Avec leur projet musical DVTR, Laurence G-Do (Le Couleur) et Jean-Cimon Tellier (Gazoline, Le Couleur) crient, s’époumonent, font bouger les foules et passent des messages par la répétition de paroles « rentre-dedans ». Avec comme carte de visite leur premier EP BONJOUR, paru en novembre dernier, ils annoncent leur arrivée… bruyante, festive et entièrement contrôlée.
« On avait beaucoup d’amour et de colère à extraire de nous-mêmes », lance d’abord Laurence G-Do pour expliquer la nécessité d’un nouveau projet musical, après plus de quinze ans à la tête de Le Couleur. Pour son confrère Jean-Cimon Tellier, DVTR, c’est une opportunité de laisser galoper le naturel qui avait été chassé : « On n’a pas réfléchi à ça en se disant qu’on allait faire de la musique rapide pour chialer contre tout, mais on a fait ce qui nous faisait plaisir et maintenant, on fonce dans le tas ».
Punk? Rock? Enragé? Difficile de placer DVTR dans une case. « On dit souvent qu’on est punk, mais c’est vraiment l’énergie qui est punk, et puis mes pantalons », s’amuse Jean-Cimon. « On peut dire que c’est quelque chose d’hybride qui déménage, mais qui déménage loin, renchérit Laurence. C’est du gueulage intelligent qui demeure dans le plaisir sans être hilarant. Les textes peuvent t’amuser, mais si tu prends le temps de t’y attarder, tu comprends le deuxième degré. »
DVTR s’est ainsi installé par la nécessité de créer un espace pour accueillir le chaos, puis la réception a été complètement hallucinante. Même si le duo n’a été formé qu’il y a un an, les festivals s’arrachent leur présence et le public est au rendez-vous toutes les fois. « Je crois que c’est une question de direction artistique, explique Jean-Cimon. On a une image forte, qu’on cultive sur les réseaux sociaux. Et quand une personne parle de nous à une autre, l’autre n’a pas le choix de dire que ça lui dit au moins un peu quelque chose. »
Pour le groupe, il existe deux clés au succès. La première est le branding, cette image qui n’appartient qu’à eux et qui leur permet de véhiculer une manière de penser et d’être qui va au-delà de la musique. « Nous autres, ce qu’on aime, c’est voyager, triper et se filmer en train de chercher le gars le plus métal à un show de Metallica », dit Jean-Cimon en précisant que dans l’état actuel de l’industrie, la musique ne suffit plus. « Un band qui pense qu’il peut marcher en ne faisant aucun réseau social, c’est farfelu. Tu penses-tu que tu es Mozart ressuscité ? C’est impossible que tout le monde se garroche sur toi si tu te contentes de faire ta musique. Ça n’existe plus des groupes comme ça. »
La deuxième clé, c’est l’expérience et le savoir-faire lié au « deuxième projet ». « Au-delà de tout ça, on est fucking bons, lance Laurence. On a beaucoup d’expérience aussi. Ça fait quinze ans qu’on fait de la musique et ça fait quinze ans que, ce que je préfère, c’est la scène. Le studio, j’haïs ça pour mourir. Donc faire vivre des choses aux gens en live, c’est ce que je sais faire. »

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Jean-Cimon abonde dans le même sens, précisant qu’un premier projet musical permet souvent aux artistes de commettre des erreurs qui ne surviendront pas une deuxième fois. « On est déjà passés par là donc on sait quand on est prêts ou non pour la prochaine étape, on sait sur quoi on doit travailler, dit-il. Il n’y a aucune chance qu’on s’en aille faire une vitrine devant des pros en étant à moitié confiants de ce qu’on s’apprête à faire ».
Il admet qu’avec Gazoline, il a compris ce que c’est, « se péter la gueule » et être « au mauvais endroit, au mauvais moment, avec la mauvaise préparation ». « On le sait que c’est trop important et qu’un diffuseur qui n’est pas convaincu à la première écoute, souvent, tu le perds pour toujours et même cinq ans plus tard, il va probablement passer à côté de ton show qui s’est amélioré, juste parce qu’il se souvient de sa mauvaise expérience quand tu n’étais pas prêt. »
Au moment de fonder DVTR, l’énergie de Le Couleur commençait à se désorganiser selon Laurence qui rappelle que son autre projet évoque des ambiances « cool et atmosphérique ». Même s’il y a de l’énergie dans Le Couleur, il y avait une tangente qui ne s’arrimait plus avec les sonorités électros du groupe. « On était rendus à se grimper dessus, sauter, faire des acrobaties, briser des affaires, ajoute la musicienne. On ne voulait pas dénaturer le produit pour vivre cette portion-là. » « Il n’y a pas de mosh pit dans Le Couleur, complète son complice. C’est peut-être juste ça qu’il nous manquait. »
Incontournable de toutes les programmations de festivals en 2024, DVTR se glisse un peu partout. Révélée aux festivaliers l’été dernier, la formation avait été invitée à bord du bus Festif! à Baie-Saint-Paul. « Il y a eu une confiance immédiate de la part de Clément Turgeon (fondateur du Festif! de Baie-Saint-Paul). À l’été 2023, on avait deux tounes qui étaient sorties seulement et il s’est dit qu’on allait assurer pour animer l’intérieur d’un autobus à minuit pendant son festival », se souvient Jean-Cimon. Outre la confiance des programmateurs et des diffuseurs, DVTR souligne l’immense apport de leur booker. « Il fait un peu peur et il a l’air de péter des gueules », rigole simplement Laurence.
Cet automne, DVTR transportera son énergie au Japon, en Corée et en Allemagne en plus de faire paraître une version Deluxe du EP BONJOUR incluant de nouvelles pièces. « On va aussi sortir une chanson anti-olympique, bientôt, avec un vidéoclip. C’est malade », dit Laurence. « Ça va tellement bien que si on voulait, on pourrait travailler à temps plein sur les projets de ce groupe-là », conclut Jean-Cimon.