Formé de Guillaume Beauregard (voix, guitare), Marie-Ève Roy (voix, guitare), Maxime Beauregard (basse) et Patrick Landry (batterie), les Vulgaires Machins commencent à faire du bruit à Granby en 1995, puis gravent un premier compact, 24:40. Après avoir déménagé ses pénates dans la grande région montréalaise à l’aube du nouveau millénaire, le quatuor fait paraître un deuxième album (Regarde le monde) et multiplie les concerts aux quatre coins de la métropole. En plus de participer à une kyrielle de festivals, la bande effectue aussi de nombreuses escales outre-mer et enchaîne avec Aimer le mal (2002), Compter les corps (2006) avant de lancer Requiem pour les sourds un peu plus tôt cette année. Quinze ans après sa naissance, la bête a-t-elle conservé la rage de ses débuts ? « On est peut-être même un peu plus enragés qu’avant ! assure Guillaume Beauregard. Évidemment, il y a un aspect magique lorsqu’on débute dans le métier. Tu navigues dans un milieu excitant où tout reste à découvrir. Tu conserves une certaine naïveté. Aujourd’hui, on a perdu cette innocence, mais on fait des tournées avec plus d’enthousiasme qu’à nos débuts. On a encore plus de plaisir à créer de la musique ensemble et on est plus en contrôle de ce que l’on fait. »

Épaulé une fois de plus par le vétéran Gus Van Go (ex Me Mom & Morgentaler) à la réalisation, le groupe a accouché d’un autre opus nerveux, énergique, riche en mélodies fortes, en riffs diablement efficaces et bien sentis et en textes dénonciateurs. C’est après avoir traversé une longue période creuse sur le plan créatif que les membres du quatuor ont décidé de prioriser un aspect en particulier : la spontanéité. « On a décidé d’oublier qu’il y avait des fans et des critiques avec des attentes et c’est alors qu’on s’est mis à écrire sans respecter la logique de l’émotion du groupe. On a écrit plus d’une vingtaine de chansons sans véritablement réfléchir au résultat final ou à la direction artistique. On voulait être un peu plus viscéraux dans notre approche et se lancer tête première dans le vide. C’est étrange parce que l’album précédent ne s’est pas du tout construit de la même manière. Je considère qu’on vient d’atteindre une nouvelle étape dans notre développement, » confie Guillaume.
Pour le chanteur et guitariste, la composition des brûlots punk-rock abrasifs et urgents des Vulgaires Machins relève essentiellement d’un travail d’équipe et d’une large part d’improvisation. « Règle générale, on se rencontre dans notre local de répétition et on jamme, on s’amuse à fond, puis on conserve certains éléments que l’on reconstruit par la suite. Neuf fois sur dix, la musique vient avant les textes. S’il m’arrive parfois de présenter au groupe une idée de chanson structurée, très souvent, il y a une part d’essais et d’erreurs dans notre démarche d’écriture. Ça provient autant d’expérimentations en groupe que d’idées travaillées auparavant en réclusion, » assure-t-il.

Ne cédant jamais aux compromis et à la pression, c’est au fil de lectures, de réflexions et de découvertes que le jeune homme construit des textes qui se métamorphosent en chansons de Vulgaires Machins. « Ce qui se passe sur la planète m’intéresse énormément et mes rapports avec les gens ont une signification profonde dans ce que je fais. C’est à travers la musique que j’ai l’occasion de vider mon sac, de dire tout haut ce que plusieurs pensent tout bas. C’est ma façon de m’exprimer et ça demeure un privilège. C’est dans ma nature, dans mon sang, de trouver des failles dans tout ce qui est beau. Je possède un sens critique aiguisé, une sensibilité exacerbée. Pour moi, l’écriture demeure une façon de rester sain dans un monde souvent décourageant. »

Ayant décliné de nombreuses offres lucratives de la part de publicitaires, les membres du quatuor granbyen souhaitent, à tout prix, demeurer fidèles à leurs valeurs. Pour le groupe, pas question de vendre son âme au monstre de la publicité. « Je serais incapable de me défendre. La dernière place où il faut se battre pour son intégrité, c’est dans la pub. Dès qu’un artiste vend ses chansons pour des publicités, il ne m’intéresse pas. Son commentaire ne m’intéresse plus. Je me bouche les oreilles à chaque fois qu’il parle. On ne peut pas laisser notre musique devenir autre chose que le fruit de notre âme, » insiste-t-il.

En plus de faire paraître Requiem pour les sourds en France (possiblement en mai), le quatuor multipliera les spectacles dans la Belle Province et prévoit effectuer une petite escale en territoire français à l’aube de 2011. Toujours affamé après toutes ces années de cohabitation, le clan ne démontre visiblement aucun signe de ralentissement. « Depuis la parution de l’album, on a donné quelques shows et la réaction du public est hallucinante. Prendre la scène d’assaut à nouveau nous fait tellement vibrer. Tu sais, on a déjà énormément de réactions positives face à l’album en France. C’est encourageant et ça nous stimule. Un groupe, c‘est une aventure faite de compromis et de communication. Au fil des ans, on a appris à se connaître et à mesurer nos limites. Tant qu’on sera tous sur la même page, la passion va prendre le dessus. Ce sont les individus qui vont tirer le groupe de l’avant et non pas l’industrie. »