Surtout connu jusqu’ici comme interprète dans le band de Susie Arioli, Jordan Officer estime qu’il est essentiel dans ce rôle d’être fidèle à un compositeur auquel on veut rendre hommage, tout en y ajoutant sa personnalité, son propre langage. De bien intégrer chaque pièce jusqu’à ce qu’elle fasse partie de soi. Avec créativité et respect. « C’est surtout de raconter des histoires. C’est vraiment ça l’important. D’être un peu un story teller par l’entremise de la musique. C’est ça que je vise toujours à n’importe quel moment, dans n’importe quelle performance ou enregistrement. »

 

Le voilà qui se fait connaître sous un tout autre jour. Lui qui excelle dans la reprise de pièces jazz, blues et country de compositeurs qu’il admire, il a cru nécessaire, pour son premier album, de se tourner vers la composition de pièces originales. Question d’y exprimer ses multiples influences en toute liberté, tout en assurant une certaine unité à l’ensemble. Il s’agit d’un défi que le guitariste et arrangeur montréalais prend plaisir à relever et que l’on pourra pleinement apprécier sur scène dans quelques mois, alors qu’il amorcera une tournée de spectacles toute personnelle.

 

« J’avais hâte que les gens écoutent le disque. » On peut aisément comprendre l’impatience du compositeur à propos de son premier album solo homonyme (chez Spectra Musique), alors que, lancé à la mi-avril, il était fin prêt dès août 2009. « J’avais hâte de voir la réaction. C’est sûr que les gens qui connaissent Susie Arioli risquent d’être intéressés. Mais, en même temps, c’est bien différent. Je n’ai pas d’attentes. Je suis vraiment curieux de voir où ça va aller, qui ça va aller chercher. »

 

Bien que le maître du swing et de l’improvisation ait présenté, à quelques reprises, des pièces de son nouveau matériel sur scène, dont au Verre Bouteille (« une belle petite place pour faire des shows ») et lors du Festival International de Jazz de Montréal, en solo ou accompagné de son grand ami Stephen Barry et du batteur Anthony Albino, il n’entreprendra sa tournée officielle qu’en septembre prochain.

 

« Je trouve ça vraiment super comme trio ; la chimie est magnifique. » Mais comme le percussionniste est retenu à Montréal pour l’émission Belle et Bum et qu’il préfère rester près de sa famille que partir en tournée, Jordan Officer était, au moment d’écrire ces lignes, à la recherche d’un autre batteur pour la série de spectacles qu’il amorcera cet automne.

 

À l’exception de quelques autres prestations toutes personnelles, le guitariste virtuose effectuera, au cours de la période estivale, une importante tournée européenne avec son âme sœur, Susie Arioli, dont la rencontre fut si électrisante lors d’un mémorable jam session, en 1998. Une aventure envoûtante qu’il tient absolument à poursuivre, tout en laissant la porte ouverte à d’autres projets personnels.

 

« On commence à avoir le genre de tournées qu’on a toujours souhaitées. Je trouve qu’on a un bon tourneur, on a un bon label. Tout est en place pour bien faire les choses. On a l’avantage d’être avec une boîte comme Spectra ; c’est une grosse compagnie, mais c’est quand même des gens qui tripent. Mais on a aussi notre gérant, Bruno Robitaille (Nuland), qui est vraiment là pour nous. Ça fait un beau mélange, ça fait une belle équipe. »

 

Autant ce gentleman humble et introverti aime la scène et le contact avec le public, autant ce musicien perfectionniste apprécie la solitude de la création et le temps passé en studio à peaufiner les arrangements. « Parce que toutes les choses que tu fais en studio pour aller chercher ce qui résonne le mieux, ça finit par sortir dans ton jeu live, après. Tout ça, ça fait une vie vraiment agréable. D’avoir le mix des deux, d’avoir mon projet et celui de Susie. Toutes ces choses-là sont vraiment tripantes. »

 

Il y a, croit Jordan Officer, quelque chose de spirituellement important dans le travail. Le temps que consacre un musicien à son art a plus d’importance que son talent. C’est ce qui fait la différence dans la qualité du jeu. Il en est convaincu. « Quand tu as mis le nombre d’heures nécessaires, quand des gens te voient, ils ne sont pas en train de penser à ta technique, ils ne te voient pas en train de travailler ta technique, ils voient quelqu’un qui est libre. »

 

 



Les traductions pour les articles avant l’automne 2013 ne sont pas disponibles pour le moment.

Amir Epstein, the one guy in Toronto’s Crash Karma who didn’t come from a multi-platinum-selling Canadian rock band, wasn’t intimidated about playing his songs to ex-I Mother Earth singer Edwin, ex-Tea Party drummer Jeff Burrows and ex-Our Lady Peace guitarist Mike Turner, even if, “truth be told,” he says, “I Mother Earth influenced me heavily as a musician.”

The bassist, who earned his credentials as principal songwriter in the jam band Zygote, says he had full confidence in what he originally played for the guys at Turner’s recording studio, The Pocket. “I sat down with an acoustic guitar and played 24 songs,” Epstein recounts. “They didn’t have names, they weren’t finished and they didn’t have lyrics.”

No one rushed into starting a band. Turner had his studio and played in Fair Ground, Edwin was three albums into a solo career and Burrows was an on-air host at CKUE The Rock in Windsor, Ont., and a frequent session player. Epstein was actually finishing law school — in Australia. “[The project] would go into hibernation during those periods because we were all doing other things,” says Turner, who ended up producing the self-titled album. “It was definitely something we approached gradually. It was like, ‘We’ve got a weekend, let’s work on this.’”

Epstein, now back in Toronto for good, and Edwin would congregate at The Pocket; Burrows would take a morning train from Windsor and get back in time for his radio shift. “We’d grab a guitar and go, ‘Well, that’s cool, how about let’s arrange it like this?’ It was done on the fly. We started to do drums when we were still finalizing arrangements,” says Turner.

As they continued to work on songs, such as the psychedelic “Awake,” a recent Top 10 radio hit, and “Fight,” the empowering second single, they realized they had something, an amalgamation of all their personalities, pedigrees and signature styles. Of course, that might have had something to do with Epstein writing songs with the others in mind. “Even when I was singing, I’d imitate Ed to see how that would sound,” he says.

As Crash Karma emerged as a band, the four started behaving like one, including undertaking a tour in March/April. “We’ve all known each other a long time and respect each other enough to listen,” says Turner. “And Amir was so open. He more or less said, ‘Hey guys, I love what you do. Do what you do with this.’”

While Epstein never had “new-guy syndrome,” he does admit it’s kinda cool to be in a band with one of his favourite singers. “What a voice,” he says of Edwin. “Hearing him sing a melody I’d written, it sounded a bit like I Mother Earth but it was my song. It was really trippy.”



Avec aplomb, pas mal de soul et une silhouette de libellule, Roxanne Potvin a le blues au corps, depuis trois albums déjà, et un quatrième enregistré en compagnie de Sue Foley (Time Bomb, 2007), un mentor pour celle qui, après quatre années à Toronto, vient d’emménager à Montréal. « C’est par Jonny Lang que j’ai découvert le blues. J’avais quinze ans, j’étais une adolescente pleine d’hormones et il y avait ce gars très cute qui chantait à la télé… Ma première réaction, ça a été de dire : “Euh… Allô!” Mais il mettait tellement d’émotion dans ce qu’il faisait que j’ai eu envie d’aller plus loin. »

 

Pour Roxanne Potvin, la musique et certains groupes en particulier ont toujours eu des airs d’obsessions. « Avant le blues, j’ai eu ma période Beatles. J’écoutais rien que ça, ma chambre à coucher était un musée dédié à leur œuvre. Plus petite j’avais fait la même chose pour New Kids On The Block! Mon autre grande passion musicale, c’est le vieux rock & roll des années 50, Little Richard et Elvis… Quand j’ai découvert que le rock découlait du blues, un nouveau monde de musique m’est apparu. » À partir de là, Roxanne a eu envie de voir la vie en bleu : « C’est tellement cru, tellement vrai, l’émotion est tellement profonde quand t’écoute du blues… Je pense que c’est justement ça qui m’a interpellée. Peut-être que c’est la simplicité de la forme qui permet à l’émotion de se transmettre si vivement, je ne sais pas… En tout cas pendant les huit années qui ont suivi, j’ai exploré le blues et tous ses dérivés : jazz, gospel, soul, r n’b… »

 

Doux poison

 

Son plus récent album, No Love For The Poisonous, est paru en 2008, au sortir d’une phase tourmentée : « Je me posais beaucoup de questions, j’étais plongée dans une période de changements. » Bien des albums composés dans la vingtaine portent la marque de ces profondes mutations, d’une métamorphose vers l’âge de la maturité et qui implique un exorcisme des derniers échecs amoureux. Pensons à Cat Power ou Martha Wainwright par exemple. « Oui, ce sont des thématiques difficiles à contourner. Mais dans mon cas ça allait plus loin que la question des relations amoureuses laborieuses. Il s’agit d’un album introspectif, témoin de mes doutes, incertitudes et insécurités; je ne savais pas où j’en étais, encore moins où je m’en allais. »

 

Intituler l’album No Love For The Poisonous (comme la chanson qui y figure), est une suggestion de son gérant à laquelle Roxanne s’est d’abord opposée : « Je trouvais ça sombre, trop fataliste. Mais je me suis ravisée et aujourd’hui je le trouve parfaitement approprié. » Qui sont ces pauvres empoisonnés à qui l’amour se refuse? « C’est une chanson dans laquelle je raconte que lorsqu’on se laisse anéantir par ses doutes et ses idées noires, parfois on s’engouffre si profondément qu’on ne voit plus l’amour qui est là quand même, autour de nous, et qu’on en vient à le repousser. En d’autres mots : si t’es dans le noir et que tu ne fais rien pour essayer d’en émerger, c’est sûr que tu verras pas la lumière. »

 

Comme de nombreux résidents de l’Outaouais, Roxanne Potvin est parfaitement bilingue. Sauf quelques jolies exceptions, c’est dans la langue de Leonard Cohen qu’elle écrit. « Je suis à l’aise dans les deux langues, mais comme mes influences étaient en grande majorité des artistes anglophones, j’ai penché vers l’anglais. Mais j’aime écrire en français, ça me permet d’explorer autre chose. » Sur la chanson « Je t’aime », Roxanne Potvin enlève sa carapace et assume sa vulnérabilité, la revendique. « Mes deux chansons en français – celle-ci et “La Merveille”, avec Daniel Lanois sur The Way It Feels – parlent d’amour. Le français va chercher mon côté romantique, c’est si doux, ça me rend sentimentale. J’écris alors à partir d’une autre centre émotif… J’imagine que c’est en lien avec mon identité. »

 

Roxanne aime aller au fond des choses, décortiquer et analyser ce qui la fait vibrer. En arrivant à Montréal, elle s’est inscrite à des ateliers de chansons avec Robert Léger (Beau Dommage). « Après le dernier album, j’ai fait un effort conscient pour me perfectionner encore plus dans l’art d’écrire une bonne chanson. Maintenant j’ai une meilleure compréhension du processus, techniquement parlant. Écrire une chanson, ça va plus loin que se vider le cœur. On met le doigt sur une émotion et on veut la faire ressentir… Il y a des rouages derrière tout ça et c’est intéressant d’aller explorer comment ça marche de l’intérieur. » Pas de doute, Roxanne Potvin, chanteuse blues et chirurgienne dans l’âme, est la grande spécialiste des opérations à cœur ouvert.