchée, Kim s’est installé au volant, a posé pour une dernière photo derrière ses lunettes miroir et a conduit le groupe jusqu’à son concert de ce soir-là.

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