Les membres de Caveboy aiment presque tout faire ensemble. Cette entrevue est un bon exemple : c’est l’éclectique groupe pop montréalais qui a demandé que tous les membres y participent. N’ayant pas de porte-parole désigné, Caveboy préfère donner à chacun de ses membres l’espace nécessaire pour raconter son histoire. Nous joignons Isabelle Banos au téléphone, elle nous demande de patienter un instant et, quelques minutes plus tard, Michelle Bensimon et Lana Cooney font partie de la conversation. Timides, initialement, parce que les entrevues, c’est épuisant et parfois intimidant, elles se dégênent rapidement et le dialogue est soudain très animé. Difficile de faire mieux au chapitre d’avoir l’impression d’être une observatrice privilégiée de leur amitié, une dynamique où leur partenariat personnel, créatif et commercial est tissé incroyablement serré.

Mais Caveboy n’a pas toujours été Caveboy. Le groupe, fondé en 2015, s’est d’abord appelé Diamond Bones. Rapidement, le nom a donné signe qu’il ne collerait, ou ne pouvait pas coller. « C’était une période de transition, on a vraiment travaillé notre son et on se sentait solides quant à notre identité », explique Bensimon. « On pense toujours aux choses qui nous unissent, ces choses authentiques qui nous sont uniques. Quand on a pensé à Caveboy, ce fut notre “Eurêka !”. »

Depuis, Caveboy a réussi à se propulser toujours plus loin grâce à ses spectacles électrisants et à un EP paru en 2015. Elles ont ensuite remporté le Allan Slaight JUNO Master Class en 2017. Vinrent ensuite plusieurs simples biens fignolés qui ont connu beaucoup de succès en 2019 : « Landslide » et « I Wonder » ont été de toutes les listes des plateformes de diffusion en continu, « Silk for Gold » a été présenté en avant-première exclusive sur Billboard et « Hide Your Love » a atteint la première position du Top 20 de CBC Music. Et le trio continue son chemin en continuant de définir encore plus précisément son identité et comme la canaliser dans sa musique. Leur premier album, un projet entièrement indépendant, paraîtra ce mois-ci.

Night in the Park, Kiss in the Dark, disponible le 31 janvier 2020, est un album synth-pop effervescent. Le son est imposant, grâce au membre honoraire et réalisateur Derek Hoffman, connu pour son travail pour The Arkells, The Trews et Ralph, tous des artistes aux tendances sonores plus grandes que nature. De l’aveu du groupe, Hoffman a apporté la touche magique qui manquait.

“Ce lien de sororité qui nous unit est incroyablement important.”—Isabelle Banos de Caveboy

« Jusqu’à maintenant, nous faisions tout nous-mêmes », explique Cooney. « Au moins 90 pour cent de ce que nous faisions était autoproduit. Quand on a commencé à écrire les chansons pour ce projet, on savait que le temps était venu de faire appel à quelqu’un d’autre. » Avec 30 chansons prêtes pour cet album, Hoffman, sur une période de six mois, a aidé les membres du groupe à sélectionner celles que l’on peut entendre sur le produit final. Intuitivement, il trouvait le fil d’Ariane des chansons et donnait une cohérence à ces chansons parfois écrites il y a trois ou quatre ans.

Night in the Park, Kiss in the Dark est un de ces albums pop qui ont une aura de jeunesse éternelle. Selon le groupe, cela s’explique par leur nostalgie personnelle de souvenirs ou d’espoirs d’une jeune histoire d’amour, d’une peine d’amour et de frivoles pitreries. Et malgré tout, l’album est bien ancré dans le moment présent. La partie synthé de ces chansons pop est pétillante et évoque l’arrivée d’une nuit où tout semble possible et infini. C’est même vrai dans le cas de chansons qui ont également un côté angoissé (« Guess I’ve Changed »), lascif (« Obsession ») ou pensif (« Up in Flames »).

Caveboy nous explique qu’elles ont vraiment grandi ensemble tout au long de ce projet alors même que leurs contemporains abandonnaient ou disparaissaient de la carte dans la difficile industrie de la musique. Travailler en création pour finalement tenir une représentation physique de tout ce travail a toujours été la finalité de la production d’un album, malgré ce que certains membres de l’industrie conseillaient à Caveboy de faire.

« Tout le monde nous disait de faire un album et non pas un “disque“, parce que la tendance est aux simples », explique Cooney en faisant référence à leurs simples à succès parus en 2019. « Je suis super contente de notre album, et je considère que c’est un rite de passage quand on fait de la musique. Je n’aurais pas voulu qu’il en soit autrement. »

Avec tendresse, Banos ne tient pas pour acquise la chance de pouvoir grandir aux côtés de Bensimon et Cooney au sein de leur groupe. « Nous sommes toutes super chanceuses de pouvoir compter les unes sur les autres et de nous permettre, mutuellement, d’être vulnérables musicalement, ce qui est terrifiant », dit-elle. « Tu sais, écrire des chansons, créer des sons étranges et faire des erreurs, avoir l’air d’une folle. »

Elle poursuit : « ce lien de sororité qui nous unit est incroyablement important depuis des années : ça nous permet de vivre des moments d’apprentissage dans un espace sécuritaire, amusant et motivant, un espace productif. »