« I came up pop, but I’m not blowing bubbles » — Lights (tiré de la chanson « Jaws »)

On pourrait passer pas mal de temps à essayer de définir ce qu’est précisément la musique pop en 2022. Cependant, l’auteure-compositrice-interprète vancouvéroise Lights le sait probablement mieux que quiconque : ses deux derniers albums, Little Machines (2014) et Skin & Earth (2017), ont tous deux remporté le JUNO de l’album pop de l’année. Elle préfère néanmoins l’appellation « alt pop » qui cadre mieux avec son style musical un peu plus excentrique. Avec son nouveau projet intitulé PEP, Lights annonce clairement ses couleurs : pas question de rester constamment dans la même voie.

PEP a vu le jour avant la pandémie alors que Lights écrivait « par pur plaisir ». Quand elle a eu une bonne vingtaine de démos, elle a décidé d’envoyer ses nouvelles créations à son label, Fueled by Ramen, une maison de disque américaine connue pour ses artistes alternatifs Fall Out Boy et Twenty One Pilots avec qui elle a signé un contrat en 2019. La réaction de son équipe l’a encouragée à sortir des sentiers battus.

« Ils m’ont dit “t’es pas obligée de faire un album pop. Tu peux faire l’album que tu as envie de faire. Pourquoi tu ne ferais pas un album rock?” », se souvient l’artiste. « Tout ce que j’avais besoin, c’est que ma maison de disque me dise que je ne suis pas obligée d’écrire des “hits”. C’est quand tu arrêtes d’essayer d’écrire des trucs pour la radio pop que tu arrives à créer quelque chose d’authentique et cool, même si c’est pop. C’est pas mal ça l’idée de cet album. Y a des refrains typiques de Lights, mais l’énergie est différente. »

N’allez toutefois pas croire que Lights est devenu un projet rock. Les refrains accrocheurs, les synthés éclatants et – osons le dire – l’attitude pleine de pep qui définissent la musique de Lights sont toujours au rendez-vous. Les 13 chansons que nous propose PEP sont frénétiques et totalisent à peine 45 minutes au total. Or voilà, des pièces comme « Prodigal Daughter » et « Jaws » nous permettent de découvrir un rugissement où l’on devine ses influences heavy rock. Il ne faudrait pas oublier que son tout premier EP paru en 2008 avait été lancé par le label punk Underground Operations et qu’elle a aussi collaboré avec les champions du metalcore Bring Me the Horizon.

« J’écoutais du metalcore, du screamo, du emo et du post-hardcore quand j’étais plus jeune », explique-t-elle. « Ce que j’ai retenu de ces styles, c’est le côté émotif. Ce sont des textes très vulnérables, mais je veux dire à l’extrême. Genre, je vais parler très ouvertement de mes émotions de manière très poétique, et après je mets la pédale au plancher. Malgré tout c’est super mélodique. Je pense que c’est le genre de musique qui a le plus inspiré ma musique même si au niveau des sonorités ça ne paraît pas tant que ça. »

Dans les coulisses de PEP, on retrouve une liste impressionnante de créatrices et collaboratrices. Lights s’est chargée elle-même du plus gros de la production, mais elle s’est engagée à trouver et recruter des femmes talentueuses comme l’ingénieure Elisa Pangsaeng, l’ingénieure de matriçage Emily Lazar, les coauteures Michelle Buzz (Katy Perry, Bebe Rexha) et Jenna Andrews (BTS, BANKS, BROODS) et la batteuse Jess Bowen (The Summer Set, HAIM).

« Je m’étais donné l’objectif de recruter au moins 50 % de femmes », explique Lights. « J’y suis arrivée. Ça reste quand même un défi quand le bassin de talent est composé à 97 % d’hommes. Sauf que plus on se donnera un objectif du genre, plus ça deviendra normal. »

À l’instar de son album précédent, Skin & Bones, PEP vient accompagné d’une série de bandes dessinées qu’elle illustre elle-même intitulée The Clinic. L’histoire et la palette de couleurs sont arrimées aux illustrations et aux vidéoclips en marge de PEP et elles font autant partie de l’album que les chansons elles-mêmes.

« La musique est au cœur du projet, mais il y a beaucoup plus que ça », explique l’artiste. « Je pense que c’est pour ça que les gens me suivent depuis si longtemps. Ça vient avec tout un monde. »

Édition : un succès signé Sony

Quand on l’interroge au sujet de sa maison d’édition de longue date, Sony Music Publishing, la première chose que Lights nous répond est « c’est comme ma famille ». La relation entre Sony et l’auteure-compositrice remonte à son adolescence lorsqu’elle a coécrit la chanson « Perfect » avec Luke McMaster (de McMaster & James) pour la série télévisée canadienne sur la musique Instant Star et elle est restée solide tout au long de ses 17 ans de carrière. À cette époque, Lights explique que le mentorat de David Quilico et Gary Furniss de Sony l’a vraiment aidée à réussir. « Ils m’ont tant appris à propos de la musique », se souvient-elle. « J’avais 18 ans. Je venais de déménager à Toronto et je ne connaissais personne à par mon gérant. On s’assoyait ensemble et ils me faisaient écouter des chansons qui avaient traversé les époques en m’expliquant pourquoi. Ils m’ont fait participer à plein de camps de création et c’est là que j’ai appris à créer en collaborant avec d’autres artistes. Ils étaient plus que des éditeurs ; j’étais vraiment reconnaissante de pouvoir compter sur eux alors que je débutais ma carrière à un si jeune âge. »