L’un des éditeurs de musique les plus influents du Canada, journaliste et cofondateur de la Canadian Music Week est mort le 19 décembre à la suite d’une brève maladie.
David Farrell avait 73 ans.
Né à Ladysmith, en Colombie-Britannique, Farrell est un infatigable défenseur des musiciens canadiens et de l’industrie de la musique qui s’est construite autour d’eux. Il a fait ses premiers pas dans cette industrie alors qu’il étudiait le journalisme au Centennial College de 1967 à 1969.
L’une de ses premières affectations régulières a été de couvrir le divertissement pour la section « After Four » du Toronto Telegram et il a également contribué à The Eyeoepener, Beetle Magazine, Maclean’s, TV Guide, The Toronto Sun, Nite Out, entre autres.
En 1975, Farrell est engagé par l’impresario Joey Cee comme rédacteur en chef de Record Week. Un an plus tard, il devient l’éditeur canadien du magazine américain Cashbox et du magazine texan Performance avant d’occuper le même poste à Billboard où il couvre la scène musicale et l’industrie canadienne de la musique jusqu’en 1981.
C’est à ce moment qu’a commencé ce qui deviendra son véritable héritage : le 13 juillet 1981, David et sa femme Patricia-Dunn Farrell ont publié le premier numéro de The Record, composé de 10 pages agrafées, dactylographiées recto verso. Avec David à la barre en tant qu’éditeur et rédacteur en chef, la publication musicale hebdomadaire est devenue une référence dans l’industrie avec ses palmarès au classement précis et couvrant une grande variété de styles. Les chiffres de ventes et les positions au classement étaient déterminés par des recherches hebdomadaires auprès des radios et des points de vente au détail.
Les palmarès radio et de ventes de The Record pour les simples et les albums sont devenus une référence mondiale qui reflétait le plus fidèlement le marché canadien de la musique en temps réel. Ils étaient repris et cités par des autorités de l’industrie de la musique et de l’information telles que Billboard, MuchMusic, la CBC, Broadcast News et The Canadian Press. The Record est devenu le chroniqueur de choix à l’ère des vidéoclips et de l’explosion en popularité du disque compact.
Mais la radio et le commerce de détail n’étaient pas les seuls domaines couverts par The Record : l’édition musicale, le droit d’exécution, la fabrication, les talents, la promotion de concerts, les agences artistiques, l’innovation technique, les embauches des maisons de disques et tous les autres sujets pertinents à l’industrie ont trouvé leur place dans le magazine professionnel. Si l’information était digne d’intérêt, elle y avait sa place et The Record unifiait du même coup une industrie disparate.
En 1984, les Farrell et leurs collègues sont allés plus loin en organisant à l’hôtel Harbour Castle Hilton de Toronto la première édition de la Record Conference dont l’intention était d’unifier et d’éduquer l’industrie de la musique. Cet événement était le précurseur de la Canadian Music Week et David a volontiers cédé la direction à Neill Dixon qui l’a dirigé jusqu’en 2023.
Farrell et son équipe ont également lancé les Record Awards en 1985 pour récompenser les personnalités méritantes de l’industrie et, en 1991, il a publié Contact : The Essential Canadian Music Business Directory. Les journalistes légendaires Ritchie Yorke, Larry Leblanc, Richard Flohil, Tom Harrison, Karen Bliss, et Anya Wilson, et les experts de l’industrie Daniel Caudeiron, Vince Degiorgio, Steve McLean et d’autres ont contribué aux 20 ans d’existence de The Record.
Quand The Record a cessé ses activités en 2001 en raison de la récession économique, David Farrell a passé les sept années suivantes en Nouvelle-Écosse avant de revenir à Toronto en 2008 pour lancer la publication commerciale en ligne FYIMusicNews, avec le soutien économique de Gary Slaight.
Publié cinq fois par semaine jusqu’à il y a quelques années et employant des rédacteurs tels que son bras droit Kerry Doole, ainsi que le chroniqueur Bill King et les pigistes Karen Bliss, Dave Charles, Jason Schneider, Doug Thompson, Cameron Carpenter et l’auteur de cet article, ces relations se sont poursuivies jusqu’en 2023, lorsque Billboard Canada a acheté FYI et que Farrell et Doole ont poursuivi leurs carrières en tant qu’éditeurs et contributeurs.
Amical, charmant, bien informé, serviable et apprécié par l’industrie, David Farrell a été reconnu à deux reprises pour ses réalisations. La première fois avec son intronisation au Canadian Music Industry Hall of Fame en 2018 et, à l’été 2024, par un prix pour l’ensemble de sa carrière lors du dîner de remise des prix Radiodays North America de la CMW.
Son œil aiguisé et ses observations précises étaient dictés par une philosophie simple, comme il l’a expliqué au rédacteur Perry Stern dans un portrait publié dans Paroles & Musique en 2022.
Les nouvelles sont les nouvelles », a déclaré David Farrell au journaliste avant d’ajouter qu’il choisit ses sujets en fonction de comment ça affecte les gens, ce que veut dire la nouvelle. »
« L’argent est toujours un sujet intéressant et, dans mon cas particulier, ça recouvre un tas de choses parce que mes articles ne portent pas uniquement sur l’industrie de l’édition, mais sur les spectacles en direct, l’industrie de l’enregistrement et le rôle des artistes eux-mêmes au sein de l’industrie. Ça ratisse large. »
À l’annonce de sa mort, les hommages ont afflué de la part de ses amis et admirateurs.
Voici ce qu’on pouvait lire sur Billboard Canada :
Gary Slaight : « David était quelqu’un de bien. On a non seulement été amis pendant plus de 50 ans, mais notre amour de la musique et, plus important encore, de la défense des artistes canadiens et de notre industrie, est ce qui nous a unis. En fait, avant la Canadian Music Week, il y a eu la Record Conference, une idée qui a germé au cours d’un long lunch que David et moi avons partagé au Spotted Dick! On a bien ri et on a aussi eu des conversations houleuses, mais mon respect pour lui ne s’est jamais démenti. Il va me manquer. »
Derrick Ross, président de Slaight Music : « Le Canadian Music Industry Hall of Fame—cette reconnaissance était tellement méritée pour tout ce qu’il a fait pour promouvoir la musique canadienne. David était un homme doux et gentil qui aimait ce qu’il faisait et qui était toujours fidèle à lui-même. »
Mary Ann Farrell, sœur de David : « J’ai travaillé pour The Record à ses débuts, au milieu des années 80. C’était une période excitante avec de nouvelles maisons de disques qui nous proposaient des talents musicaux fantastiques. On avait tous une chose en commun, le désir de découvrir et de partager de nouvelles influences musicales pleines d’originalité afin de donner envie aux radios, aux disquaires, aux magazines, aux clubs et aux salles de spectacles du pays de tendre l’oreille. »
« La porte de David était toujours ouverte et il y avait constamment des promoteurs, des artistes, des agents, des relationnistes, des auteurs qui venaient le rencontrer pour lui parler de nouvelles façons créatives de lancer un artiste, une chanson, un spectacle, une nouvelle façon d’écouter, de jouer, d’être observateur; tous ces gens étaient connectés. »
Kerry Doole : « Ses valeurs et son approche provenaient de la presse écrite “old school”, une forme malheureusement en voie de disparition de nos jours. Il n’a jamais eu peur de s’attaquer à l’ordre établi, d’exprimer des opinions impopulaires ou de défendre les laissés pour compte, et sa passion pour une industrie qu’il voulait voir réussir ne s’est jamais démentie. »
Richard Flohil : « David Farrell était mon ami, mon éditeur et une référence. Plus important encore, il était un ami et une référence pour l’ensemble de l’industrie musicale au Canada. En tant qu’homme, il pouvait faire des bêtises et même être lourd, des fois, et il n’était pas à l’abri d’indiscrétions verbales, à l’occasion, mais en tant que journaliste, il était immanquablement précis, réfléchi et aimable. Il s’appuyait sur des faits et ne se laissait jamais aller aux commérages. Tout le monde dans l’industrie avait confiance en son travail ».
Sur Facebook :
Fergus Hambleton : « Une personne merveilleuse, un auteur merveilleux et un ami merveilleux »
David Farrell laisse dans le deuil ses fils D’Arcy, Brendan et Lewis, ses sœurs Mary Ann et Siobhan, son frère Dominic et la compagne de ce dernier, Suzanne, l’ancienne compagne de David, Patricia Dunn, et sa compagne actuelle, Joan Ralph.
Une célébration de sa vie aura lieu à Toronto au printemps 2025. Les détails seront annoncés à une date ultérieure.
Les derniers mots de cet article appartiennent à David lui-même, tels qu’ils ont été transmis par sa famille :
« J’ai menti. Il n’y a pas de buffet gratuit au Zanzibar. Rien de gratuit, mais, mes amis, ce fut une sacrée aventure! Merci à tous pour les souvenirs. Une dernière demande : posez un acte de gentillesse pour quelqu’un que vous ne connaissez pas! »
« Votre meilleur ami. DF
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