« Jeune, je savais que je voulais devenir compositrice », assure Stéphanie Hamelin Tomala. « À l’âge de 10 ans, j’ai composé ma première pièce – avec l’aide de mon professeur, qui m’a aidé à écrire la partition. Puis, à l’âge de 13 ans, j’ai vu Le Seigneur des Anneaux. La musique de Howard Shore ! C’est là que j’ai voulu devenir compositrice de musiques de film ». Quelques années plus tard, elle a atteint son objectif : nommée dans la catégorie Prix de la relève au récent gala Gémeaux, la carrière de Stéphanie a pris son envol.

Stéphanie Hamelin TomalaUne passion commune, pour la musique et pour l’image. « J’ai un penchant très fort pour la science-fiction », dit Stéphanie Hamelin Tomala, qui s’est distinguée en signant la bande sonore du court-métrage Area 51 (Lee Gallagher, 2018), lui ayant mérité un premier prix de la Fondation SOCAN dans la catégorie Meilleure musique originale—Animation.

« J’ai vraiment apprécié ce projet, puisqu’il mélange la science-fiction et l’animation, un des médiums les plus difficiles à mettre en musique. En animation, il y a beaucoup de changements rapides de registres d’émotions, or il faut composer une musique qui suive ces changements. C’est exigeant, c’est un défi, et c’est ce que j’aime. »

Stéphanie Hamelin Tomala dit avoir planifié sa formation académique en fonction de son objectif de devenir compositrice de musique à l’image. À la base violoniste, elle s’est mise au piano dès le secondaire « parce qu’un professeur m’avait dit que si je voulais devenir compositrice, je devais apprendre le piano. Lorsqu’un prof me donnait un conseil, je le prenais ! », dit la musicienne, ajoutant que le piano est comme « un petit orchestre, grâce auquel je peux imaginer déjà comment arranger une pièce pour un orchestre. »

Titulaire d’une maîtrise en composition de l’Université de Montréal, elle a ensuite décroché un diplôme d’études supérieures spécialisé en musiques de film à l’UQAM, puis poursuivi sa formation à Lyon, en France. « Des programmes pour apprendre à composer de la musique à l’image, à Montréal, y’en n’a pas tant que ça – en tous cas, au moment où j’ai fait mes études. Ainsi, j’ai dû aller chercher toute la formation possible un peu partout » avant de se lancer dans le métier. Depuis, elle a signé la musique d’une soixantaine de courts-métrages, en plus de longs métrages et de productions télévisuelles. « J’aime vraiment beaucoup le travail interdisciplinaire, en autant qu’il y ait une histoire derrière le projet qui puisse m’inspirer ».

Ainsi, la compositrice affirme être dans son élément lorsqu’elle compose avec les contraintes inhérentes à la vision d’un ou d’une réalisatrice. « Les réalisateurs et réalisatrices avec qui je travaille me guident dans mon travail, parfois avec des références musicales précises, parfois pas du tout, ce qui me laisse carte blanche. Or, je préfère lorsqu’on m’envoie des musiques de références – mais pas déjà plaquées sur les images d’une scène, parce qu’il arrive que certains réals espère une musique très similaire à la référence. Je préfère encore qu’ils m’envoient plutôt une ou deux pièces musicales dans le style qu’ils recherchent. À partir de ça, je questionne : pourquoi ce son ou ce style? Qu’est-ce qu’ils aiment là-dedans? De là je cherche l’inspiration pour créer ma propre vision… de leur vision à eux! »

Elle cite l’influence de John Williams, « un des premiers modèles vers lequel tu te tournes dans le milieu », du compositeur italien Dario Marianelli, collaborateur fidèle du réalisateur Joe Wright (sa musique du film Atonement lui a valu un Oscar) et du regretté compositeur islandais Jóhann Jóhannsson, qui a signé les musiques de trois films de Denis Villeneuve, Sicario, Arrival et Blade Runner 2049. « C’est dans sa manière de mélanger les musiques texturales et les mélodies, il a amené une manière différente d’écrire la musique », commente la compositrice.

Les femmes sont encore sous-représentées dans le domaine, mais Stéphanie tient à souligner la contribution de la grande Rachel Portman (« Elle utilise beaucoup les cordes dans sa musique, ce que j’aime beaucoup – je suis aussi violoniste, il y a un lien! ») et, plus récente celle-là, de l’Islandaise Hildur Guðnadóttir, « qui fut l’assistante de Jóhann Jóhannsson. »

« Il faut plus de femmes dans ce milieu, notamment au Québec, reconnaît Stéphanie. Personnellement, j’en connais pourtant une quarantaine qui le font déjà ou qui expriment le désir de poursuivre dans cette direction. Seulement, c’est difficile pour elles de ressortir du lot. C’est quelque chose que j’ai à cœur, donner une place aux compositrices. »