Meg Symsyk a une mission.

Depuis qu’elle est entrée en fonction en tant que chef de la direction de FACTOR (The Foundation Assisting Canadian Talent On Recordings) pendant la pandémie, Meg Symsyk s’est efforcée d’assurer que les programmes de soutien que son organisation subventionne s’accompagnent d’un nouveau mandat : la flexibilité.

“On n’y serait pas arrivé sans FACTOR”

Les membres de la SOCAN qui ont reçu l’aide de FACTOR ne manquent pas. On pense notamment à Charlotte Cardin, A Tribe Called Red, Alvvays, Cadence Weapon, Charlotte Day Wilson, et bien d’autres. Dans le cadre de sa campagne #FACTORfunded visant à mettre en valeur les succès des artistes et des groupes que l’organisation a soutenus, FACTOR partage en toute transparence une liste des bénéficiaires de subventions pour les deux dernières années. FACTOR s’est avéré d’une valeur inestimable pour de nombreux membres de la SOCAN qui peuvent témoigner de l’importance que l’organisation a eue et continue d’avoir pour leur carrière.

PUP

PUP

Par exemple, Stefan Babcock, chanteur et guitariste de PUP, affirme que FACTOR a été un allié indispensable au début de la carrière du groupe. « Ils nous ont vraiment beaucoup aidés quand on a commencé », explique l’artiste. « On a enregistré notre premier album sans l’aide d’une maison de disques et on n’aurait simplement pas pu le faire sans l’argent de FACTOR. Leur soutien pour nos tournées a aussi été incroyable. On a toujours été un groupe qui est constamment en tournée. Nos premières tournées aux États-Unis et en Australie n’auraient pas été pensables sans l’aide de FACTOR. Aujourd’hui, ces marchés sont profitables pour nous. »

Neon Dreams

Neon Dreams

Adrian Morris, le batteur du groupe Neon Dreams, abonde dans le même sens que Babcock. « FACTOR nous a permis de faire beaucoup de choses qu’on n’aurait pas pu faire sans leur soutien », explique-t-il. « On a eu beaucoup de succès en Afrique du Sud et je ne pense pas qu’on aurait été capables d’aller là-bas sans le soutien de FACTOR et tout ce que l’organisation fait pour nous. Quand on a commencé à jouer à la radio et à mener de vraies campagnes de relations publiques, FACTOR a été en mesure de nous soutenir et de nous offrir du financement. »

« Les trois dernières années ont vraiment changé ce que FACTOR faisait », explique-t-elle. « Nous avons évolué et nous nous sommes modernisés. »

Et ça, c’est une particulièrement bonne nouvelle pour les membres créateurs et éditeurs de la SOCAN. Parmi les programmes proposés, on retrouve le Songwriter Development, qui offre 75 % d’un montant maximal de 2000 $ pour couvrir les dépenses liées à des initiatives d’écriture de chansons, telles que des voyages nationaux ou internationaux impliquant des séances de coécriture, des camps de création, des ateliers, des voyages et des voyages admissibles.

Certains programmes destinés aux entreprises musicales s’adressent aux éditeurs qui peuvent recevoir 5 % du budget total admissible, jusqu’à un maximum de 7500 $ pour le niveau 2, et 20 000 $ pour les entreprises candidates aux niveaux 3 et 4, pour les voyages d’affaires et le soutien aux auteurs-compositeurs. Une aide financière est également disponible.

« En ce qui concerne les auteurs-compositeurs », explique Symsyk, « les éditeurs aiment répéter – et je le répète aux employés [de FACTOR] – “les chansons voyagent dans le monde entier et qu’elles peuvent être écrites par des Canadiens que nous voulons aussi soutenir”. Alors que ce soit un artiste canadien qui a écrit une chanson – que ce soit lui ou elle qui l’interprète ou quelqu’un d’autre, ce sont ces programmes que je veux m’assurer qu’on a en place pour les créateurs du Canada : l’argent ou les ressources nécessaires pour qu’ils puissent aller dans un camp de création à L. A. ou ailleurs où ils vont créer la prochaine chanson d’une grande vedette. »

Elle admet toutefois qu’étant donné que le programme Songwriter Development a été lancé l’année où la pandémie a frappé, il a été quelque peu sous-utilisé depuis sa mise en place. Sa croissance va bon train maintenant que les restrictions en matière de déplacements ont été levées. Même si certains programmes FACTOR prévoient des dates limites concrètes, le programme Songwriter Development n’a pas vraiment de date butoir et il est possible de demander la subvention même la veille d’un voyage.

« Il y a d’innombrables chemins vers le succès dans le domaine de la musique et nos programmes doivent être plus souples et plus réactifs pour que les artistes puissent poser leur candidature sans avoir à se soucier des délais », affirme Meg Symsyk. « Si une de nos règles n’a aucun sens, je demande au Conseil de la changer. »

Elle attribue à son expérience dans l’industrie – où elle a travaillé pour des labels majeurs et indépendants, dans la publicité, la gérance et en tant que gestionnaire de tournées mondiales – sa capacité à voir les choses du point de vue du créateur et de l’interprète. « Quand les gens viennent me voir avec des programmes ou des préoccupations, je suis capable de voir les choses de leur point de vue », avoue-t-elle.

“On a aussi lancé un nouveau programme appelé the Juried Sound Recording: Single/EP program, qui était auparavant réservé aux albums. C’était notre programme qui recevait le plus de soumissions, mais à peine 10 % des demandeurs répondaient aux exigences. De nos jours, plusieurs genres musicaux sont axés sur les simples, alors on s’est adapté à la façon dont le public consomme la musique et on a maintenant un programme pour les simples et les albums. Autrement dit, si vous évoluez dans le domaine du hip-hop ou de la musique électronique et que vous ne cherchez pas du soutien pour un album complet, mais juste pour une chanson ou un EP, on a un programme pour vous.”

Meg Symsyk affirme que la bonne nouvelle concernant les 10 M$ alloués à ces programmes avec jury, c’est que le bénéficiaire peut réorienter une partie de ces fonds vers le marketing ou d’autres dépenses. « On a un programme qui offre 25 000 $ pour un EP, mais ça ne vous oblige pas à tout dépenser », explique-t-elle. « Si vous n’avez besoin de dépenser que 10 000 $, nous vous fournirons 75 % de vos dépenses admissibles. Si vous êtes un artiste de hip-hop et que vous décidez de consacrer la majeure partie de votre argent à “feature” et à des produits phares Instagram/TikTok/Spotify pour le marketing, vous pouvez le faire. »

L’avantage du projet de loi C-11 pour aider FACTOR à financer la musique canadienne

Meg Symsyk, FACTOR

Meg Symsyk de FACTOR

Meg Symsyk pense que l’adoption du projet de loi C-11 – la Loi sur la diffusion continue en ligne, qui assure que les médias numériques verseront un petit pourcentage de leurs revenus canadiens pour aider à soutenir et à développer les talents canadiens – profitera à la culture canadienne.

« À l’heure actuelle, les radiodiffuseurs privés paient leurs licences au CRTC et un petit pourcentage est versé à Patrimoine canadien, qui l’affecte à différents programmes », explique-t-elle. « L’un de ces programmes concerne la musique et le développement des talents émergents. »

« Quand on regarde les principes derrière la façon dont tout ça a été mis en place, on constate que l’argent a bel et bien été utilisé de la bonne façon depuis plus de 40 ans. Et quand on pense à l’évolution de l’industrie de la musique, il fut un temps où cet argent allait à FACTOR. On finançait de nouveaux albums canadiens pour que les stations de radio puissent respecter leurs obligations en matière de contenus canadiens, et les fonds dédiés au marketing que [les bénéficiaires de subventions] recevaient étaient principalement utilisés pour acheter de la publicité, par exemple dans le magazine NOW ou sur les ondes de CFNY, par exemple. »

« Aujourd’hui, les gens achètent des pubs sur Facebook ou YouTube et l’argent qui l’écosystème de la musique. Il font encore partie du système, mais ils n’y contribuent pas. On parle d’un certain pourcentage des revenus générés – une petite partie étant reversée pour soutenir les talents canadiens dont ils font la promotion pour que tout se passe comme prévu lorsque vient le temps de soutenir les talents canadiens qu’on veut voir dans les médias. »

« Je crois que c’est positif et que même s’il y a de la résistance en ce moment, quand les gens vont commencer à voir des résultats, cette résistance va disparaître. »

« Si vous êtes un artiste électronique et que vous ne voulez pas utiliser votre propre argent pour l’enregistrement parce que vous avez un studio maison, vous pouvez utiliser votre argent pour vous concentrer sur le marketing. Si vous êtes un artiste folk et que vous devez consacrer tout votre argent aux déplacements, à l’hébergement, à l’essence et à l’inflation durant votre tournée, vous pouvez le faire. »

« En élargissant les programmes de cette façon, on va voir beaucoup plus de succès dans des genres musicaux qui ne recevaient pas beaucoup de soutien, traditionnellement, comme le hip-hop et le R&B. Les paramètres utilisés pour évaluer un grand nombre de ces demandes étaient basés sur la diffusion à la radio et les tournées. On veut s’assurer qu’on n’agit pas comme un frein au succès de certains genres musicaux à cause des règles de nos programmes. »

Depuis que la diffusion en continu a supplanté les ventes dans l’industrie, le mandat de FACTOR a lui aussi évolué, passant des subventions systémiques à des investissements dans la carrière et les modalités financières favorisent fortement le bénéficiaire approuvé, qu’il s’agisse d’un auteur-compositeur ou d’un interprète.

« Le marché des produits physiques se limite pratiquement aux vinyles et aux produits dérivés qui bonifient l’image de marque », explique Mme Symsyk. « La seule chose que vous devrez rembourser, c’est dans l’éventualité où on vous accorde une avance, mais que vous ne nous fournissez pas suffisamment de dépenses admissibles. On ne donne le feu vert qu’à des projets qui affichent une croissance historique et continue. Par exemple, si quelqu’un a demandé un JSR [Juried Sound Recording] cette année, qu’il l’a obtenu et qu’il présente une nouvelle demande dans deux ans, mais qu’il n’a pas obtenu des résultats avec le financement que nous lui avons accordé, nous poserons des questions, comme n’importe quel investisseur : est-ce que c’était un bon investissement? Ont-ils réussi à rejoindre leur public? »

« Nous investissons, avec le bon donateur – qu’il s’agisse de l’artiste lui-même, de la compagnie, du gestionnaire, du label ou de l’éditeur. »

Alors, cette mission? Elle l’accomplit quotidiennement.