L’obscurité et la lumière sont les éléments clés des composantes sonores, lyriques et visuelles du nouvel album de Basia Bulat, Tall Tall Shadow. Il y a d’abord l’imagerie frappante en noir et blanc de l’étui du CD, contrastant avec imagination avec les ombres musicales tout en nuances et les paroles pleines d’intériorité reflétant une perte récente.

Le résultat est un album irrésistible d’un bout à l’autre de cette auteure-compositrice-interprète établie à Toronto, chaudement appréciée de ses fidèles auditeurs internationaux, de plus en plus nombreux, et des critiques musicaux. Au moment de publier cet article, le célèbre journal britannique The Independent vient tout juste d’inclure « Tall Tall Shadow » dans une liste des trois meilleures chansons de la semaine. « J’y côtoie des chansons de Bruce Springsteen et de Leonard Cohen, dit Basia Bulat, j’aurais pu faire pire! »

Tall Tall Shadow montre la transition, chez Basia Bulat, de la musique folk à une sonorité plus texturée et contemporaine. « J’ai changé, ma vie a changé et je pense que c’est une progression naturelle en termes de sonorité et de production, dit-elle. Ce disque est moins enraciné dans la musique roots. Je sens toujours ma filiation avec cette tradition, mais j’essaie nettement d’en repousser les frontières. »

Ses coproducteurs, Mark Lawson (The Suburbs, Colin Stetson), ingénieur du son et lauréat d’un Grammy, et Tim Kingsbury, de la formation Arcade Fire, ont contribué à cette évolution. « Je crois que nous nous sommes tous les trois efforcé de trouver systématiquement la meilleure façon de raconter ce que j’avais à dire dans chaque chanson, explique Basia Bulat. Nous avons essayé toutes sortes de façons d’arranger chaque chanson. Parfois, c’était avec un grand orchestre, parfois avec juste un instrument et ma voix. »

Les chansons de l’album vont des accents chaleureux de la chanson titre et de « Never Let Me Go » aux sonorités plus rares de « It Can’t Be You » (voix et charango uniquement) et de « Paris or Amsterdam » (voix et clavier uniquement).

« Je voulais voir ce qui arriverait si mon point de départ pour écrire ne comportait aucune autocensure. »

L’écriture de Basia Bulat a également pris un nouveau tournant. « J’avais  déjà une foule de chansons d’écrites mais je les ai jetées après tous ces changements dans ma vie, dit-elle. Je traversais une période de deuil et elles ne correspondaient plus du tout à ma vie. Je voulais quelque chose de plus intuitif. Je voulais voir ce qui arriverait si mon point de départ pour écrire ne comportait aucune autocensure. »

Grâce à son entente avec la célèbre étiquette britannique Rough Trade, Basia Bulat a rapidement attiré l’attention en Europe, alors que son inscription sur la liste courte du prix Polaris (pour Oh, My Darling, en 2007) et sa mise en nomination à un prix JUNO (pour Heart of My Own, en 2010) l’ont aidée à se faire connaître ici au pays.

Basia Bulat est fière de ses origines polonaises (elle a choisi le hall de l’Association des anciens combattants, à Toronto, pour une prestation de trois soirs en octobre) et elle cite ses spectacles en Pologne comme des temps forts de sa carrière. « C’est fantastique, dit-elle. Et j’ai eu tellement de plaisir! Ils sont si patients là-bas dans ma terrible Pologne. J’ai aussi travaillé lentement à un album là-bas. »

Son amour pour la musique, et son talent aussi, ont de profondes racines familiales. « Ma mère jouait de la musique classique et a enseigné le piano et la guitare classiques, dit-elle. Ma grand-mère a toujours chanté des chansons et des cantiques de Pologne et elle et mon grand-oncle étaient en parfaite harmonie lorsqu’ils chantaient ensemble. »

Le frère de Basia, Bobby Bulat, est très doué à la batterie et a longtemps joué avec elle, alors que sa mère a toujours encouragé sa passion pour la musique. « Ma mère a toujours été dans le coup, dit-elle. Elle était la première à dénicher des billets pour un concert punk rock pour Bobby! »

Basia Bulat a appris à jouer du piano à l’âge de trois ans et a perfectionné ses talents vocaux et musicaux à l’école. « Je chantais dans la chorale de l’école et j’ai participé à des orchestres et à des formations de jeunes, » se rappelle-t-elle. Par la suite, ses études en littérature anglaise à l’Université de Western Ontario, à London, ont aussi eu un impact.

Et ses talents de multi-instrumentiste sont maintenant mis à profit. Dans ses derniers concerts à Toronto, Basia Bulat a joué du piano, des claviers, de l’autoharpe, du dulcimer ainsi que de la guitare. À la blague, elle a dit au public : « J’ai toujours été une amateur de folk, puis j’ai eu toutes ces pédales pour guitare et je n’ai jamais su comment m’en servir. »

Faits saillants
Éditeur :
Secret City Publishing/Ptak Music
Discographie :
Basia Bulat (EP, 2005), Oh, My Darling (2007), Heart of My Own (2010), Tall Tall Shadow (2013)
Membre de la SOCAN depuis 2008
Visitez le site www.basiabulat.com



Une seule chanson est parfois nécessaire pour tracer le chemin d’un nouveau disque. C’est l’effet que suscite la pièce « Roi de rien » sur Michel Rivard, une musique et un texte apparus avec tant de clarté que le musicien connaissait déjà la suite des choses. Et ce, malgré cette impression de vide qui l’habitait après deux ans de Star Académie, de chansons composées pour la comédie musicale Les filles de Caleb et d’un retour comme comédien à la télévision.

« J’avais vraiment poussé sur le bouchon. Et j’avais l’impression qu’après tout ça, j’entrerais dans une période de repos. Pis non. La toune “Roi de rien” est arrivée d’un coup, très inspirée par les marches dans mon nouveau quartier, le Plateau, que j’aime pour ses ruelles et ses arbres. Cette toune-là m’a dit “je suis la première d’une nouvelle série”. Elle avait une teinte reliée à mon retour en ville, à mon envie de reprendre possession d’une petite partie de moi qui est très montréalaise. » Pendant les deux ans qui suivent, Rivard écrit, compose et organise des concerts intimes dans de petites salles pour tester son matériel. Non, « Demain n’est jamais celui que l’on pense, » chante-t-il sur « Et on avance ».

Pourtant « Roi de rien », cette chanson qui titre aujourd’hui l’album, ce n’est pas tout à fait Rivard. Rivard, s’il était roi, trônerait sur l’intime, sur les petites choses de la vie, ces détails qui font sourire. Un peu comme la chanson « Styromousse », qui raconte l’histoire d’un gars qui quitte une ville comme on quitte une fille. Devant cette affirmation, l’homme sourit et explique d’où lui vient ce « Roi de rien », ce roi qui ne porte en lui aucune connotation négative. « T’as raison, le roi de rien, ce n’est pas moi, le “je” reste inclusif. Je me suis toujours intéressé à l’infiniment petit, aux petites nuances de relations entre les gens, les objets ou la lune. Quand l’expression “roi de rien” est arrivée, je ne savais pas de quoi la toune allait parler. Mais ça me faisait du bien. Être roi de rien, on n’a pas de responsabilité, on n’est souverain de personne, on n’a pas le poids du pouvoir. Et il y a quelque chose de rassurant là-dedans. Ce qui réunit toutes les images de cette chanson, c’est qu’on peut tripper sur une radio qui ne marche plus, parce ça nous donne du silence. Pis que regarder la pluie par la fenêtre de la cuisine, c’est un peu comme regarder sa vie. Et c’est loin d’être déprimant. »

Rivard est toujours en mode composition, que ce soit avec sa chienne et son enregistreuse, fidèles compagnes de ses marches, ou grâce aux nombreux textos qu’il s’envoie à lui-même pour se rappeler de petits bouts de phrases quand il est hors de la maison. L’homme né dans les années 50 écrit des chansons comme on écrit des histoires. Il ne sera jamais celui à s’époumoner sur ses états émotifs, traçant une fine ligne entre le privé et le public, même dans la création. « Oui, j’ai dans mon répertoire quelques chansons complètement autobiographiques, comme “Toujours là pour elles” qui parle de mes filles, mais je ne serais pas capable de faire de la chanson douloureusement confessionnelle. Ça ne m’intéresse pas. Moi, je me plais à créer des petites fictions et non des documentaires. Et quand tu te mets à chercher la rime, tu changes des morceaux et tu t’éloignes encore plus de la réalité. » Michel Rivard écrit pour vivre ces moments magiques où des bouts de phrases d’un cahier trouvent place dans une chanson en construction, où une musique se marie à des paroles et que le tout devient une troisième entité, belle et autonome. « Oui, on peut se donner des trucs, oui, il y a un travail d’artisanat. Mais il y a aussi une part d’inexplicable. Et ça, ça ne s’apprend nulle part. »

C’est lors d’une invitation à interpréter en mode country « Maudit Bonheur » avec les Mountain Daisies que Rivard clarifie la direction musicale de ce dernier disque. « Pour l’enregistrement de L’Open Country avec les Mountain Daisies, tout se passait comme si on était sur une scène. On jouait live dans les studios Piccolo, tout le monde en même temps. Je voulais vivre une expérience comme ça avec Roi de rien. » Afin de trouver cette véracité dans le son, Michel Rivard invite Éric Goulet comme réalisateur. En dix jours, Rivard et ses fidèles acolytes du Flybin Band (Rick Haworth, Mario Légaré, Sylvain Clavette) enregistrent 15 chansons. « Souvent, on enregistrait plus que deux tounes par jour, » se rappelle Rivard avec un large sourire, fier de cette treizième sortie habitée d’espoir et de solitude, de petits et de grands rien. Un album qui fait du bien, d’un Rivard qui a su maintenir une place unique dans notre culture musicale grâce à son inébranlable intégrité artistique.



La 6e édition du Festival de la poutine de Drummondville aura lieu du 22 au 24 août prochain, avec sa programmation qui allie deux des ingrédients préférés des Québécois : musique et poutine! Qui a eu l’idée de ce combo gagnant? Nul autre que le groupe le plus déjanté de la musique québécoise, celui qui chante l’amour de la grand-mère ou des Hawaïennes, découvre qu’elle s’appelait Serge et qu’on est bien, tout nu sur la plage. Bref, de sympathiques et joyeux personnages, très aimés des nombreux fans de leur musique pop aux accents parfois country. Sur la photo du groupe prise en 2005 pour le magazine de la SOCAN Paroles & Musique, on voit ce titre prémonitoire : La recette de leur succès!

Tous originaires de Drummondville et de sa banlieue, le groupe compte quatre membres, Simon Proulx, Alexandre Parr, Charles Dubreuil et Pierre-Luc Boisvert, et chacun a son rôle bien défini quand vient le temps d’écrire et de composer un album, mais aussi d’organiser leur festival. Michel Giguère, représentant externe des Licences au bureau de la SOCAN à Montréal, se souvient de sa rencontre avec le groupe en 2008 : « Ils avaient un local près du Jardin Botanique de Montréal à cette époque. Je les ai trouvés très sympathique. J’avais déjà parlé à leur agent Charles Ouellette et eu la chance d’expliquer plusieurs aspects des droits d’auteur et des Licences à Simon Proulx lors de la remise d’un prix No 1 de la SOCAN. C’est certain qu’ils n’ont pas été difficiles à convaincre d’acheter leur licence du Tarif 4.A.1 – concerts de musique populaire! » Michel ajoute d’ailleurs : « Mes enfants et moi sommes de grands fans. On les a vus en spectacle à Châteauguay, on était aux premières loges, c’était une très belle soirée! »

Le Festival de la poutine 2013, outre ses nombreuses activités de dégustation autour de ce met dont Drummondville revendique la création, présentera en spectacle plusieurs membres de la SOCAN, et non des moindres : Groenland, Radio Radio, Lisa LeBlanc, Les sœurs Boulay, Karim Ouellet, Les Cowboys fringants, le favori des enfants Arthur l’aventurier, Chantal Archambault, Cœur de pirate et le grand Robert Charlebois se produiront dans le superbe parc Woodyatt pour le plus grand plaisir de leurs fans. Pour connaître tous les détails de l’événement, qui prend cette année un virage vert avec des assiettes compostables, consultez festivaldelapoutine.com.