Les défis inhérents à X Company étaient très différents de ceux présentés par Flashpoint. Là où certains personnages ont des sons précis qui leur sont associés, l’approche globale visait plutôt à créer des thèmes qui se rattachaient à une équipe plutôt qu’à un individu. Il fallait donc créer des musiques qui reflètent les liens uniques entre chacun des personnages ou encore des concepts comme l’héroïsme, le regret ou encore l’amitié. « Ces thèmes peuvent ainsi être utilisés pour plusieurs personnages », précise Posner, « incluant des soldats réticents des deux côtés du champ de bataille, comme ces Allemands qui étaient opposés au régime nazi. Ce sont des thèmes musicaux qui donnent un contexte et établissent des sous-entendus à ce qui se déroule à l’écran quant aux émotions des personnages. »

Outre quelques « moments somptueux » où les deux créateurs travaillent ensemble sur une pièce précise, la plupart du temps Bhatia et Posner travaillent dans des studios séparés sur des scènes différentes. « Je connais des gens qui travaillent ensemble sur le même poste de travail à tour de rôle, mais nous n’avons jamais travaillé ainsi », confie Posner. « Amin vient d’un background classique plus traditionnel. Moi, je suis un pianiste qui a longtemps joué du classique, mais je viens d’un background pop et jazz. »

« Il y a un monde de différence entre la musique pour la télé ou le cinéma et la musique pour la musique. » – Ari Posner

« Mais malgré cela, nous adorons tous les deux les grands orchestres. C’est là que nous nous rejoignons », dit Bhatia. « Nous avons ainsi beaucoup étendu notre palette et notre répertoire; nous avons beaucoup appris de l’autre. De temps à autre, nous changeons volontairement de chapeau et travaillons sur un truc qui, normalement, aurait été naturellement fait par l’autre. »

Mais peu importe comment les tâches sont divisées, la communication est la clé du succès. « Nous sommes la plupart du temps la première oreille du travail de l’autre », poursuit Bhatia. « Nous passons la musique en revue avant d’aller rencontrer le client afin d’écouter ce que l’autre a produit, du moins si nous ne l’avions pas déjà entendu durant le processus d’écriture. » Bhatia mentionne au passage l’apport de leur monteur de musique, Joe Mancuso, sans qui le navire ne naviguerait pas aussi doucement.

Selon Bhatia, la composition pour le cinéma et la télé est de plus en plus similaire. « La qualité des productions télévisuelles est à un stade où elle rivalise sans problème avec les productions cinématographiques grâce à l’utilisation des technologies et en ce qui a trait à la créativité des artisans. » Mais, ajoute-t-il, dans un cas comme dans l’autre, « il faut laisser son égo de côté et se poser la question “de quoi cette production a-t-elle besoin? Comment puis-je le mieux être au service de l’histoire? ” C’est la chose la plus importante. »

C’est pour eux une philosophie primordiale qu’ils tentent de communiquer à tous les jeunes compositeurs émergents qui désirent œuvrer dans ce domaine de l’industrie. « Certains jeunes compositeurs croient qu’ils n’ont qu’à composer une mélodie à la John Williams pour devenir des stars, mais nous sommes toujours là pour leur rappeler une chose : n’oubliez pas que vous êtes des accompagnateurs, pas des artistes solo. C’est le film, la vedette. Tout ce que vous faites doit servir le film. »

Même si les compositeurs sont souvent les héros de l’ombre des productions cinéma et télé, jusqu’à un certain point, il n’en demeure pas moins que leurs contributions sont cruciales. Bhatia et Posner sont très reconnaissants des accolades reçues de la part d’organisations comme la SOCAN. Ils sont tous deux membres de la SOCAN depuis un moment – Posner depuis 1990 et Bhatia depuis 2010. Ce dernier a d’ailleurs renégocié son entente avec BMI afin de permettre à la SOCAN de le représenter pour le monde entier sauf les États-Unis.

« La SOCAN est très respectée partout dans le monde », explique Posner. « Je crois qu’elle est parmi les meilleures ODE du monde, et c’est tout à l’honneur de l’organisation si autant de compositeurs et d’auteurs-compositeurs de renom demeurent avec la SOCAN à cause des services qu’elle offre. »

« Il y a un monde de différence entre la musique pour la télé ou le cinéma et la musique pour la musique », poursuit-il. « Lorsque vous regardez une émission, la grande majorité de votre attention est portée sur l’image, les dialogues et l’histoire. Comme compositeur, vous devez vous demander, “comment puis-je m’inscrire dans tout ça sans attirer toute l’attention.” Parfois, j’appelle ça devenir invisible, c’est-à-dire créer de la musique qui provoque la bonne émotion chez le spectateur sans même qu’il s’en aperçoive. »

Pour y arriver, il faut être conscient de cette réalité et vouloir apprendre sans arrêt, selon Bhatia : « C’est là que se trouve le bonheur de ce travail. Vous êtes projeté dans quelque chose que vous ne pensiez jamais faire et que vous n’avez pas le choix de faire, ce qui vous force à essayer de nouvelles choses, à apporter votre propre personnalité à un genre ou un style que vous ne connaissez peut-être pas très bien, et cela vous fait grandir. »

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