Adam Lastiwka, le compositeur vancouvérois de musique pour le cinéma, la télé et les jeux vidéo, est très influencé par la musique électronique contemporaine, mais ses compositions ont presque toujours un vaste éventail d’instruments acoustiques et électriques.

Pour ce qui est de l’attrait des sources numériques, il affirme que « la technologie me sert à créer de nouveaux sons excitants que les gens n’ont jamais entendus auparavant, en plus de me permettre d’aborder la musique d’une manière qui n’est pas totalement conventionnelle… J’aime beaucoup la musique du monde et je me fais un point d’honneur de jouer le plus d’instruments possible dans mes projets. Il y a une pièce chez moi où j’entrepose une quarantaine d’instruments de partout à travers le monde. Je m’en sers comme source d’inspiration. »

Certains de ces instruments sont rares, voire uniques : il y a un luthkulélé, un hybride entre un luth et un ukulélé, quelques guitare-violes de marque Togaman (un instrument hybride qui a une portée allant du violoncelle à la viole de gambe), ainsi qu’un charango sud-américain à dix cordes dont la caisse de résonnance est fabriquée à partir de l’armure d’un tatou qui, naturellement, a encore sa fourrure et ses oreilles.

« Tu t’assois, tu étudies un projet et, si tu écoutes vraiment bien, il te dira exactement quoi faire. »

« Les instruments à cordes me viennent aisément », explique l’homme, citant les similitudes entre beaucoup d’instruments de différentes cultures. « Je ne suis maître d’aucun d’eux, mais je peux en prendre un et me dire “OK, qu’allons-nous créer aujourd’hui?? Est-ce que cet instrument peut inspirer ou dériver quelque chose??” »

Plus il a des sources d’inspiration à sa disposition, plus il est en mesure de servir ses clients et de créer des produits à la signature sonore et aux textures uniques.

Comme bien des compositeurs à l’écran, Lastiwka n’a pas débuté sa carrière dans ce domaine.

Adam Lastiwka

« Je suis arrivé à la musique sur le tard », explique-t-il. « J’avais environ 16 ans. » Il a toutefois rapidement rattrapé le temps perdu?; il a signé un contrat de disque pour trois albums et son premier était prêt alors qu’il n’avait que 17 ans?; l’album est paru l’année suivante.

Pour bien des gens, être un artiste solo, ou être membre d’un groupe, est ce qui les pousse à faire carrière en musique, mais pour Lastiwka, cette étincelle est venue de la composition à l’écran. « Alors, au lieu de tenter de devenir une rockstar, je me suis plutôt tourné vers la composition pour des projets de licences. » En ce sens, ce premier album était plutôt une vitrine pour ses compositions.

Puis, il y a environ 10 ans, après avoir lancé les trois albums prévus à son contrat, Lastiwka a quitté sa ville natale de Lethbridge, en Alberta, pour s’établir à Vancouver. « J’étais convaincu que je pourrais devenir compositeur pour le cinéma juste comme ça », raconte-t-il en riant. Mais la transition ne s’est pas faite aussi doucement qu’il l’imagnait, et avant peu de temps, Lastiwka a dû se trouver de « vrais » boulots et a délaissé la composition pendant un certain temps.

« C’était au tout début de l’enregistrement maison », se souvient le musicien. « La technologie de studios numériques existait, mais c’était la première fois que l’on pouvait enregistrer directement sur un ordinateur grâce à des technologies peu dispendieuses. Ce qui était bien, donc, c’est qu’en même temps que ma carrière de compositeur à l’écran périclitait, je travaillais dans des magasins de musique, j’étais responsable de mettre sur pied leurs divisions d’enregistrement numérique, et j’avais donc un accès privilégié à toutes ces technologies et à ce qui s’en venait dans le domaine. »

Environ un an plus tard, alors qu’il était sur le point d’abandonner, une des pièces de son premier album a été sélectionnée pour figurer au film Body of Lies de Ridley Scott. « J’arrivais à peine à payer mon loyer à cette époque, et ça m’a redonné espoir de gagner ma vie avec ça, et cet espoir m’a soutenu très longtemps. »

Il a fallu peu de temps avant qu’il se trouve un emploi comme assistant pour le compositeur à l’écran Shawn Pierce (The Dead Zone, Recreating Eden), ce qui lui a permis, pendant de nombreuses années, de peaufiner son talent et de se faire d’innombrables contacts dans l’industrie. Depuis, Lastiwka a contribué ses compositions à plus de 500 épisodes télé, incluant des téléréalités, de nombreux documentaires de Discovery Channel et de la CBC, entre autres, des longs-métrage comme Foreverland et le susmentionné Body of Lies, ainsi que des jeux vidéo, dont notamment Batman Arkham City.

Plus récemment, il a composé la musique de Travelers, une série de science-fiction du producteur et créateur de Stargate, Brad Wright, présentée par Netflix et Showcase. Ce qui est vraiment excitant au sujet de Travelers, c’est que comme il s’agit d’un concept sur le voyage dans le temps, j’ai pu utiliser tous ces instruments non conventionnels », se réjouit Adam Lastiwka.

Au départ, poursuit-il, Travelers lui permettait de s’inspirer d’une très grande palette sonore, mais au fur et à mesure que l’émission progressait, « je la précisais de plus en plus ».

En ce qui a trait à la composition pour le cinéma plutôt que la télé, ce sont des défis différents. « Tu t’assois, tu étudies un projet et, si tu écoutes vraiment bien, il te dira exactement quoi faire », croit l’artiste. « En télé, un projet peut durer des années, alors on a beaucoup plus de temps pour raffiner avec précision le produit fini. C’est très instinctif?; les premiers épisodes sont toujours un véritable cauchemar, mais plus le temps passe, plus les choses sont bien établies. »

Quoi qu’il en soit, chaque production requiert une approche différente. « En cours de route, il est normal d’observer et d’analyser les choses, et on finit par développer un sixième sens et une approche particulière, mais il ne faut jamais oublier que l’on joue pour l’auditoire », affirme Lastiwka. Lorsque je travaille avec un réalisateur ou un producteur, je souhaite d’abord trouver une façon de communiquer avec eux, comprendre comment eux communiquent leurs émotions et exprimer cela. »