Adriane Cassidy

Si la musique donne un autre souffle à la jeunesse, ce n’est pas la vocation qu’on lui vouera ici. À 21 ans, Lou-Adriane Cassidy dévoile un son et des états d’âme qui n’ont pas d’âge. Avec C’est la fin du monde à tous les jours, elle raconte la mort qui survient au quotidien, les petites choses qui nous glissent entre les doigts, les souvenirs qui ne périssent jamais et ce qu’il reste quand le cœur se vide.

L’album commence avec la chanson de « la fin du monde », une pièce qui lie toutes les autres « Ce n’est qu’à la fin de la création de l’album que j’ai réalisé que c’était ça, le sens. J’avais peur de trop me plaindre sur mon album. Mais la fin du monde à tous les jours, c’est la perspective que je voulais donner à mes plaintes. Je relativise », assure la jeune femme.

Reconnue pour son passage remarqué dans moult concours de chanson, Lou-Adriane assure qu’il était temps que cette étape soit franchie. « Le monde dans lequel j’évolue aujourd’hui, c’est une conséquence directe ou indirecte des concours, donc je suis vraiment chanceuse, dit-elle. Mais j’étais écœurée, j’étais pus capable de me sentir en examen quand je montais sur scène. » Pour elle, sa voie n’est pas un passage obligé. « Comme je fais de la chanson, je suis entrée facilement dans le cadre nécessaire pour les concours. Ce n’est pas le cas de tout le monde et je pense donc que ce n’est pas indispensable. »

Histoires plurielles

Sur son premier opus, Cassidy « attend que la brûlure s’apaise », elle « embrasse à outrance », elle « crache sur ses vingt ans » pour aimer quelqu’un qui n’a pas son âge, elle « mange des yeux un corps déjà froid ». Elle esquisse ainsi une aura charnelle, un amour qui sort du cadre de son évidente jeunesse.

Les histoires sont celles qu’elle écrit, mais aussi celles écrites avec l’aide de Tire le coyote ou Stéphanie Boulay, par exemple. Issue entre autres du concours télévisuel La Voix, elle a essuyé a posteriori des critiques négatives et fortes par rapport à son titre d’interprète. Aux Francouvertes au printemps dernier on lui reprochait vivement de ne pas chanter que ses propres chansons, son premier single Ça va, ça va ayant d’ailleurs été écrit par Philémon Cimon. « C’est une affaire d’époque, dit-elle. Ma mère a été interprète toute sa vie donc c’est quelque chose que je peux facilement observer. C’est vraiment quelque chose d’actuel de lever le nez sur les gens qui veulent interpréter les chansons des autres, décrie-t-elle. Il y a des gens qui écrivent des maudites bonnes tounes, mais qui ne peuvent pas les transmettre. C’est beau, les collaborations ! J’adore mettre mon interprétation sur quelque chose créée par quelqu’un d’autre. »

On lui a déjà dit qu’un jour elle devrait bien « être capable de faire un album complet toute seule ». « Mais c’est pas ça que je veux !, lance-t-elle. On met sur un piédestal l’auteur-compositeur-interprète, mais la collaboration est tellement plus riche pour moi. »

Entrer dans la musique

Être un artiste de la relève en 2019 et à peine amorcer sa vingtaine, c’est un état particulier. Avec les diverses métamorphoses que subit l’industrie, il est juste de se questionner sur ce qui attend les artistes qui sont encore à l’aube de leur carrière. «  Il n’y aucune façon de savoir où la musique s’en va, parce qu’on est dans une tornade, dit Lou. Mais ça fait trois ans que chaque six mois, ma vie change complètement. Et quand je m’arrête et que je pense à ce que j’étais six mois avant, je ne comprends pas du tout comment je suis arrivée là. »

Pour elle, la clé, c’est de savoir se diversifier, une stratégie qui va de pair avec son approche de la musique : on peut porter plusieurs chapeaux. « Je veux continuer à jouer avec Hubert Lenoir (elle l’accompagne sur scène comme musicienne et choriste), faire de la musique de pièce de théâtre, réaliser des albums. C’est pas mon but dans la vie de faire des albums d’auteure-compositrice-interprète. Ça offre plus de possibilités. »

Lou-Adriane Cassidy tricote ainsi un univers dont elle est le maître, mais dans lequel il est possible de graviter avec elle. La porte est ouverte, tout le monde est invité. Même si plusieurs mains ont façonné ce premier album, Lou est catégorique : elle est bel et bien aux commandes, responsable de la cohérence des émotions qu’on y véhicule. « Amours immatures (écrite et composée avec Rebecca Leclerc et Simon Pedneault), c’est un bel exemple. Je trouve ça l’fun comme sujet. C’est un angle qui n’est pas souvent abordé. Je suis fière d’être la porte-parole de ça, de se dire que c’est possible d’aimer quelqu’un en occultant son âge. »

Sur scène, les pièces s’enchaîneront en faisant passer le spectateur du plus petit au plus grand. La douceur des pièces interprétées en solo à la guitare se mariera aux envolées rock avec Pierre-Emmanuel Beaudoin, Simon Pedneault, Alexandre Martel et Vincent Gagnon. « Il y aura aussi quelques reprises et ce sera sobre sans être trop sombre », complète l’artiste.

Lou-Adriane apprécie que sa collaboration au projet d’Hubert lui retire une partie de ses allures d’enfant sage, mais elle rappelle qu’elle est tout à fait en mesure d’occupe l’avant-scène. « T’sais dans la vie, tu peux sauter partout pendant deux heures et avoir une discussion profonde sur la métaphysique après. On est tous complexes. Nous ne sommes pas qu’une chose et je ne serai jamais que mon projet solo. »