Ce fut une année particulièrement excitante pour l’auteure-compositrice Mo Kenney. Son éponyme premier album est paru à l’automne 2012 et il a rapidement conquis le cœur de nombreux nouveaux fans ainsi que de la critique grâce à sa voix unique et son style folk-pop original.

« J’ai commencé à suivre des cours de guitare à 11 ans et dès que j’ai possédé ma propre guitare, j’ai su que je voulais poursuivre une carrière musicale », raconte-t-elle. « Mais à l’époque, je me voyais plutôt comme guitariste dans le groupe de quelqu’un d’autre. »

Mais le destin en a voulu autrement et, en 2012, elle est partie en tournée pour assurer les premières parties de son collègue haligonien, le rockeur Joel Plaskett, qui a d’ailleurs coproduit son album en plus d’y jouer. Ensembles, ils ont parcouru le Canada de spectacle en festival et elle a même eu la chance de se produire en Islande lors du réputé Iceland Airwaves Festival.

Tel le lapin Energizer, Kenney a repris la route en mars 2013 pour assurer les premières parties de l’icône canadienne du folk-pop Ron Sexsmith. Elle enregistrera un nouvel album au printemps en plus d’aller présenter son spectacle au Royaume-Uni.



N’eût été une importante poussée de croissance à l’adolescence, l’auteur-compositeur-interprète folk Dave Gunning n’aurait peut-être jamais joué de guitare.

« Mes parents ont “oublié” de m’inscrire au hockey une année », raconte Gunning en riant. « Je crois que la vraie raison c’est que mon équipement ne me faisait plus. » Désœuvré dans sa petite ville natale de Pictou, Nouvelle-Écosse, il a attrapé la guitare que son père avait achetée au marché aux puces et un voisin lui a enseigné quelques accords. Ses parents lui ont alors dit que s’il apprenait et chantait deux chansons en entier, ils lui payeraient des leçons. Jamais il n’a cru que ça deviendrait une carrière.

Onze albums plus tard et de très nombreux prix aux East Coast Music Awards, Canadian Folk Music Awards et Music Nova Scotia, notamment, Dave Gunning se dit toujours très privilégié de pouvoir gagner sa vie grâce à la musique.

« Je ne suis pas un “naturel” dans ce métier », affirme-t-il, expliquant qu’il est très introverti et qu’il a tendance à souffrir de trac. C’est son ami d’enfance, JD Fortune, qui est plus tard devenu le leader de INXS, qui l’a encouragé à monter sur scène pour la première fois. Gunning est néanmoins beaucoup plus à son aise sur scène de nos jours, y ayant passé plusieurs centaines d’heures sur le circuit des pubs des provinces maritimes avant de se sentir prêt à présenter sa propre tournée.

« Je crois que ce n’est pas du tout inhabituel dans le domaine du folk de vivre des centaines de petits moments plutôt qu’un seul énorme moment »

Gunning décrit affectueusement sa démarche artistique de « col bleu » et affirme que ce qui l’attire, c’est d’être un conteur et de préserver l’histoire à travers ses chansons. Son plus récent album, No More Pennies, a fait la manchette un peu partout à travers le monde après que la Monnaie royale canadienne ait exigé qu’il paie des redevances pour avoir utilisé une image des défunts « sous noirs ». La société d’État a fini par abandonner l’idée, mais elle a quand même exigé que Gunning fasse une collecte de sous noir pour les verser à un organisme caritatif. C’est ainsi qu’il a versé 6200 $ à l’Hôpital pour enfants d’Halifax.

Nombreux sont ceux qui croient que Gunning mérite d’être connu et reconnu d’un plus vaste auditoire, mais il se dit très satisfait de la façon dont les choses ont évolué jusqu’à maintenant. « Je crois que ce n’est pas du tout inhabituel dans le domaine du folk de vivre des centaines de petits moments plutôt qu’un seul énorme moment », dit-il avec contentement. « En tout cas c’est comme ça que ça s’est passé pour moi. »



On ne l’espérait plus ce deuxième album de Gros Mené. Treize ans après la parution du quasi-mythique Tue ce drum, Pierre Bouchard, le clan ressurgissait l’automne dernier avec Agnus Dei. Toujours ancré dans les racines stoner rock, la nouvelle cuvée du Mené proposait un rock lourd, sale, déglingué et groovy, aux relents psychédéliques et bluesés. Une bouillabaisse sonore décapante, certes, mais moins brutale que la première livraison. Appelons ça une pointe de raffinement. Si la bête s’est quelque peu calmée, elle aurait pu ne jamais ressortir de son antre.

« Honnêtement, ce n’était pas prévu que je fasse un autre album de Gros Mené, lance Fred Fortin, maître du projet. C’est un accident de parcours, ni plus ni moins. Ce n’était pas primordial pour moi. À un moment donné, l’envie m’a pris de faire quelque chose de différent de ce que je faisais habituellement. Je me suis lancé tête première là-dedans, sans trop réfléchir et je l’ai fait. Ça s’est construit rapidement. En 13 ans, on a tous évolué. L’expérience emmagasinée, le bagage d’influences entrent en ligne de compte. C’est clair qu’on n’avait pas envie de refaire un Tue ce drum, Pierre Bouchard. J’ai ramassé des tounes et j’ai commencé à enregistrer avec du monde en assemblant des trios selon le besoin des chansons. Gros Mené stimule d’autres paramètres, d’autres façons de faire au niveau de la composition. C’est une direction artistique complètement différente de mes albums solo. Et il y a du fun à avoir avec ça! »

« Un jour, tu te rends compte que tu es trentenaire et que la musique est tout ce que tu as fait de ta vie. Tu n’as plus le goût de retourner à l’école […] ou d’aller travailler dans une shop de 9 à 5. J’ai 41 ans et je ne pense pas encore à la retraite. Il y a trop de belles choses à vivre dans ce métier pour arrêter. »

Histoire de vieux chums
Celui qui a réussi à faire paraître trois albums solo depuis le nouveau millénaire s’est une fois de plus bien entouré. Collaborateurs de la première heure chez Gros Mené, Olivier Langevin et le fameux Pierre Bouchard reviennent à bord. « On est des vieux amis. C’est la musique qui nous unit tous les trois. Lorsque tu as des chums que t’apprécies, tu t’arranges pour les garder près de toi, » raconte Fortin. Souhaitant procurer une force de frappe encore plus imposante et galvanisante à l’ensemble, Fred a recruté Pierre Fortin (Galaxie) et Robbie Kuster (Patrick Watson) à la batterie. Parmi les autres collègues repêchés pour Agnus Dei, notons Jocelyn Tellier et Noël Fortin (le père de Fred).

Alors qu’au niveau créatif, Fortin s’occupe de l’échafaudage des pièces du nouveau Mené, les musiciens invités fignolent autour de ce qui leur est proposé. « Il ne faut pas oublier que Gros Mené demeure mon projet. C’est du Fred Fortin déguisé! Les gars apportent leur contribution tant au niveau de la personnalité dans leur jeu, des arrangements que des solos. Mais il ne faut pas oublier que les textures chez Gros Mené, c’est vraiment sur le fly. Rien n’est vraiment prévu d’avance. On vit avec beaucoup d’accidents. Beaucoup de verres de vin renversés aussi! » rigole Fortin.

Faire vite et bien
Malgré ses projets en solo, son implication au sein de Galaxie, ses contrats de réalisateur et ses nombreuses collaborations, Fortin considère qu’il est possible de tout faire sans pour autant devenir fou. La clé du succès? Bien faire les choses, et surtout, rapidement. « Tu fais ce que tu peux avec la famille et une foule d’autres facteurs. Je ne suis pas quelqu’un qui écrit à l’année longue. Il faut que je m’enferme, que je sois isolé du reste du monde. Lorsque je vais m’embarrer dans mon chalet pour travailler, il faut que je négocie avec ma blonde et mes enfants! C’est une période très condensée. Ça se fait vite. Je n’ai pas besoin de gosser trop longtemps une chanson, contrairement à beaucoup d’artistes que je connais. En tournée avec Galaxie, je prends parfois du temps pour écrire des tounes ou préparer mon prochain projet. Même chose pour Olivier. On se pousse dans le dos et se motive l’un et l’autre. Puis les autres offres viennent au hasard. Quelqu’un te propose quelque chose et si ça fitte dans ton horaire, tu acceptes, » avance-t-il.

Les joies et aléas du métier
Lorsqu’on demande à l’auteur-compositeur quels conseils il prodiguerait à un jeune artiste souhaitant réussir dans le métier, il réagit vivement. « Dans le fond, c’est de ne pas faire ce que j’ai fait depuis mes débuts! Sans blague, il faut être acharné, avoir une tête dure et un caractère fort pour persévérer et ne pas lâcher le morceau. Aujourd’hui, les moyens pour enregistrer sont plus flexibles et pour se faire connaître, on peut s’ouvrir un compte Facebook. Mais pour organiser une tournée, c’est plus difficile pour quelqu’un qui débute. Il y a tellement d’albums qui sortent. Se distinguer de la masse devient un véritable casse-tête, » soutient Fortin, Verdunois de tête, mais Jeannois de cœur.

Alors que les gars de Gros Mené trimballeront allègrement leur rock de garage (ou plutôt de chalet) sur les routes québécoises au cours des prochains mois, notre slacker favori se contente de savourer pleinement les petits bonheurs du métier. « Je n’ai pas de projets grandioses pour l’instant. Tu sais, j’aime encore faire de la trail les fins de semaine sur les routes, participer aux festivals, enregistrer des tounes dans mon chalet. Je n’ai jamais eu trop d’attentes face au métier. J’ai vécu des périodes où c’était difficile, d’autres où tout allait bien. Puis, un jour, tu te rends compte que tu es trentenaire et que la musique est tout ce que tu as fait de ta vie. Tu n’as plus le goût de retourner à l’école. Lorsque tu as encore du plaisir, tu n’as pas envie d’aller travailler dans une shop de 9 à 5. J’ai 41 ans et je ne pense pas encore à la retraite. Il y a trop de belles choses à vivre dans ce métier pour arrêter. »