« Dans mon univers », m’explique Fefe Dobson à propos de son processus créatif, « il y a une carte routière qui mène à la création d’une chanson avec un “hook” qui capte l’attention de vos oreilles sans relâche et qui fait qu’il n’y a pas un seul bout “platte”. De bien des façons, les mélodies sont plus universelles que les mots. »

Les chansons de Dobson ont toujours ce côté ultra personnel et introspectif même si les émotions et expériences qu’elle chante sont universelles et c’est devenu évident dès la parution de son premier album éponyme en 2003. Fefe Dobson a débarqué sur le palmarès HeatSeekers de Billboard en 1re position et a produit quatre simples consécutifs à s’inscrire au Top 10 radio, dont notamment Bye Bye Boyfriend et Take Me Away. Tout ça, à son tour, s’est traduit par une foule de nominations, incluant Meilleure nouvelle artiste et Meilleur album pop aux JUNOs, deux MuchMusic Video Awards et lui a également ouvert les portes pour assurer la première partie de la tournée européenne de Justin Timberlake en 2004.

Les 20 années qui se sont écoulées depuis ont vu la parution de trois albums, dont son plus récent, Emotion Sickness. Fefe Dobson a d’abord quitté Scarborough pour s’établir à Los Angeles et elle habite désormais Nashville. Elle s’est mariée, a lancé plusieurs simples à succès et elle a même continué de poursuivre une carrière d’actrice à temps partiel. Par ailleurs, certaines chansons qu’elle a coécrites ont été enregistrées et lancées par des vedettes comme Miley Cyrus, Selena Gomez et Jordin Sparks.

Elle s’est également bâti une réputation d’artiste qui n’a pas peur de prendre des décisions difficiles comme le fait d’avoir rejeté un des premiers contrats qu’on lui a offert parce qu’elle le trouvait inapproprié ou encore le fait de saborder un album entier parce qu’elle ne sentait pas à l’aise de le lancer. Le seul simple qui a survécu à ce sabordage, FCKN in Love, a depuis cumulé 2,4 millions d’écoutes sur Spotify depuis sa parution en 2022.

Bien que ses textes – qu’elle signe pratiquement tous sur Emotion Sickness – touchent de toute évidence un vaste auditoire, ils ne sont pas le moteur de sa musique. Nous lui avons parlé au téléphone tandis qu’elle se trouvait à Ottawa dans le cadre d’une tournée canadienne de neuf dates à l’automne 2023. « Pour moi, la mélodie a toujours passé en premier. Les paroles viennent après et ç’a toujours été comme ça. J’ai eu beaucoup de chance, même depuis le tout début. »

Fefe Dobson, Hungover, video

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Cinq des neuf chansons sur Emotion Sickness’ ont été coécrites avec Bryn McCutcheon, Kirstyn Johnson et le polyinstrumentiste et producteur de l’album, Sam Arion, et tout ce beau monde habite à Toronto. Dobson n’avait pas prévu travailler sur un nouvel album, mais cela est devenu une quasi-nécessité pendant la création du simple qui est devenu la première pièce dudit album, la très énergique et « dans ta face » Hungover.

« Je me sentais un peu gênée au début », se souvient l’artiste, « parce que ça faisait des années que je n’avais pas écrit un morceau punk la pédale dans le tapis comme ça. J’étais comme “oh! mon Dieu, est-ce que mon équipe va aimer ça?” Je pensais simplement que j’écrivais une chanson sur ce que je ressentais à ce moment-là, pas une chanson qui allait devenir la fondation d’un projet complet. J’ai reçu un coup de fil de mon équipe et ils étaient comme “il faut qu’on fasse un album immédiatement!”  L’aspect Toronto du projet est arrivé naturellement et j’ai trouvé ça chouette. C’était comme retourner à la source. » Et à l’heure ou Olivia Rodrigo et Avril Lavigne remettent au goût du jour la pop punk, il va sans dire que l’équipe de Fefe Dobson était aux anges.

Si ses chansons ont tendance à être tour à tour des morceaux à base de claviers et de guitares, elles ne commencent pas nécessairement de cette façon. Un bon exemple est I Can’t Love Him (And Love You Too), une pièce rock hautement dynamique qui a commencé à la guitare acoustique. « On ne savait pas si c’était un vieux morceau doo wop », raconte Dobson. « On n’avait aucune idée de la forme finale qu’elle prendrait. » Quand vient le temps d’ajouter les paroles, Dobson explique qu’elle se contente de vocaliser jusqu’à ce qu’elle trouve les bons mots. « Il y a des sons qui sortent de notre bouche et je cherche les mots qui collent à ces sons », explique-t-elle. Elle fait ensuite référence à un ami et supporteur, le producteur et auteur-compositeur primé aux Grammys, Jim Jonsin, qui a travaillé avec Beyoncé, Usher, Lil Wayne et Eminem. « Il appelle ça du “holy ghosting”, dans le sens que ça vient d’une puissance supérieure ou d’une autre dimension. C’est comme si tu deviens l’instrument de cette force et je respecte ça. »

Fefe Dobson se fait rassurante : il, est très peu probable que nous devions attendre encore dix ans avant son prochain album. Elle admet néanmoins être sous le choc de la réponse incroyablement positive qu’elle a reçue avec ces nouvelles chansons. « Le premier soir de notre tournée, à Toronto, correspondait au lancement de l’album et on a commencé le spectacle avec Ghost et c’était génial parce que tout le monde la connaissait déjà. On a enchaîné avec [la nouvelle chanson] Shut Up and Kiss Me et chaque fois que le refrain arrive, j’en reviens pas ; chaque soir c’est la même chose et toute la salle se met à sauter. Les nouvelles chansons passent vraiment bien et ça me fait plaisir de voir qu’elles touchent les gens. »

Une écriture royale
Fefe Dobson a choisi un environnement aussi confortable qu’inhabituel pour écrire la majeure partie de ce qui est devenu Emotion Sickness : sa chambre préférée à l’hôtel Fairmont Royal York, un endroit qu’elle considère comme sa deuxième maison lorsqu’elle est à Toronto. « On a installé des micros et on a commencé à écrire et enregistrer des pistes de voix. J’étais carrément assise sur le lit dans ma chambre d’hôtel pour écouter ce qu’on faisait. On écrivait les chansons et on les construisait. » Certaines des pistes de voix enregistrées dans cette chambre se sont retrouvées sur l’album, dont notamment celle de Shut Up and Kiss Me. Et puisque les micros, les guitares et les claviers étaient tous branchés dans un ordinateur portable, personne autour ne pouvait se plaindre du bruit.