Des décennies avant de devenir un « hit maker » pour Madonna, Britney Spears et, plus récemment, High Valley, Jenson Vaughan, de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, ne savait rien du talent artistique nécessaire à la création d’une chanson. Il l’a simplement attrapé au vol.

« J’avais formé un petit groupe a capella », raconte-t-il en parlant de l’époque où il fréquentait l’école secondaire. « Et grâce à mon profil jazz, je savais comment arranger et comprendre la musique. Rapidement, les gens nous disaient que nous avions une belle sonorité et que nous devrions composer notre propre musique. Aucun d’entre nous ne connaissait d’auteurs-compositeurs et l’idée d’écrire notre propre musique ne nous était jamais venue. »

« Je leur ai donc dit que j’allais écrire une chanson pour notre groupe. Quand je suis rentré chez moi, ce soir-là, je me suis installé et, entièrement dans ma tête, sans l’aide d’un quelconque instrument, j’ai commencé à assembler les voix, le refrain, les paroles et la mélodie. Ça me venait tout naturellement. Le lendemain, je leur ai présenté le résultat et tout le monde était sous le choc. C’est là que je me suis dit que s’ils n’en sont pas capables et que moi je le suis, j’avais peut-être un talent inné pour ça. »

Étrangement, toutefois, il faudra encore quelques années avant que Vaughan, qui a coécrit « This Is What It Feels Like » d’Armin van Buuren et Trevor Guthrie, chanson finaliste aux Grammys et lauréate d’un prix JUNO, embrasse ce talent. Après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires, il s’est établi à Las Vegas pendant un an et y a formé un groupe folk-rock en compagnie de son collègue auteur-compositeur Jason David et ils ont joué dans les petits cafés de la ville jusqu’à ce que Jenson tourne son regard vers Vancouver. « Mon grand frère vivait là et je n’avais pas envie de retourner en Nouvelle-Écosse », raconte Vaughan. « Je voulais poursuivre mon aventure et continuer d’apprendre. »

« C’était beaucoup de travail et de manière graduelle, je refusais de me contenter du niveau où j’étais, je voulais m’améliorer constamment. »

C’est donc à 26 ans que Jenson Vaughan est officiellement devenu auteur-compositeur « sur le tard ». Il s’est créé un compte MySpace et y a téléversé quelques-unes de ses compositions pour tâter le terrain. Outre les commentaires positifs qu’il a reçus, Vaughan a également reçu des offres de personnes qui lui proposaient de placer ses chansons en lui disant qu’il pourrait faire de l’argent. « Je me suis dit “Oh ! Expliquez-moi comment ça fonctionne !” », se souvient-il. « J’ai commencé à bâtir un réseau de personnes qui m’ont appris comment ça fonctionne. Dès l’instant où j’ai compris que je pouvais transformer mon talent en métier, j’ai laissé tomber tout le reste. Je me suis investi à 100 %. Il m’a simplement fallu un moment pour réaliser que je pouvais le faire. »

Il a passé les cinq années suivantes dans son sous-sol de Surrey à peaufiner son art tout en travaillant sur de nombreux projets. « J’ai eu quelques petits succès dance ici et là avant de connaître le véritable succès. N’empêche, à l’époque, la moindre parcelle de succès me paraissait comme une réussite monumentale », avoue-t-il. « Je n’avais pas réussi grand-chose jusque là, quelques petits succès par-ce, par-là, une chanson qui était lancée en Italie, par exemple, et je prenais un nouvel élan à partir de ça. »

« Là où ç’a vraiment cliqué, c’est avec Steve [Smith] et Anthony [Anderson] de SA Trackworks, une équipe de création et de production de Vancouver », poursuit Vaughan. « En 2009, ils ont fait appel à moi pour la création d’une chanson intitulée “Take Your Hands” pour un groupe japonais appelé Tohoshinki. Notre chanson a été sélectionnée et s’est écoulée à quelque chose comme 350 000 exemplaires. Je n’en revenais pas ! Mon premier chèque de redevances était de quelque chose comme 8000 $, ou dans ces eaux-là. Et la première fois que j’ai touché 70 $, je n’en croyais pas mes yeux. Je me suis dit, si tu peux faire 70 $, tu peux aussi faire, 700 $, et ainsi de suite. C’était beaucoup de travail et de manière graduelle, je refusais de me contenter du niveau où j’étais, je voulais m’améliorer constamment. »

Mais malgré son appétit pour le succès, il a fait preuve de patience et a éventuellement été mis sous contrat par Patrick Moxey chez Ultra Music Publishing. « Je crois que j’attendais la bonne offre », confie Jenson Vaughan. « Peu de temps après, on m’a demandé de créer une chanson pour Benny Benassi et j’en ai écrit une autre qui a fini par être vendue à Madonna. C’est également Patrick qui m’a présenté à l’équipe d’Armand van Buuren… Tout ça m’a permis d’évoluer sur tous les fronts. »

« Girl Gone Wild », le numéro 1 aux États-Unis et à travers le monde, le DJ et producteur italien Benny Benassi avait fait parvenir la chanson à Vaughan par le biais de Moxey. « J’ai ajouté les paroles et la mélodie, je leur ai retournée, et ils l’ont adorée », se souvient Vaughan. « Puis, deux semaines plus tard, Patrick m’a laissé un message qui disait “M aime la chanson”. Je me suis dit, “mais de quoi il parle ?” Et là, je me suis dit, “attends, il ne peut pas sérieusement être en train de parler de Madonna.” C’est comme ça que je l’ai appris. »

Depuis, Vaughan a contribué son talent à des chansons pour DJ Antoine (« Bella Vita », un succès sur les palmarès suisses) ; Steve Aoki (« Delirious [Boneless] »); Era Istrefi (“BonBon”); Omi (“Hula Hoop”); Kelly Rowland (“What A Feeling”); Britney Spears (“Til It’s Gone”); et, tout récemment, le nouveau simple de High Valley, « I Be U Be », en plus du simple qui marquera le retour de Taio Cruz, « Signs ». Selon Vaughan, ses co-créations ont cumulé des ventes globales d’environ 10 millions d’exemplaires à ce jour.

Jenson Vaughan l’auteur affirme qu’il crée le plus souvent au piano. « J’écris paroles et musiques », dit-il. « Je fais également les arrangements. Il est toutefois assez rare que je réalise entièrement une chanson. J’écris souvent au piano, quelques fois à la guitare. Avant, j’écrivais plus à la guitare, même si je ne suis pas un très bon guitariste. J’entends une mélodie ou un arrangement dans ma tête et je l’écris comme je l’entends. »

Vaughan explique qu’habituellement, un producteur va lui faire parvenir l’instrumentation, ou alors il va commencer la création en solo. « J’écris la mélodie ou les paroles à partir de ce que le producteur m’envoie », explique-t-il. « Ou encore je vais créer la chanson moi-même, l’envoyer à différents producteurs, choisir la version qui me plaît le plus et ensuite l’offrir à différentes maisons de disques. » À mesure que sa réputation grandit, Vaughan est de plus en plus en position de collaborer directement avec l’interprète ou son équipe de production afin d’élaborer les arrangements et l’enregistrement. « Je suis agréablement surpris de la tournure des choses », avoue l’artiste.