La rumeur veut qu’un synthétiseur en vente sur Kijiji soit à l’origine du groupe Le Couleur. Laurence Giroux-Do, chanteuse, confirme : « On s’est retrouvés chez le gars qui le vendait et on a tripé tous les trois sur le son de l’instrument. Alors on a tiré au sort pour savoir qui repartirait avec. Steeven (Chouinard, batterie) et moi on est en couple; on s’est dit qu »on avait plus de chances, mais on a perdu. On a échangé nos numéros de téléphone avec Patrick (Gosselin, guitares et clavier) et on a fini par aller prendre un verre… C’est ainsi que Le Couleur est né. »

« C’est plus naturel pour nous de jouer à Berlin qu’à Chicoutimi. » – Laurence Giroux-Do de Le Couleur

C’est lors d’un bref passage comme claviériste de la formation Plaza Musique que Laurence, qui a étudié le piano classique à Vincent-d’Indy, a goûté à la pop. « Au début, je me suis dit « Ok, si c’est ça faire de la musique pop, c’est pas pour moi. » Mais au fil des répétitions, à force de jouer et d’écouter, j’ai apprivoisé le genre et je me suis mise à aimer ça au point d’avoir envie de fonder mon propre projet. Pour différentes raisons, j’ai quitté Plaza. Et c’est à ce moment-là que j’ai vu le synthé en vente sur Internet. »

Le Couleur a fait paraître en février dernier un EP au titre suave, un brin kitsch : Dolce Désir. Club italien, la première chanson, est inspirée des cafés de la Petite Italie à Montréal où des hommes passent leurs journées à discuter, boire des expressos et regarder le soccer à la télé. « J’aimerais tellement savoir de quoi  parlent ces hommes. » Sur cinq titres, seuls Club italien et Autovariation #64 sont des nouveautés. Les autres ont été revisités, parfois inspirés des remixes ou de leur évolution en concert. Le contraste entre les versions planantes, léchées de l’album et leur incarnation plus disco sur scène est marqué. « On tripe fort sur l’approche live du Norvégien Todd Terje. Ses perfos sont hallucinantes! Steeven a étudié en batterie et en pop à l’UQAM. En show, il joue fort, ça propulse nos chansons. Le tempo monte graduellement, on transite par différentes ambiances, mais une constante demeure : la basse martelée. C »est un enchaînement qui fonctionne bien pour nous et c »est ce type de spectacle qu »on va présenter aux FrancoFolies le 18 juin. »

Enjamber les frontières

Il y a dans la musique électro-disco-pop de Le Couleur, un potentiel d »exploitation internationale sur lequel l’étiquette Lisbon Lux Records a eu la bonne idée de miser. La voix aérienne de Laurence rappelle celles de Charlotte Gainsbourg et de Mylène Farmer. Le son du trio évoque aussi bien la french touch que l’euro-dance scandinave ou la pop sexy d »un groupe comme Chromeo, une facture sonore qui s’exporte bien. Le groupe rentre d’une petite tournée française. Les marchés travaillés par le jeune label bien réseauté incluent l’Europe francophone, l’Allemagne et l’Autriche, les grandes villes américaines et même l’Asie. « Ça fonctionne bien pour nous en Europe, la plupart de nos influences proviennent de là. C »est plus naturel pour nous de jouer à Berlin qu »à Chicoutimi. On trouve inspirante la trajectoire de Peter Peter; on aimerait suivre sa trace, aller s’installer trois, quatre mois en France pour approfondir nos démarches. »

Un décloisonnement qui s’observe également dans la façon dont Le Couleur propose sa musique. Le groupe privilégie la forme brève du EP, logique dans un contexte où les ventes d »albums sont en déclin et l’offre musicale, constamment renouvelée. Le groupe propose de nombreux remixes, sans non plus tourner le dos à l’objet vinyle. Cette approche polymorphe, très DIY, adaptée à l’éclatement des formats, ne nuit pas au groupe, bien au contraire. « On suit nos impulsions et envies du moment. Notre maison de disque ne nous impose pas de contraintes d »industrie. On fait de la musique, c »est tout. »

« Fille ou garçon, on se pose la question / Une robe ou un pantalon », chante Laurence dans Télé-Jeans. Ce jeu sur la transgression des frontières rejoint la question des genres. « En français, les mots sont genrés. J’ai eu envie de m »amuser avec ça, de voir comment on pouvait jouer avec la règle et la contourner – d’où notre nom de groupe. Et sur une note plus légère, je trouve ça sexy quand les Anglos disent « le couleur! »

Le Couleur et Les Marinellis
Dans le cadre des Rendez-vous Pros des Francos
Présenté par la SOCAN
Le 18 juin, 17h au Pub Rickard »s, Montréal