Rosie Valland

Photo par Philippe Sanfacon

Deux EP, un album, de nombreux spectacles, les demi-finales des Francouvertes 2015, les premières parties du concert d’Ariane Moffatt, quelques chansons placées dans la télésérie Nouvelle adresse, une nomination au Prix de la chanson SOCAN : Rosie Valland vient de connaître deux années prolifiques. Depuis la parution d’un premier mini-album en avril 2014, le métier rentre. « J’apprends à leader un projet, dit la musicienne. Ce sont des années formatrices et créatives. »

Plusieurs l’ont découverte l’an dernier avec Partir avant, un disque inspiré d’une rupture amoureuse, empreint d’une lourdeur assumée. Paru au printemps dernier, le petit nouveau nous emmène ailleurs : « Les deux albums sont sortis rapidement, presque coup sur coup, mais l’un a mijoté pendant deux ans, l’autre est plus spontané et ressemble davantage à où j’en suis maintenant. Nord-Est est un appel à la lumière. Ce n’est pas nécessairement joyeux, mais on est davantage dans la nostalgie que dans la douleur. »

En filiation avec le travail de Salomé Leclerc et de Cat Power, cette fois, une petite inclinaison pop qui évoque le feutre de la voix de Feist se révèle, en particulier dans Nos guerres. « Chanter est mon premier instrument. Je me suis laissé bercer par ma voix et Feist est une bonne influence pour ça. Durant la dernière année, j’ai autant écouté Justin Bieber que Suuns. Dans ma musique, toutes mes influences convergent; j’essaie de ne pas me limiter à une seule direction. »

C’est dans la chorale du petit village de Saint-Césaire en Montérégie que Rosie Valland a fait ses premières armes de chanteuse. Il y avait un piano à la maison, apprivoisé de façon surtout autodidacte. « J’ai grandi à l’époque de Star Académie et Mixmania. Dans ma tête, être chanteur c’était interpréter, se souvient Rosie, maintenant âgée de 24 ans. » Vers la fin de l’adolescence, alors qu’elle habite à Granby, la jeune musicienne découvre le métier d’auteur-compositeur-interprète, en voyant tous ces jeunes qui s’inscrivent à l’École nationale de la chanson. « Quand j’ai compris que je pouvais me donner mes propres chansons, j’ai commencé à écrire et à composer. L’année suivante, je suis entrée moi aussi à l’École et après ça a déboulé. »

«Les filles ont encore le réflexe de rechercher l’approbation des autres pour valider leurs idées musicales.»

C’est au cours de ces années fondatrices que Rosie abandonne le piano au profit de la six-cordes. « Au piano, je me juge beaucoup, c’est moins intuitif. La guitare s’est présentée tout naturellement en 2012 et tranquillement, la transition s’est opérée. Quand je joue de cet instrument, c’est surtout mon instinct qui me guide. »

L’apprentissage s’est fait en accéléré au contact d’un guitariste ferré et inspiré : Jesse Mac Cormack. Rencontré par hasard au Festival international de la chanson de Granby, Jesse devient un grand complice musical pour Rosie. « C’est une rencontre importante dans mon parcours. Jesse me demande beaucoup et exige le meilleur de moi-même. Travailler avec lui, c’est une grosse école intense pour moi. »

Plutôt ténébreuse, Rosie Valland assume de plus en plus sa position de leader d’un projet solo. « Que je sois en solo, en duo ou en formule trio, j’apprends à assumer que le projet porte mon nom et que peu importe avec qui je joue, il ne perd pas de valeur. Je ne dépends de personne d’autre que moi et je trouve que c’est une force d’avoir cette liberté. »

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Il y a quelques semaines, l’auteure-compositrice-interprète s’est retrouvée en nomination au Prix de la chanson SOCAN pour Olympe, un hommage subtil à la femme de lettres et pionnière du féminisme français Olympe de Gouges, morte guillotinée à Paris en 1793. « Souvent les gens me disent que je chante bien et ensuite, ils se tournent vers Jesse pour le complimenter sur la musique. Mais ce sont mes chansons! Les filles ont encore le réflexe de rechercher l’approbation des autres pour valider leurs idées musicales; ça explique en partie pourquoi il y a peu de femmes qui réalisent des albums. Il faut continuer de foncer sans se sentir mal, prendre sa place, devenir la femme qui nous inspire et qu’on veut être. Il reste encore des détails à ajuster, mais on est sur la bonne voie. »