You try to hold me down so I became a soldier/Built up all these walls and now I’m climbing over… Oh Lord! but I ain’t going back (librement : Tu essaies de me retenir alors je suis devenu un soldat/Tu as construit tous ces murs et maintenant je les escalade… Oh Seigneur ! mais je ne retournerai pas à l’intérieur )
Ces paroles intenses de l’auteur-compositeur-interprète québécois Jonathan Roy, dans « Keeping Me Alive » — dont la vidéo a récolté plus de 49 millions de visionnements depuis sa sortie en septembre 2019 — « ont ravivé la flamme », dit-il en parlant de son retour vers la musique.
« Je pense qu’elle a le même effet sur les gens », dit Roy. « Il y a plein de gens qui m’écrivent, des gens qui se font abuser ou qui ont des problèmes de santé mentale et cette chanson est comme un hymne. C’est l’effet qu’elle a eu pour moi quand je l’ai écrite. Elle m’a ramassé par le fond de culotte et m’a dit : “Tu sais quoi, Joe, tu vas faire ça pour le reste de ta vie, alors arrête de te plaindre. Il va y avoir des journées plus difficiles que d’autres, mais fonce et fais ce que t’aimes faire”. »
La chanson, coécrite avec Brian Howes (Hedley, Hinder, Mother Mother) et Jason Van Poederooyen (Boys Like Girls, Hinder, Hedley), fait preuve d’honnêteté, d’introspection et d’une vulnérabilité avec laquelle certains artistes ne seraient pas confortables. Le « punch » vient des paroles résilientes et motivantes, Your fueling of the flames gonna show you what I’m made of (librement : « ta façon d’attiser les flammes me donne envie de te montrer de quel bois je me chauffe »).
Ce n’est pas parce que son père est le légendaire gardien de but du Canadien de Montréal que Jonathan a eu une ascension facile dans l’industrie de la musique. Il s’est lancé professionnellement dans le monde de la musique après avoir décidé de ne pas poursuivre une carrière sur la glace avec les Remparts de Québec (LJMHQ), pour qui il a joué en 2008-09. Son premier amour a toujours été la musique. C’est durant son adolescence qu’il a commencé à mettre sa poésie en chanson et il a lancé trois albums indépendants — What I’ve Become (2009), Found My Way (2010), et La Route (2011) — avant que son père ne lui présente Corey Hart en 2012.
L’artiste qui « porte ses lunettes fumées la nuit » a pris le jeune Roy sous son aile, l’a mis sous contrat sur son label Sienna — qui est distribué par Warner Music Canada — et il a écrit plusieurs chansons pour Roy. On pense notamment au simple pop « Daniella Denmark » (2015) et à la pièce aux saveurs reggae « You’re My Ace » (2016), qui figureront toutes deux sur l’album Mr. Optimist Blues (2017) — mais rien ne laissait encore entrevoir l’intensité et l’honnêteté brute qui allaient venir.
« Les choses n’allaient pas très bien avec Corey et Warner », explique Roy. « On n’était pas sur la même page. Je voulais aller dans une autre direction musicale. J’écris des mélodies et des paroles pop, mais j’ai toujours eu l’impression que ma voix et ma véritable essence en tant qu’artiste ont toujours été plus du côté alternatif, ce qui a effrayé beaucoup de gens. »
« Il y a presque quatre ans, je me suis acheté une fourgonnette, j’ai vendu tout le reste et j’ai voyagé. J’avais besoin de prendre de l’air, alors je faisais des randonnées, de l’escalade, de la plongée, plein de trucs en plein air pour m’éloigner de la musique. J’étais complètement fucking perdu. Je suis allé en Arizona, en Utah, à L.A., je campais le long de la PCH [Pacific Coast Highway] à L.A. et j’ai rencontré Brian Howes. C’est Warner qui nous a mis en contact. On est allés en studio et “Keeping Me Alive” est la première chanson qu’on a écrite ensemble. »
« Je voulais écrire une chanson à propos de toutes les choses qui m’empêchent d’avancer »
Howes était installé à Malibu, à ce moment, mais il est désormais de retour sur l’île de Vancouver où lui et Roy poursuivent leur collaboration. « Il s’est reconnu dans mon histoire. Il comprenait ce que je vivais », dit Roy. « Il a été dans des groupes, il connaît l’industrie, il sait à quel point ça peut être difficile et à quel point ça peut être mêlant, des fois. »
Quelle est la première ligne qu’ils ont écrite ? « Il me semble que c’était “He tried to hold me down” (librement : “Il a essayé de m’écraser”). Ça frappait un grand coup tout de suite en partant », se souvient Roy. « J’écrivais à propos de toutes les choses qui me retenaient, de mon père qui me disait que je n’allais pas réussir dans la musique, que j’aurais dû me concentrer sur les études tandis que je voulais sortir plus de musique et Warner qui n’était pas totalement satisfaite ou qui contrôlait ce qu’ils voulaient pour moi dans ma musique, ou ce que Corey voulait. Je voulais écrire une chanson à propos de toutes les choses qui, dans mon esprit, m’empêchaient d’avancer. »
« On a écrit les quelques premières lignes, puis le refrain qui a donné le ton au reste, “Breaking every chain that you put on me” (librement : “Briser toutes les chaînes que tu as mises sur moi”). Ça prenait le contrôle de mon art et de qui je suis. Ce processus est enclenché depuis un bon moment. Et il n’est pas terminé. Plus je vieillis, plus je me sens sur mon “X”. C’est probablement parce que je suis pleinement en contrôle de ce que je fais. »
Ils ont enregistré une version rock/pop alternative qui a atteint la première place du Palmarès Radio Top 100 au Québec, mais Roy avait cette idée d’une version acoustique « live ». L’idée s’est transformée en vidéoclip — réalisée par Samuel Gauthier, avec le danseur Jean Yannick Tangara et la puissante voix de Kim Richardson — mais Roy n’aurait jamais imaginé qu’elle toucherait des dizaines de millions de personnes comme elle l’a fait.
« On a eu toute la misère du monde à se rendre à 10 000 visionnements », se souvient Roy. « Elle vient tout juste d’arriver sur le radar des gens. Le clip a d’une qualité merveilleuse. Je pense que les gens s’y sont retrouvés. C’est juste une bonne combinaison de tout : bon “timing”, bonne chanson, bon texte. »
Jonathan Roy est de retour au Québec, où il travaille sur du nouveau matériel et il vient tout juste de lancer une chanson et son vidéoclip tout aussi puissant intitulé « Lost ». Il collaborera bientôt de nouveau avec Howes et un EP doit paraître en mai 2021.