Chuck & Albert, anciens membres du groupe Barachois (1994-2003), ont beau porter le même nom (Arsenault) et avoir des mères homonymes (Gallant – la mère de Chuck est originaire du même village que Lennie Gallant), ils ne sont pas proches parents mais plutôt frères dans la créativité, l’humour et la joie de vivre.

L’aîné, Albert, 46 ans, est originaire d’un village francophone de l’Île-du-Prince-Édouard, St-Chrysostome, et vit à Mont-Carmel juste à côté. Charles, dit Chuck, 42 ans, est venu au monde dans la ville anglophone de Montague et malgré un père enseignant de français, a vécu son enfance surtout en anglais, les écoles françaises étant inexistantes dans la région. Toutefois, les enfants de la famille sont bilingues et une grande fierté de ses origines acadiennes ressort de tous ses propos et dans son œuvre musicale. Peu importe s’il participent à un festival en Angleterre, en France, en Colombie-Britannique ou ailleurs, Chuck & Albert ne chantent qu’en français.

Le premier album du duo s’intitule Énergie, et énergie il y a, ça s’entend même au bout du fil, à « une heure de plus dans les Maritimes »! Élevés dans l’ambiance des partys de cuisine et de la musique traditionnelle acadienne – surtout Albert, dont le père Eddy est violoneux -, les deux Arsenault se sont rencontrés en 1993, lorsque Chuck, qui détient un baccalauréat en musique de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard (son instrument : le cor français) et en enseignement, vient remplacer un prof dans le charmant Abrams-Village, situé au cœur de la région Évangéline où vit Albert. Chuck mène quelques temps parallèlement sa carrière d’enseignant et d’artiste (dans Barachois) et mentionne avoir eu le privilège d’enseigner en immersion française en Louisiane dans les années 90. Toujours cette préoccupation de la langue et des racines communes aux différents peuples acadiens.

Après la fin de l’aventure Barachois, les deux complices décident de poursuivre leur carrière en duo. Comment se passent leurs sessions d’écriture? Chuck explique : « La première chose qui nous guide dans notre composition, c’est le spectacle. Depuis toujours, le spectacle est primordial pour nous, surtout qu’aujourd’hui les artistes vivent beaucoup de la scène. On va d’abord chercher dans l’immense répertoire traditionnel acadien, puis on remplit avec des compositions originales ce qu’on estime être les manques pour nos spectacles. Si on voit qu’on n’a pas exploité certains instruments, on compose avec eux.

« Par exemple, pour le deuxième titre de notre album, “Danse le caoutchouc”, on trouvait que l’harmonica allait bien avec la guimbarde et on voulait avoir une chanson avec ces deux instruments. On a jammé ensemble pour développer la mélodie puis on s’est inspirés des expressions locales pour écrire les paroles. Pour “Chavire-toi-pas”, on a commencé avec une toune de violon du frère d’Albert, Peter, et pour trouver les mots, on a travaillé dur. La musique est rapide, on a au beaucoup de misère pour trouver des mots qui racontent une histoire tout en suivant la mélodie. C’était un beau défi! Puis on a rajouté une troisième partie à la musique de Peter, en faisant appel à la tradition locale du tounage (turlute), qui ressemble au son du violon et utilise des syllabes de la langue acadienne. »

Toutes les œuvres ne sont pas écrites ensemble, « il y a des exceptions, parfois on écrit ça seul, mais on améliore la toune avec l’autre, » poursuit Chuck. Le duo veut témoigner de la place qu’occupe la musique dans le cœur de tout Acadien. « Le monde veut juste grouiller, ajoute Albert. Jusque dans les années 70, les traditions de partys de cuisine et soirées de musique se maintenaient, mais c’était plus de la chanson française traditionnelle. Aujourd’hui, si quelqu’un ne chante pas, il joue du violon. Ça double tes chances d’être invité au party! »

La situation d’Albert (violon, percussion, basse), père de deux enfants, commande que leurs tournées soient d’une durée de deux semaines chacune au maximum. « On arrive à vivre avec notre musique, mais on doit faire de la route. L’hiver est notre saison la plus occupée, mais on tourne aussi l’été, des petits circuits de 10-12 villes. » Chuck se charge de faire l’agent de tournées au Canada et à l’étranger, et le duo s’est baladé des Nuits acadiennes à Paris au festival Les virées francophones, près de Cherbourg, en passant par tous les grands festivals folk au Canada. Cet été on les verra entre autres au Winnipeg Folk Festival, au Dawson City Music Folk Festival, au Yukon, au Harrison Festival en Colombie-Britannique, aux Fêtes de la NouvelleFrance à Québec, pour ne nommer que ceux-là.

Grâce à leur bonne humeur et à leurs rythmes entraînants, à leurs instruments traditionnels et improvisés (podorythmie, os rythmiques, valises), à leurs chansons participatives, leur sens du comique et de l’improvisation et leur personnalité charismatique, Chuck & Albert ont séduit non seulement le public de l’Atlantique, mais également les festivaliers de la scène internationale, sans compter l’industrie musicale qui leur a décerné trois nominations de l’Association de la musique de la Côte Est (ECMA) en 2011 pour l’Artiste de l’année – choix du public, l’Enregistrement francophone de l’année et l’Enregistrement folklore / traditionnel de l’année – groupe.