Ce n’est pas parce qu’il a vendu plus d’un million de disques que Sylvain Cossette a envie de se poser : « Je vois chaque étape de ma carrière comme une nouvelle marche de mon “escalier” professionnel. » Depuis 25 ans, son ascension ne cesse d’ailleurs de se confirmer, de l’époque du groupe Paradox, à la fin des années 80, jusqu’à la parution d’Accords, en octobre 2014, un album de chansons inédites. Celui, pour sûr, de la maturité.
Avec le temps, cet autodidacte pur jus a multiplié les cordes à sa guitare et pris la pleine mesure d’une autonomie désormais bien assumée. « Comme l’océan, en 1994, a marqué le début de mon aventure en solo, explique-t-il. Ça a été un point tournant. J’avais commencé à écrire et à composer un peu par accident et j’ai tendu “Tu reviendras” du bout des doigts, tellement je craignais de la montrer. Cette création, ma toute première, a finalement été retenue parmi les dix chansons de l’année à l’ADISQ et elle a remporté un prix SOCAN. Ça m’a donné le goût de continuer. »
« J’ai eu envie d’un show intime, plus acoustique, dans des salles que j’ai visitées il y a longtemps. »
Par la suite Blanc, complètement de son cru, a régné 50 semaines au Top 50 : « Une révélation! » D’autres jalons allaient renforcer son identité de créateur et cristalliser sa popularité de chanteur virtuose : son interprétation saisissante de « Que je t’aime », l’album Humain, que, encore une première, il a réalisé et arrangé en entier, sa participation à 250 représentations de Notre-Dame-de-Paris, l’album Rendez-vous, l’épopée Dracula et l’écriture du conte musical Les 7, sa collaboration aux opus d’Andrée Watters et, bien sûr, le succès monstre du chapitre 70s, avec trois CD et des tournées à la clé.
Pour Sylvain Cossette, l’heure est à l’introspection et à la simplicité : « Après 12 ans sur les routes avec un camion de 53 pieds, après avoir chanté sur les plus grandes scènes du Québec avec beaucoup de moyens, j’ai eu envie d’un show intime, plus acoustique, dans des salles que j’ai visitées il y a longtemps, comme le Petit Champlain ou le Gesù. L’album Rétrospective – entièrement piano et voix – que j’ai lancé l’an dernier a justement servi de pont entre la “grosse folie” des dernières années et ce qui s’en vient. Les gens s’ennuyaient de mes chansons. Le public m’en parlait beaucoup, me donnait des commandes. Je l’ai écouté. »
Et pour son matériel, l’auteur-compositeur n’a pas eu à creuser : « J’ai l’impression que les chansons éprouvent le besoin d’émerger. C’est comme si les canaux étaient ouverts. Souvent, en une heure ou deux, les paroles et la musique sont là. » Sans doute parce qu’elles puisent à même le concret : « J’ai eu 51 ans et en vieillissant, j’épure au lieu d’accumuler. J’ai découvert le principe de Pareto, la loi des 80-20. Et je me suis demandé si je passais 80 % de mon temps avec les 20 % de gens qui sont mes vrais amis. Alors, j’évite les situations qui ne me rapportent rien et je priorise ceux qui comptent : mes enfants, ma blonde, mes proches. C’est un peu ça, le thème d’Accords… À 18 ans, on court. Et puis, on ralentit, on voit plus clair, on a besoin d’être en accord avec soi, la nature, le monde. On arrête de s’en vouloir pour ses échecs passés. On est à la bonne place. Il y a dans tout ça un côté très serein. Aujourd’hui, je m’en vais là où je serai en accord… Dans “Qu’adviendra-t-il de nous?”, j’exprime mon désir d’avancer, de foncer dans la vie, même si un jour, “ tout sera terminé et disparu”. “Notre monde” parle de l’envie de prendre les chemins de campagne plutôt que l’autoroute, pour goûter les moments à deux. »
Fidèle à ses racines, Sylvain a misé avant tout sur les guitares, qu’il collectionne avec passion, pour traduire ses états d’âme avec des sonorités tantôt folk, tantôt rock, le tout émaillé de ballades. Dans la tranquillité de son studio, il a presque tout fait tout seul – pistes instrumentales, voix et harmonies, arrangements, réalisation – avant de confier le résultat aux bons soins de son guitariste et complice Matt Laurent pour la touche finale prémixage. C’est aussi sa maison, S7, qui assure la production.
Après une tournée promo à l’automne, le clan Cossette repartira donc dès janvier pour une parenthèse en formation réduite, avec Matt Laurent et Martin Héon à la guitare, Sébastien Langlois à la batterie et au piano, sans oublier la douce et les filles de Sylvain : Élisabeth, 23 ans, à la voix et à la basse, et Judith, 24 ans, à la photo et à la vidéo, elle qui met la dernière main à un beau livre consacré à la carrière de son père. Bien entendu, tout ce petit monde ne pourra être qu’en parfait accord.