Ça n’aura pas été facile.

Les artistes de studio d’enregistrement, les musiciens, les interprètes et les auteurs-compositeurs n’avaient pas vu venir la suspension soudaine des spectacles en direct. Pour dire la vérité, nous avons encore du mal à nous adapter.

Malgré l’incertitude qui règne face à l’avenir, plusieurs essaient de profiter le mieux possible de cette période de temps libres que personne n’avait prévue – et de continuer de créer dans des conditions qui sont loin d’être idéales.

 

Maintes fois récompensé aux galas des prix Grammy pour la musique latine et des prix JUNO, Alex Cuba fait ce qu’il faut pour rester à flot.

« Il y a des hauts et des bas », concède-t-il depuis chez lui à Smithers, en C.-B.  « Il y a des bons jours et des mauvais jours. Quand je suis d’attaque, je continue de faire mon métier, j’écris des chansons, je m’enregistre. Je produis une musique positive et réconfortante, et c’est une chose dont on a besoin plus que jamais à l’heure actuelle. »

Mais Cuba, dont le dernier simple, « Concéntrica Canción », sort le 12 juin, admet que la pandémie a éveillé chez lui des sentiments qui l’ont surpris.

« Cette période me donne le goût de me montrer plus ouvert et plus vulnérable que jamais face à ma musique », explique-t-il. « J’ai horreur de quitter mon public sur une vibe triste : j’arrive à voir le bon côté des choses dans tout ce que je fais. Aujourd’hui, avec la quarantaine, j’éprouve un regain de créativité, peut-être à cause de ces longues vacances de luxe qui nous sont offertes », conclut-il en éclatant de rire.

 

L’artiste de la côte Est Rose Cousins, de son côté, n’avait présenté que deux spectacles de la tournée de promotion de son album Bravado quand le gouvernement a subitement fermé les salles. « Il m’a fallu deux mois pour me réorienter », raconte-t-elle, bien que la transition entre la scène et l’écriture ait été moins difficile pour elle grâce à la tradition qu’elle observe normalement en juin.

« D’ordinaire, à ce temps-ci de l’année, je me retrouve avec des amis bostonnais dans un atelier d’écriture qui se tient dans une île du New Hampshire », explique-t-elle. C’est la première fois en dix ans que ça n’a pas lieu. J’ai également collaboré à l’écriture de six chansons sur Zoom pour ne pas perdre la forme. Pour moi, le mois de juin est le temps des fleurs. »

Comme Cuba, Cousins s’acclimate au jour le jour à la réalité actuelle.

« C’est une adaptation continue », reconnaît-elle. « J’aimerais avoir une idée précise de mon attitude face à ce qui se passe actuellement et pouvoir comprendre ce que tout cela veut dire. C’est pas comme si la pandémie était terminée et que je pouvais maintenant en faire des chansons. Mon lien avec moi-même n’est plus pareil. Je passe beaucoup de temps seule avec moi-même, et c’est ce qui m’a permis de composer une bonne partie de mon dernier album, mais ça ne veut pas dire que je me sens complètement à l’aise dans ma solitude actuelle parce que ce n’est pas moi qui l’ai choisie. »

 

Rejoint à Los Angeles, Robert Alfons, du TR/ST, ne semble pas regretter que son isolement l’ait empêché d’entreprendre la tournée de promotion de Destroyer Part II, le dernier album du groupe. « Ça me laisse beaucoup plus de temps pour élaborer des idées, et j’arrive mieux à me concentrer quand j’ai moins de choses à faire en dehors de ma cour », confesse-t-il.

Ses collaborations le tiennent occupé, et il compte lancer divers projets durant cette transition forcée. « Je préfère les albums, mais les œuvres de plus longue haleine et les collaborations m’intéressent également », précise-t-il. « J’ai beaucoup de trucs à lancer. Mais c’est sûr que ça ne sera pas un album. »

Alfons s’adapte bien à la simplicité de son quotidien. « Quand on me dit de rester chez moi et de créer des choses parce qu’il est hors de question qu’on parte en tournée, il y a là quelque chose de positif et de productif pour moi. »

 

 

Nate Hilts, de Dead South, raconte qu’il a adopté une attitude attentiste quand la pandémie a éclaté. « Sur le coup, je suis entré en état de choc », avoue-t-il. « Pour être honnête, j’ai laissé ma guitare de côté parce que je ne comprenais pas ce qui nous arrivait. Mais nous avons discuté avec notre gérance de ce que nous pouvions faire comme groupe, et nous avons filmé quelques vidéoclips en isolement. »

Hilts explique que, en ce moment, il a autre chose en tête que la créativité. « On avait prévu de passer 2020 en tournée et de prendre congé durant l’hiver pour entreprendre la composition d’un nouvel album », raconte-t-il.

Au lieu de ça, Hilts tâche de reprendre son souffle. « Je ne vous mentirai pas, ça fait des années que je suis incapable de passer un petit bout de temps à rien faire à la maison », confie-t-il. « On a un rythme de deux mois de travail suivis de quelques jours de relâche depuis des années. Ça finit par épuiser un gars. Tu ne te rends même pas compte de ta fatigue. J’ai commencé à prendre de saines habitudes de vie et repris contact avec ma famille et mes amis, et j’en profite pour m’améliorer.

« J’en connais plusieurs qui font la même chose ces temps-ci. »