Il fait souvent son propre booking, il enseigne le slam aux enfants dans les écoles, il est dans quatre bands sur deux continents. C’est pas quelqu’un qui a du temps pour faire de la broderie, mais s’il aimait ça, probablement qu’il se donnerait du temps pour l’art des petits fils de couleur aussi. Voici tout ce qu’il faut faire pour en faire autant que Noé Talbot, un gars de 28 ans qui a déjà six carrières et quelques side jobs.

Noé Talbot Autodidacte, il faisait sa première tournée à l’âge de 17 ans. Vous avez déjà entendu parler de Fortune Cookie Club? Col Rouge? Super Punk? Il est là.

Si ces nombreux projets voguent dans les eaux troubles du punk, il serait erroné de placer Noé dans une case. Paru en juin dernier, son deuxième album complet, Laisser le poste ouvert, n’emprunte aucun code à la musique punk.

« Quand j’écris une chanson, je sais directement ça va être pour quel projet. J’ai trois bands punks, un où je vais plus dans la poésie, ou des airs mélancoliques emo, explique le musicien. Avec Super Punk, c’est quatre accords et des blagues, avec Fortune Cookie Club, j’essaie de laisser beaucoup de place aux autres, pour mon projet solo acoustique, c’est hyper personnel, le processus de composition est vraiment différent. »

S’il réussit à cerner l’identité des différents projets, Noé Talbot n’a pas l’impression de s’éparpiller. « Je fais tellement de musique que je pourrais sortir trois ou quatre albums par année. » Bien sûr, les cadres de création diffèrent d’un groupe à l’autre. « Paul Valéry disait que la contrainte augmentait la créativité, raconte l’auteur-compositeur. Je suis vraiment d’accord avec ça. »

Une voie jamais explorée

« Je suis en train de terminer un album rap », lance Noé Talbot, comme s’il annonçait qu’il vient de finir une brassée de lavage. Alors qu’il jouait de la guitare sur un show de D-Track à Gatineau, il s’est laissé aller pour un slam en sa compagnie. C’est Horg, de Seba & Horg qui, l’ayant entendu, lui a proposé de mettre ça sur du rap.

« J’ai étudié les codes du rap pendant sept-huit heures par jour, je voulais comprendre et ça me fascine, assure Noé. Je suis un gars de rap conscient comme Orelsan, Stromae, Romeo Elvis. J’ai toujours écouté Manu Militari et Koriass. J’aime beaucoup le rap quand il va dans le mélodique, avec des refrains chantés. »

Il demeure captivé par tout ce que le rap lui apporte, tout ce qu’il n’avait pas exploré encore. « Ça fait quinze ans que j’écris de la musique et que je peux voir les accords dans ma tête. Quand je fais un do, un la mineur, un ré… je les vois. Avec le rap, je ne vois rien du tout. C’est fantastique. » C’est sur la nouvelle branche de Slam Disques, Hell For Breakfast, que Noé Talbot lancera ce printemps ses premiers extraits rap.

Depuis les Fêtes, il ne s’éparpille plus et affirme, solide, qu’il peut « vivre de sa musique ». « Je pense juste à ça. Je sais ou je m’en vais », dit-il. Les projets ne sont ici jamais source d’angoisse, mais plutôt de créativité. « Demain, ça va peut-être être une opportunité punk rock, un festival, des vitrines en Europe en solo. J’y serai », promet-il.

En plus des premiers battements de son projet rap, Noé Talbot prépare un EP avec Col rouge, une collaboration avec un groupe français, la sortie d’un nouvel album avec Super Punk, la parution d’un album récapitulatif de Fortune Cookie Club avec Slam Disques, la réalisation de l’album de Distance Critique, un groupe de Québec, un EP de reprises acoustiques de chansons avec Dominic Pelletier de Caravane. Talbot écrit aussi un livre pour enfant, il a du matériel pour un autre album solo et des spectacles s’en viennent pour l’été.

Comme il vient du punk, il n’avait jamais vraiment pensé mettre la musique au centre de tout le reste. « Depuis un an, je sais pas mal où je m’en vais, promet-il. J’ai toujours su que la musique serait un élément de ma vie, mais pas l’élément central autour duquel tout gravite », avoue-t-il en assurant que, là, les nouvelles avenues possibles l’élèvent à tous les niveaux. « J’espère ne jamais avoir fait le tour en vieillissant. »