Les garçons ne pleurent peut-être pas selon Tedy, mais ils rêvent cependant beaucoup : l’auteur, compositeur et interprète qui a récemment quitté Montréal pour se rapprocher de la business musicale torontoise lance ces jours-ci Boys Don’t Cry après avoir été repéré par Sony Music Canada.

Il y a la voix, stridente et sensible, il y a chez Tedy la manière surtout, passionnée, enflammée, théâtrale. Il ferait un malheur dans une production de Broadway, ça saute aux oreilles. « Je pense que j’ai traversé une période très dramatique de ma vie lorsque j’ai composé ces chansons, et ça s’entend dans la musique, dit-il. J’ai besoin d’être le plus authentique possible, et si c’est ainsi que ça sort, que ce soit ainsi. »

Né en Haïti, Tedy a grandi en Floride autour de neuf ans, où il a fait une grande partie de sa scolarité (« C’est là où j’ai passé le plus de temps, la Floride a fait une grande partie de qui je suis aujourd’hui ») avant d’emménager avec sa famille à Montréal, où il a passé la dernière décennie. « Le Canada, c’est chez moi », considère le musicien nomade, qui comprend parfaitement le créole et parle fort bien en français, « mais c’est plus difficile pour moi de le parler parce que je réfléchis en anglais; les mots me viennent d’abord dans cette langue ».

C’est donc en anglais qu’il choisit de s’exprimer en musique; dans sa manière de chanter, estime-t-il, on pourrait déceler une influence caribéenne, « mais ce serait inexact de dire que mon style est caribéen – quoiqu’à l’avenir, c’est quelque chose que je pourrais bien explorer. Toutes les options sont ouvertes! »

Ben tiens : ce n’est que le début de l’aventure pour Tedy, qui doit nous raconter comment il est ainsi passé de l’anonymat à signer un contrat de disques avec Sony  – un anonymat bien relatif puisque le musicien affirme qu’il cumulait « presque 50 millions d’écoutes de mes chansons » en ligne avant d’obtenir son contrat. « J’ai toujours gardé le profil bas – en fait, je suis quelqu’un de très insécure. Je suis toujours resté derrière la scène, même que je n’avais jamais publié de photo de moi, préférant lancer mes chansons en ligne. Je composais mes chansons tout seul, dans l’obscurité, je les enregistrais dans ma chambre et les mettait sur le web sans même en faire la promotion. Les gens en faisaient ce qu’ils voulaient; qu’ils sachent qui je suis ne m’importait pas, je voulais simplement qu’ils ressentent quelque chose à travers ma musique. »

Cela va de soi, on ne signe pas avec une major pour demeurer dans l’ombre. Par un de ces heureux hasards de la vie, sa voix a retenu l’attention de quelqu’un chez Sony, et voilà Tedy s’affichant dans des clips et accordant des entrevues. Il a tout dévoilé, jusque dans son intimité – avec la parution de son premier single Boys Don’t Cry, il annonçait à ses supporteurs sur le réseau TikTok appartenir à la communauté LGBTQ+. Les six chansons de ce premier EP abordent beaucoup ça, le désir de s’affirmer, une vision autre de la masculinité. « Avant, je ne croyais pas être capable d’accomplir tout ça », de parler d’une voix franche et de chanter d’une voix encore plus affirmée. « Aujourd’hui, je me sens plus fort. »

Pour Tedy, l’interprétation autant que la musique accompagnant sa voix doivent raconter une histoire. À l’origine, il chantait sur des productions chopées sur le web, « certaines que je retravaillais de mon côté ». Il bosse désormais avec des compositeurs et coréalisateurs attitrés, notamment les Torontois Mike Wise (Ellie Goulding, The Chainsmokers) et Herag Sanbalian. « Une expérience formidable que de pouvoir travailler avec eux, abonde Tedy. Pour la première fois, je pouvais commencer à bâtir des chansons de la base, partir de rien, et créer quelque chose qui était très près de moi et de ce que vis », des chansons qui expriment sa vulnérabilité, le désespoir qu’il a déjà ressenti, « des chansons qui me permettent de raconter qui je suis, comment j’en suis arrivé là et ce que je traverse aujourd’hui. »

Et ça ne fait que commencer! Cet EP en est un de transition pour le musicien, « mais maintenant que toute cette douleur est sortie de moi à travers les chansons, le prochain projet sera musicalement plus varié », prédit Tedy, qui cite Rihanna, Taylor Swift, The Weeknd, Dua Lipa et Justin Bieber comme inspiration.