Leith Ross (iel), qui est originaire d’Ottawa et vit désormais à Winnipeg, est devenu une sensation à la vitesse d’Internet grâce à ses simples « Orlando » et – surtout – « We’ll Never Have Sex » qui ont explosé sur TikTok. Cette dernière a cumulé plus de 37 millions d’écoutes sur Spotify et un million de visionnements vidéo, sans compter d’innombrables reprises et vidéos sur TikTok par ses fans.

En 2022 uniquement, Ross a donné des spectacles à guichets fermés dans toute l’Amérique du Nord et plus d’assurer les premières parties des tournées européennes de Lord Huron, Andy Shauf et Helena Deland. Ross a reçu la toute première édition du John Prine Songwriter Fellowship du Newport Folk Festival et le magazine NME a dit qu’iel est l’auteurice-compositeurice préféréx de la génération Z en plus de signer un contrat mondial avec Interscope/Republic Records. Son succès a été remarquablement rapide, tout comme son processus de création.

« Je n’écris jamais de chansons sur une longue période », affirme Ross. « Je ressens une émotion à propos de quelque chose et ensuite j’ai le “feeling” que ça pourrait faire une bonne chanson. À partir de là, écrire cette chanson est la seule chose à laquelle je peux penser pendant une heure ou deux. C’est super intense et envahissant, et après c’est derrière moi. »

En revanche, le processus d’enregistrement du premier album de Ross, To Learn, paru en 2023, a été délibérément lent, l’artiste ayant pu profiter de l’espace et de la sécurité émotionnelle nécessaires à l’enregistrement de sa musique sensible et authentique. Iel l’a enregistré avec Joey Landreth (des Bros. Landreth), un musicien dont iel admire le talent depuis longtemps. Leur amitié – et le fait que Ross habite tout près du studio – a permis de créer un processus d’enregistrement « chill » et « spontané ».

« C’est très agréable de pouvoir prendre le temps de réfléchir et prendre les bonnes décisions quand t’enregistres de la musique pleine de vulnérabilité », explique Ross. Des fois, quand j’écrivais une chanson vraiment vulnérable… au lieu de passer la moitié de la journée à l’enregistrer, on pleurait, on parlait, et vivait ce qu’on avait à vivre par rapport à ça ; c’était merveilleux de pouvoir faire ça. Ç’a complètement changé ma façon de voir l’enregistrement d’une chanson. »

Leith Ross, Video, We'll Never Have Sex

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Cette vulnérabilité est la marque de commerce de plusieurs de leurs chansons, en particulier « We’ll Never Have Sex », une chanson qui a profondément touché le public de Ross qui se reconnaît dans ses textes très personnels et universels à la fois. Iel y exprime des sentiments complexes à propos des relations amoureuses et de l’intimité sexuelle. Pour ses fans, la chanson évoque – selon l’interprétation qu’ils en font – l’expérience queer, l’asexualité et l’envie de pouvoir passer du bon temps en compagnie d’une autre personne sans s’attendre à avoir des relations sexuelles.

« Je me sentais vraiment isoléx par mes émotions quand j’ai écrit ça. J’avais l’impression que la gens à qui j’en parlais ne comprenaient pas vraiment ce que je disais. » La puissance – et la différence – de la réaction du public à cette chanson a surpris l’artiste qui avoue que cette réaction a été « follement thérapeutique ». « Tout le monde vit le fait d’être humain à sa façon, mais j’ai la chance de participer à faciliter une partie de cette expression », affirme Ross.

Le vidéoclip officiel de « We’ll Never Have Sex », que Ross a réalisé, produit et dans lequel iel est en vedette en compagnie de son ami·e·x Fontine et on les voit danser une ronde avec des moustaches dessinées sous le nez. Cette scène splendide évoque des images d’innocence et le lent tourbillon d’un manège. Ross affirme que la magie de la vidéo est le fruit des efforts communs de leurs ami·e·x·s qui ont participé au tournage. L’amitié et la communauté ont une importance vitale pour Ross, mais contrairement à la rapidité de son succès, trouver la sécurité au sein de cette famille et de ses proches a été un processus beaucoup plus lent.

À ses fans dont les vulnérabilités ne sont pas encore embrassées par une communauté qui les accepte, iel avoue que le processus peut être long et que c’est un processus qui nécessite « des essais et des erreurs, un but et une intention ». À quiconque se sent isolé, Ross a le conseil suivant : « Faites preuve de patience et de gentillesse. Si vous faites preuve de gentillesse et vous faites de véritables efforts pour soutenir la communauté dont vous souhaitez faire partie, ça va fonctionner. » Après avoir réfléchi pendant un moment, iel ajoute que même si c’est important de permettre à tout le monde de vivre sa propre humanité, il faut quand même garder certaines limites.

Une telle sagesse s’est gagnée à la dure tout au long de la vie de Ross. C’est comme si son âme lui parlait doucement et que ce monologue intérieur rendait la vie et la guérison des autres plus facile. C’est de cette façon que ses chansons tristes auxquelles tout le monde peut s’identifier réussissent à redonner espoir aux personnes qui sont prêtes à entendre son message.

 



Il est né, a grandi et habite encore Toronto, mais la carrière de Sean Fischer en tant qu’auteur-compositeur, musicien, compositeur, producteur et remixeur, mais c’est grâce à son approche globale que sa carrière est si florissante.

Sa popularité dans des marchés comme le Mexique et la Corée du Sud lui a permis de cumuler plus de 100 millions de diffusions en continu à ce jour. Il a coécrit et arrangé « Black Clouds », une chanson qui figure sur l’album 2 Baddies du groupe pop coréen NCT 127, chanson qui a atteint le sommet du palmarès de musique du monde Billboard et qui s’est écoulé à plus de 3,5 millions d’exemplaires. Sa chanson « Sr. Tigre », enregistrée pour son projet solo baptisé French Braids, est devenue virale au Mexique et cumule plus de 20 millions de diffusions en continu.

NCT 127, Black Clouds

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« Je vais là où il y a des étincelles. Il y en a beaucoup dans le monde de la K-pop et j’y ai plongé la tête première », raconte Fischer. « J’ai constaté qu’être là en personne contribue énormément à ton succès. J’arrive de passer 10 jours en studio en Corée où SM Entertainment, une importante maison de disques là-bas, m’a fait travailler sans relâche. Je suis toujours dans mes valises. »

Ce qui aide énormément la carrière de Fischer, également, c’est son talent pour les langues – il parle couramment l’anglais, le français et l’espagnol – et sa maîtrise du langage musical d’un grand nombre de genres. « Je dois sûrement être parmi les producteurs les plus diversifiés au Canada », croit-il. « Je peux travailler sur une ballade de Céline Dion aussi bien que sur un remix house tropical mexicain sous mon alias French Braids. C’est cette diversité qui me permet de garder ma fraîcheur créative. »

La chanson de Dion à laquelle il fait référence est la nouvelle chanson de la superstar, « Waiting on You », qui figure dans le film – dans lequel elle apparaît d’ailleurs – Love Again, et il va sans dire que c’est le genre de placement qui donne un immense coup de pouce à une carrière. « Cette chanson-là a vu le jour lors d’une séance d’écriture avec Liz Rodrigues il y a six ans », se souvient-il. « Pour Céline, il ont pris mon démo et l’ont recréé de A à Z avec un orchestre symphonique de 70 musiciens. Quand j’ai entendu ça, j’ai fondu en larmes, carrément. C’était la plus belle chose que j’avais jamais entendue! »

Fischer a une feuille de route impressionnante avec de nombreux autres artistes canadiens. Il est crédité comme auteur et producteur sur l’album certifié Or de Jazz Cartier, « Tempted », et on compte parmi ses autres réalisations récentes BANNERS, La Zarra, Banx & Ranx, Preston Pablo et Dragonette, sans compter celles avec des artistes internationaux comme Fitz and the Tantrums, A Boogie wit da Hoodie, Tim Atlas, Now United, la vedette K-pop star Taeyeon et Inna & Farina.

 Son parcours non conventionnel comprend des études en piano jazz avec le légendaire Hilario Duran puis au Humber College, des études semblables à l’Université McGill et à La Havane, à Cuba, et, à la fin de son adolescence, un passage dans un groupe rock de Toronto.

YoSoyMatt, French Braids, Sr. Tigre

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« On a signé un contrat avec Sony, mais au bout d’un an j’en ai eu ras le bol », raconte-t-il. « Après m’être démené pour jouer dans des clubs pour 75 $ par soir et m’engueuler avec les autres membres du groupe, j’ai décidé qu’il devait y avoir mieux. J’ai commencé à faire des stages avec des compositeurs à l’image comme studio The Hive. J’ai essentiellement leur orcé à me laisser “pitcher” des projets gratuitement, et j’ai décroché des chansons thèmes pour HGTV et CTV News, des compositions pour lesquelles je touche encore des redevances dix ans plus tard. C’était la première étape de ma véritable carrière de producteur. »

Fischer jongle avec deux identités créatives parallèles, l’une en tant qu’auteur-compositeur, producteur et remixeur à la pige et l’autre en tant que French Braids. Dans le premier cas, il a signé un contrat d’édition avec Honua Music, tandis que French Braids est sous contrat conjoint avec Sadboy Records et Armada Music.

« Ça peut devenir compliqué avec toutes ces ententes qui se recoupent », avoue-t-il. « Mes avocats me détestent parce que je dois constamment établir des exceptions dans mes contrats, mais je fais de mon mieux pour maintenir une frontière entre mes différentes images de marque. French Braids c’est de l’électronique pur, des remixes pour les pistes de danse. Mon profil Spotify correspondant a un vibe électronique très cohérente, tu ne trouveras aucun de mes morceaux pop là-dedans. »

Une collaboration avec l’artiste mexicain YoSoyMatt a permis à Fischer/French Braids de devenir une star dans ce pays. « Pendant la pandémie, je contactais des producteurs au hasard pour leur offrir de remixer leurs trucs gratuitement », se souvient le remixeur. « Je suis tombé sur YoSoyMatt et j’ai remixé sa pièce “Sr. Tigre” et c’est devenu viral avec près de 15 millions de “streams”. Ça m’a fait voyager au Mexique où j’ai été invité à jouer dans de gros festivals et les gens me reconnaissaient dans la rue. Grâce à cette magie mexicaine, ma page d’artiste compte près d’un million d’auditeurs par mois. »

Trois conseils pour les apprentis producteurs/auteurs-compositeurs professionnels

  • « Pensez à l’échelle mondiale. J’aime le Canada, la SOCAN et tous nos magnifiques systèmes, mais il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un marché minuscule à l’échelle planétaire. C’est tellement facile d’organiser une session Zoom en Australie ou en Corée. Ouvrez-vous à des marchés beaucoup plus gros que le vôtre. »
  • « N’oubliez pas qu’une séance d’écriture de chanson est un événement très personnel et social. Comportez-vous comme une personne avec qui les autres artistes dans la salle aimeraient aller prendre une bière. Ne pensez pas seulement aux affaires, ça va immédiatement déplaire à tout le monde. J’ai appris ça de mon éditeur qui est norvégien et on commence chaque séance par un café et une jasette à propose de la vie en général. »
  • « C’est plus facile à dire qu’à faire, mais soyez ultra familiers avec la chanson, sa structure, sa mélodie et ses paroles. Si, en tant que producteur, t’es pas capable de chanter plein de « hits » à la guitare autour d’un feu de camp, c’est que t’es pas mal limité dans tes capacités de producteur. À mon avis, les meilleurs producteurs sont – théoriquement – capables de tout faire seuls. »


Il y a tout juste plus de deux ans que les vétérans de l’industrie musicale Michael McCarty et Rodney Murphy (tous deux d’ex dirigeants de la SOCAN) ont fondé Kilometre Music Group (KMG), une société de création musicale et de gestion des droits basée à Toronto et soutenue par le Barometer Global Music Royalty Fund de Barometer Capital Management. L’idée de base était de rapatrier les droits d’auteur de la musique canadienne, mais en plus d’acheter des catalogues de chansons générant des revenus, KMG signe également de nouveaux auteurs-compositeurs.

« Les investisseurs sont très contents », affirme le chef de la direction de KMG, Michael McCarty. « Certains nous ont carrément dit qu’on était leur meilleur investissement de 2022 à cause de ce qui s’est produit dans le marché et l’économie en général. Les redevances musicales sont un des investissements les plus stables en période de tourmente économique. »

Rodney Murphy est le président des acquisitions A&R de KMG, et Melissa Cameron-Passley (une autre ex-employée de la SOCAN) est administratrice des opérations créatives, et tous deux s’occupent au quotidien des relations avec les créateurs. L’entreprise possède aujourd’hui dix catalogues, ce qui représente « entre la moitié et les deux tiers de ce que nous envisageons comme un porte-folio complet », explique McCarty. Il y a un peu moins d’un an, KMG lançait la phase de signature de nouveaux artistes de son plan.

« Le véritable message qu’on veut transmettre au monde, c’est que nous sommes une vraie maison d’édition », affirme encore McCarty. « On n’est pas juste une entreprise d’acquisition de catalogues. On est en train de bâtir notre écurie. Ç’a toujours été notre plan d’avoir une combinaison de catalogues emblématiques et de ce que nous appelons les catalogues du futur, c’est-à-dire des créateurs qui bâtissent les catalogues du futur, et ça se passe très bien. On a mis sept créateurs sous contrat jusqu’à maintenant et nous en ajouterons deux autres très bientôt ; on est exactement là où on espérait. »

En septembre 2022, KMG a trouvé totalement par hasard ce qui allait devenir son quartier général de rêve : une maison victorienne de trois étages située en face du Musée des beaux-arts de l’Ontario au centre-ville de Toronto. Celle-ci était déjà équipée de cinq studios d’enregistrement ultramodernes, chacun avec sa propre salle de contrôle et sa cabine vocale. Ils en ont ajouté deux autres au sous-sol et l’espace de près de 800 m2 (8500 pi²) comporte également une petite cuisine, quatre salles de bain, une douche, trois salons et un stationnement privé de 10 places. Une véritable perle rare au centre-ville de Toronto. Ils l’ont baptisée la Kilometre House.

« C’est généralement tranquille jusqu’en milieu de journée parce qu’on fonctionne sur l’horaire des artistes et non pas l’horaire des banquiers », explique McCarty. « Mais une fois que les choses commencent à prendre vie, c’est généralement à fond la caisse dans les sept studios. »

« L’idée était de créer un espace, un accélérateur de particules créatives, où les gens se rencontreraient par hasard et décideraient de collaborer, alors qu’ils ne l’auraient probablement jamais fait s’ils n’étaient pas venus ici », poursuit-il. « À date, ça fonctionne à merveille. C’est vraiment arrivé qu’un artiste soit en train d’enregistrer son album entende quelque chose qu’il aime dans une autre salle de contrôle et discute avec cet autre créateur et le lendemain, ils sont en train de travailler ensemble sur un nouveau projet. Au final, nos créateurs finissent sur l’album de cet artiste. »

Les sept créateurs de l’écurie KMG sont :

  • Aaron Paris (qui a travaillé avec Kanye West, Drake et DJ Khalid) ;
  • Chris LaRocca (Bryson Tiller, Stray Kids et LU KALA) ;
  • Eli Brown (Drake, Chris Brown et Jaden Smith);
  • harper (Vince Spales, Sevyn Streeter et TOBi) ;
  • Mido (Don Tolliver et Skaiwater) ;
  • Prince85 (The Weeknd, Lil Wayne et 21 Savage); et
  • Runway (DZL, Charmaine, Sylo).
Kilometre Killas
Les quatre nouvelles majeures associées à l’équipe de KMG en ce moment sont le EP Waiting Room de Harper qui est sorti fin mars 2023 sur Cult Nation ; le EP Perhaps de Chris LaRocca qui vient de sortir sur Red Bull/Wonderchild ; l’annonce que Aaron Paris sera producteur délégué et coauteur du prochain projet du rappeur d’Atlanta Russ; et le travail de Prince85 sur « Die For You » qui s’est hissé à la première place du Hot 100 de Billboard au premier trimestre 2023, ce qui en fait « probablement l’exemple par excellence d’une chanson qui a refait surface après plusieurs années », croit McCarty. « Ce morceau date d’il y a six ans, mais elle est devenue virale sur TikTok, ce qui l’a fait remonter dans le Hot 100. The Weeknd en a sorti un nouveau remix avec Ariana Grande, ce qui l’a propulsée à la première place. Elle était numéro 1 à la radio et numéro 2 dans le monde pendant un certain temps, et elle a également entraîné le retour de l’album dans les palmarès. Nous, on a genre 12 pièces à notre crédit là-dessus. »

Cependant, afin de demeurer fidèle à sa mission d’encourager les talents, la majorité des personnes qui travaillent à la Kilometre House ne sont pas sous contrat avec KMG.

« Ce qu’on veut c’est que ce soit comme un Times Square ou un Dundas Square pour les créateurs de musique, et on créé cette culture ici », continue McCarty. « Notre objectif est de devenir l’épicentre de la création musicale canadienne qui part à la conquête du monde. On veut que la prochaine vague de succès internationaux qui sortira du Canada soit produite à la Kilometre House. On est convaincus que c’est ce qui va se passer et que notre équipe de créateurs jouera un rôle important dans tout ça. »

Six des sept créateurs de KMG sont Canadiens, le septième – ce qui peut sembler étrange pour une entreprise qui souhaite « rapatrier, réclamer et réassembler les droits des grandes chansons canadiennes » – est un Parisien : Prince85, est un des coauteurs du mégasuccès de The Weeknd, « Die For You ».

« Notre mission est de créer un super-noyau d’édition musicale dans notre secteur afin d’exploiter le pouvoir créatif passé et présent des artistes canadiens, ce qui permet de le porter sur le marché mondial et de ramener les revenus au Canada, créant de ce fait un cercle vertueux », explique M. McCarty. « La composante canadienne est au cœur de ce que nous faisons, mais on n’est pas des idiots : on veut quand même être le centre mondial des catalogues et des talents musicaux actuels. On a plusieurs catalogues qui ne sont pas canadiens et maintenant on a un créateur qui n’est pas Canadien. Ça nous permet de bâtir une entreprise solide. »