L’agence de Krista Simoneau joue un rôle majeur dans l’industrie de la musique depuis dix ans. Portrait d’une femme influente qui a appris à dire non.

Les Yeux Boussoles, c’est le nom de la boîte de gérance, production de spectacle et agence d’artistes que s’est donné la Lavalloise d’origine en 2012. Krista Simoneau n’est pas alors débarquée comme une novice dans le milieu : études en musique au CÉGEP Saint-Laurent (où elle fait la connaissance de Louis-Jean Cormier, François Lafontaine, etc.), option guitare basse- « je ne joue plus du tout », précise-t-elle.

Krista Simoneau

De gauche à droite : Louis-Jean Cormier, François Lafontaine, Krista Simoneau. Photo: Le Caron

Puis elle s’est perfectionnée en sonorisation au CÉGEP de Drummondville, a fait beaucoup de technique de scène, patché des stages comme elle dit, entre autres au Festival international de Jazz de Montréal et aux Francos de Montréal, en plus d’avoir été technicienne électrique et aux éclairages à la Salle Pauline-Julien de Sainte-Geneviève sur l’ile de Montréal.

« Je viens de cet univers-là. Et j’ai longtemps travaillé chez Spectra, de 2005 à 2011 à la production de spectacles. Agent de spectacle, ce n’est pas un métier qui s’apprend à l’école. Elle utilise le mot vendeuse pour décrire son travail. Le téléphone sonnait tellement chez Spectra, tu as tous les diffuseurs au bout du fil, c’est souvent l’occasion de pousser tes projets (artistes) émergents. C’est plus facile », explique-t-elle.

« Quand je suis revenue de mon congé de maternité (elle a deux enfants de 11 et 15 ans avec le musicien Louis-Jean Cormier), Catherine Simard prenait la tête de l’agence. Une année ensemble et puis Simoneau décide de partir la sienne. J’avais besoin de défis et de me définir comme être humain ».

Krista Simoneau, à 43 ans, est devenue, dans la discrétion, la rigueur et l’humilité, une joueuse avec qui il faut compter. Gérante et conseillère de Louis-Jean Cormier qui continue de marcher sur des hauts sommets avec ses incandescents albums solos, sa vie avec Karkwa, ses apparitions télé comme coach à La Voix ou professeur de création à Star Académie, elle perfectionne ses compétences.

« L’une des choses dont je suis le plus fière, c’est la plate-forme numérique qu’on a développée avec Louis-Jean : Le 360. Il y a du contenu exclusif, des entretiens, des cours de guitare, des vidéos avec de nouveaux artistes et collaborateurs, c’est un projet d’envergure parce que faire du numérique et de la vidéo, ça coûte cher et ça prend beaucoup de temps dans le calendrier. C’est d’ailleurs à son studio (Dandurand) où sont tournées les capsules. On veut mettre en évidence tous ses talents ».

Le couple s’est séparé il y a six ans. Une vraie épreuve considérant le lien d’affaires qui les unissent. Le test ultime de résilience. L’affaire avait été ébruitée, sur des motifs personnels, le musicien avait mis un hiatus à sa carrière. « Peu importe, j’aurais continué à faire ce que je fais, parce je m’occupe aussi d’autres artistes », d’expliquer la skieuse et joggeuse dans ses loisirs

Krista Simoneau

De gauche à droite : Krista Simoneau, Brigitte Poupart (de dos), Martin Léon, Louis-Jean Cormier. Photo: Joséphine Trottier-Rivard

Salomé Leclerc, Lou-Adriane Cassidy, la chanteuse country Cindy Bédard, Ariane Moffat, Galaxie, Martin Léon et un nouveau groupe dont elle ne veut dévoiler l’identité font partie du giron de Krista Simoneau et ses deux vaillantes employées.

« Tu ne peux pas représenter qu’un seul artiste, tu ne sais jamais quand il/elle va partir, quand les conflits vont arriver. Travailler avec quelqu’un avec qui tu es en couple, c’est aussi difficile. On a traversé l’épreuve ensemble parce qu’on est capable de se parler et de défaire les nœuds et des fois c’est vraiment tough. La communication était un peu plus abrasive les deux premières années (rires) mais ça fait six ans qu’on est séparé et ça va vraiment bien. Les périodes de crise sont derrière nous. On est davantage dans nos projets professionnels futurs que dans nos querelles. On s’apprécie énormément. Il est vraiment facile à travailler, c’est pas un gars compliqué ».

La chose qu’elle aime le plus ? « Représenter des artistes avec qui je travaille, que j’adore sans être une groupie. Les vendre aux diffuseurs pour les faire découvrir, je pense que je suis bonne, j’arrive à placer des pions. Les stratégies à long terme aussi : où est-ce qu’on se voit dans un, deux ans ? »

Se projeter dans le futur. « L’opération promo et lancement qui commence un an avant la sortie de l’album et qui culmine avec la tournée, ça dure trois ans. Où voit-elle Lou-Adriane Cassidy, 24 ans, grande amie d’Ariane Roy, dans un avenir proche ?

« Elle marquera sa génération comme Louis-Jean a marqué la sienne. Cette fille-là est capable d’avoir le même rayonnement. Elle sait tellement où elle s’en va, elle a un côté très rock, très sensuel, très assumé, tout comme Salomé, je pense qu’elle sera un modèle pour la génération de ma fille, je la vois remplir des MTelus dans trois ans ».

« Ma stratégie est la suivante : le bon artiste à la bonne place au bon moment. Des fois, on peut décider de faire des festivals plus marginaux que de jouer aux Francos de Montréal. Attendre le bon moment, c’est parfois difficile pour les artistes. Et quand il y a un engouement, la chose la plus dure c’est de dire non à certains projets. Parce qu’au début tu dis oui à tout et t’embarques dans tout. Des fois, c’est plus sage de dire : heille, on passe notre tour, cette occasion-là va revenir ».