« Je demeurerai un rêveur toute ma vie », gazouille Simon Ward, chanteur et principal auteur-compositeur des Strumbellas sur leur plus récent « hit », « Spirits ». Le très accrocheur premier simple tiré de leur album à paraître intitulé Hope a déjà été écouté plus de 3 millions de fois sur Spotify et est en rotation régulière sur les radios canadiennes.

Il y a des jours où l’ascension rapide du groupe vers la popularité semble totalement onirique à Ward. Au cours des récents mois, The Strumbellas a signé sur la chic étiquette Glassnote Records (Phoenix, Mumford & Sons), assuré la première partie de Blue Rodeo un peu partout au Canada, ont fait leur première apparition à la télévision américaine à l’émission Jimmy Kimmel Live?! et ont participé à une soirée pré-Grammy à Los Angeles en compagnie de Leon Bridges. Ward raconte qu’il était un peu nerveux de faire la rencontre de Kimmel et que les quelques jours passés à Hollywood étaient surréels. Mais parmi toutes ces expériences de rêve, la plus marquante a été sa rencontre avec son idole musicale : Alex Ebert de Edward Sharpe and the Magnetic Zeros.

Lorsque Words & Music a joint Simon Ward, les Strumbellas étaient sur la route en direction du sud des États-Unis, accumulant encore plus de kilomètres d’expérience dans leur odyssée musicale et gagnants de nouveaux fans partout où ils s’arrêtent grâce à leur « roots rock » mémorable. Ward et ses cinq coéquipiers sont entassés dans une camionnette de tournée et ont quitté New York en direction de la Géorgie. Un arrêt obligatoire est fait à Nashville avant de poursuivre la route pour se rendre à Austin, au Texas, afin de participer à plusieurs vitrines dans le cadre du festival SXSW, en plus de recevoir un Prix #1 SOCAN pour leur pièce « Spirits » et, bien entendu, manger du BBQ texan, une de leurs expériences culinaires préférées.

Formé en 2008, le groupe The Strumbellas est composé de : Simon Ward, David Ritter, Jon Hembrey, Izzy Ritchie, Darryl James et Jeremy Drury. Lorsqu’on lui demande comment le groupe a choisi son nom, Ward explique d’emblée que l’histoire est décevante. « Led Zeppelin était déjà pris?! » s’esclaffe-t-il. « Pour vrai, j’avais d’abord pensé à The Umbrellas, mais on n’était pas convaincus, alors j’ai suggéré Strumbellas. Tout le monde pensait que c’était pas mal, mais pas génial. On a songé à changer de nom à plusieurs reprises, mais on commence à l’aimer pour vrai. »

Quoi qu’il en soit, les fans aiment « Spirits » pour vrai, aucun doute. Le vidéoclip a été visionné près d’un million de fois. Lorsque vous verrez les Strumbellas en concert, vous pouvez parier qu’il n’y aura pas une seule âme dans la salle de spectacle qui ne sera pas en train de chanter son refrain en chœur : « I’ve got guns in my head and they won’t go/Spirits in my head and they won’t go. » (Librement « Il y a des armes dans ma tête et elles ne veulent pas partir/Des esprits dans ma tête et ils ne veulent pas partir »). La chanson parle du pouvoir de l’espoir, de comment trouver la lumière dans la noirceur qui nous envahit lorsque nous traversons une période difficile. Les mélodies et les paroles s’entrecroisent et illuminent toute forme d’angoisse.

« Je traversais une période difficile quand j’ai écrit ça », se remémore Ward. « On était sur la route et j’étais pas mal déprimé. Je m’ennuyais de ma famille. La métaphore des armes dans ma tête symbolise mes pensées noires, mais ce qu’il ne faut pas oublier quand on est déprimé, c’est que les choses iront bientôt mieux, c’est là qu’intervient l’espoir dans cette chanson. »

L’étincelle qui est devenue « Spirits » a illuminé Simon alors qu’il se trouvait en coulisses quelque part en Caroline du Nord, attendant de monter sur scène. Il a trouvé la mélodie en quelques instants sur les cordes de sa Gibson J45. « Je trouvais que ce que j’avais composé était cool », raconte l’artiste. « Je l’ai présenté aux autres un peu plus tard. Ils l’ont aimé, tout le monde trouvait ça très “groovy”. »

« Spirits » est le premier extrait du nouvel album Hope qui paraîtra en avril. Cet opus de 11 chansons a été enregistré au Lincoln County Social Club de John Dinsmore, à Toronto, et réalisé par Dave Schiffman (Weezer, HAIM, Sky Ferreira). Le tout s’est déroulé lors de trois sessions en 2015. L’enregistrement s’est fait de manière organique et spontanée, et plusieurs des chansons ont été créées très rapidement. Musicalement, elles suivent la recette qui les a menés jusqu’ici, un savant mélange d’acoustique, de roots et de alt-country, mais avec, cette fois-ci, une approche et un son un peu plus audacieux qui flirte avec la pop et une instrumentation plus expérimentale.

« Des idées me viennent à l’esprit et je les enregistre sur l’appli de mémo vocal de mon téléphone. » — Simon Ward, Strumbellas

« On a enregistré deux albums entièrement acoustiques où l’on jouait tous nos instruments », raconte Ward. « Ce nouvel album est le fruit d’un processus plus collaboratif. On voulait faire des chansons plus simples. Le son Strumbellas était là, mais on avait envie d’aller dans une direction plus pop avec beaucoup de synthés. Nous avons écrit l’album sans nos instruments, et la part du lion de la création s’est faite en studio. »

Pour Simon Ward, la genèse d’une chanson commence toujours par une mélodie. « Des idées me viennent à l’esprit et je les enregistre sur l’appli de mémo vocal de mon téléphone. Je me retrouve très rapidement avec un grand nombre d’idées, et ça commence toujours comme ça?; avec une idée de “hook”. Ensuite, je réécoute ces fragments et je bâtis des chansons à partir de ça avant de les présenter aux autres gars. Des fois, j’ai la crainte que ce puits d’idées se tarisse, mais — touchons du bois — jusqu’ici, ça n’est jamais arrivé. »

Et parmi toutes les pièces sur Hope, celle dont il est le plus fier est « We Don’t Know ». Sa mélodie entraînante et basée sur des harmonies est soutenue par des paroles qui font écho au thème de l’album, soit de se sentir perdu pour finalement retrouver son chemin : « I know my darkness will never go away » (Mon côté sombre ne me quittera jamais) et « It’s hard when you’re living and you don’t feel much » (Ce n’est pas facile de vivre et de ne pas ressentir grand-chose).

« Il y a beaucoup de synthés sur celle-là, et j’en suis vraiment fier. J’ai pris une nouvelle direction dans mon écriture. J’aime expérimenter avec de nouvelles sonorités et de nouvelles stratégies, et j’ai pris certains risques, en tant qu’auteur, sur cette chanson. »

Discographie
The Strumbellas (2009); My Father & The Hunter (2012); We Still Move on Dance Floors (2013); Hope (2016)

Faits saillants

  • Prix SOCAN de musique Folk/Roots en 2015
  • Prix Juno du groupe roots et traditionnel de l’année en 2014
  • We Still Move on Dance Floors a gagné le prix Sirius XM Indie Music Award
  • We Still Move on Dance Floors a également figuré à la longue liste pour le Prix Polaris

 



Porte-étendard officiel de ce qui fait vibrer la scène locale, CISM, la radio étudiante de l’Université de Montréal, souffle 25 bougies ces jours-ci. Et si le chemin parcouru se targue d’un noble mandat, le 89,3FM regarde plus que jamais droit devant. La nostalgie? Très peu pour eux. « Nous sommes une radio de découvertes, pas de nostalgie. Quand on nous syntonise, il y a de fortes chances de n’avoir jamais entendu ce qui y joue ailleurs. C’est sa force et, par moment, sa faiblesse », lance Jarrett Mann, directeur général de la station.

Faiblesse dans la mesure où la formule traditionnelle impose aux radios commerciales de fidéliser leur auditoire à grands coups de redites et autres succès-souvenirs. Qu’à cela ne tienne, c’est bel et bien en tirant dans tous les sens que la station – dotée de l’antenne étudiante la plus puissante au monde, couvrant quelque 70 km à la ronde – rencontre son public dans la marge, en s’appuyant sur une programmation relevée, hirsute et sans compromis. Et si l’écoute demande un certain effort, des dires du principal intéressé, une vaste pléthore des grands créateurs de la chanson actuelle y a fait ses premiers balbutiements à travers son histoire. Avec le million d’écoutes en ligne récemment atteint sur sa plateforme web, CISM prouve qu’il suffit souvent d’inviter son public vers de nouveaux horizons pour mieux le rencontrer. Même dans la marge.

« Une station comme CISM nous frappe par sa diversité et nous transporte vers la découverte. » – Olivier Langevin, Galaxie

Le cas de Louis-Jean Cormier est un des plus probants. Il y a de cela un an quasi jour pour jour, l’auteur-compositeur diffusait son dernier opus, Les artères, en écoute intégrale et exclusive sur le site web de CISM. Une façon pour l’artiste de remercier la station en soulignant l’importance de la plateforme de diffusion qu’elle incarne pour quantité de ses collègues en début de carrière.  « Le site a planté dans la première heure! », se souvient Mann. Mais le coup de chapeau demeure un des gros coups de la dernière année.

Même son de cloche du côté d’Olivier Langevin, leader de Galaxie, qui sera des festivités du 25e aux côtés des Hôtesses d’Hilaire et I.D.A.L.G. : « Une station comme CISM nous frappe par sa diversité et nous transporte vers la découverte. À l’affût de ce qui se fait de bien à travers les masses de musique qui nous sont offertes, je crois qu’elle est d’une importance capitale. »

Le bonheur est dans la niche

CISMLe pari de la découverte en est aussi un qui fait briller de tous ses feux les genres plus nichés visant des publics plus avertis, mais tout aussi fidèles que la masse, sinon plus. Et le rock garage ne pourrait être mieux servi que par Nous sommes les rockers, émission animée avec brio par Romanne Blouin, férue du genre dans toutes ses incarnations : «  je trouve ça très sain pour le paysage culturel, qu’il existe une telle alternative francophone aux médias traditionnels. Cela a un impact positif auprès des bands dont la musique est diffusée à CISM, mais aussi sur les auditeurs qui ne se reconnaissent pas nécessairement dans ce qui passe ailleurs sur la bande FM. »

De son côté, Benoît Beaudry est à la barre de Ghetto Érudit, devenu une incontournable plateforme pour le hip-hop, un genre particulièrement boudé par le circuit commercial. L’homme y trouve toute sa pertinence depuis maintenant une décennie, et pour cause: «  C’est LA station qui permet de rester à jour sur les nouveautés musicales québécoises, tous styles confondus. […] En plus, c’est un formidable laboratoire en permettant une grande liberté aux animateurs pour proposer du contenu différent. »

Et le titre qui a le plus tourné depuis que CISM comptabilise ses données? Magique de We Are Wolves – également de la partie pour les festivités du 25e – comptabilisée à quelques centaines de rotations depuis sa sortie. Alex Ortiz, leader de We Are Wolves, s’en trouve le premier un brin soufflé : « J’ai vraiment été surpris, je me suis demandé si ce n’était pas une arnaque », rigole-t-il. Et si l’artiste apprécie le souci de promotion locale au cœur du mandat de la station, il se souvient surtout de quelques moments où il entendait un band qui le branchait et avec qui il se retrouvait à partager la scène quelques mois plus tard. Les grands esprits se rencontrent, disait l’autre.

CISM 3.0

CISMEt les 25 prochaines années pour CISM? « On est dans les tops sur le web. Et on est une sacrée bonne référence en matière de nouvelles musiques. Il y a une chose qui a évolué avec les dernières années. Il y avait l’étiquette de radio étudiante (au sens péjoratif) qui s’est un peu dissipée au profit de la signature web », se réjouit Jarrett Mann.

L’essentiel, donc? Persister sur sa lancée : « Le virage numérique est loin d’être terminé. Je souhaite qu’on reste à l’affut des nouvelles technologies. En ce moment c’est la tablette, les téléphones. Il faut rester au fait des développements qui sont fulgurants. CISM se veut jeune et à l’avant-garde, si on veut que les gens nous écoutent et nous appuient, il faut s’adresser à eux! »

Benoît Beaudry : « Je souhaite à CISM de continuer à être indispensable pour Montréal, de continuer à se renouveler quotidiennement. Et surtout de toujours rester pertinente, à l’avant-garde et demeurer un tremplin pour la relève ainsi que pour ses artisans. »

À l’avant-garde depuis 25 années; à l’affût pour les 25 à venir. Longue vie à La Marge!

CISM célèbre ses 25 ans en musique lors de trois soirées de concerts qui promettent d’être mémorables :
We Are Wolves – 31 mars 2016, au Divan Orange (Montréal)
Loud Lary Ajust / Brown / Rednext Level  – 1er avril 2016, à la S.A.T. (Montréal)
Galaxie / Les Hôtesses d’Hilaire / I.D.A.L.G. – 2 avril 2016, au Club Soda (Montréal)

 



Tout au long des années 50 et 60, Johnny Cowell a vu ses chansons propulsées au sommet des palmarès pop. Un de ses plus grands succès demeure « Walk Hand in Hand », une majestueuse chanson d’amour qui a été enregistrée plus de 90 fois, incluant de très populaires versions par les « crooners » Andy Williams et Tony Martin ainsi que le célèbre quartet liverpuldien Gerry & The Pacemakers. Cowell a également écrit des chansons à succès pour d’autres artistes tels que The Guess Who (« His Girl ») et Bill Purcell (« Our Winter Love »), et on a également pu entendre sa chanson « (These Are) The Young Years » interprétée par l’organiste Floyd Cramer durant la dernière saison de la populaire série Breaking Bad en 2013. Le trompettiste de 90 ans qui a déjà fait partie de l’orchestre symphonique de Toronto a également été un des premiers intronisés au Scarborough Walk of Fame.

Vous avez commencé votre carrière musicale en tant que trompettiste. Qu’est-ce qui vous a attiré vers l’écriture??
J’ai commencé à écrire des chansons quand j’ai rencontré Joan (sa femme) dans un orchestre de danse. Elle en était la chanteuse et elle était simplement magnifique?! J’ai voulu écrire une chanson pour qu’elle la chante et je suis devenu accro à l’écriture, alors j’ai continué.

Qu’aimiez-vous de l’écriture??
Ça m’apportait beaucoup de satisfaction en tant que musicien. J’aimais m’asseoir au piano et jouer. Lorsque j’avais une bonne idée, la chanson s’écrivait pas mal toute seule. En fait, les mélodies me venaient facilement, mais j’avais plus de difficulté avec les paroles. Mais lorsque j’avais terminé, je ressentais une immense satisfaction. Si je ne ressentais pas cette émotion, je jetais simplement la chanson à la poubelle.

Johnny Cowell

Vous avez étroitement collaboré avec le célèbre et regretté éditeur William Harold Moon. Comment était-il??
C’était un de mes meilleurs amis. Nous étions réellement comme larrons en foire et il est celui qui m’a véritablement donné mon élan. Il était intéressé par mes chansons et c’est lui qui m’a poussé vers (l’ancêtre de la SOCAN), BMI (Canada). C’était drôle, car Harold m’appelait parfois le soir pour me dire « J’ai un bon titre de chanson pour toi, j’aimerais que tu me présentes une bonne chanson d’ici deux jours ». J’étais vraiment triste lorsqu’il est mort.

Racontez-nous la genèse de « Walk Hand in Hand ».
Ma femme Joan et moi nous sommes rendus à New York lors de notre anniversaire de mariage et nous avons décidé de prendre le traversier jusqu’à Staten Island. Lorsque nous sommes arrivés là-bas, la première chose que nous avons remarquée était la marquise du théâtre où l’on pouvait lire Love is a Many-Splendored Thing (NdT : un film paru en 1955 dont la V.F. est « La Colline de l’adieu », mais dont le sens librement traduit est « l’amour est une chose aux multiples splendeurs »). Alors nous avons décidé d’aller vois ce film. Et pendant tout le film, les personnages marchent main dans la main. Lorsque nous sommes sortis du cinéma, j’ai dit à Joan « Je crois que j’ai un bon titre de chanson, Walking Hand in Hand (marcher main dans la main). » Et lorsque nous sommes arrivés à l’hôtel, j’avais déjà composé toute la musique.

Il existe plusieurs versions de la chanson – Andy Williams, Tony Martin, Gerry & the Pacemakers, etc. Comment cela s’est-il produit
C’est mon ami Denny Vaughan. J’ai joué sur son émission de télévision, et c’est à ce moment que j’ai décidé que j’allais en studio pour enregistrer « Walk Hand in Hand ». C’est donc lui qui l’a enregistrée en premier et c’est un excellent enregistrement, c’est un excellent chanteur. C’est Denny qui s’est rendu à New York et l’a fait entendre à Republic Music. Eux l’ont fait entendre à RCA, puis à Tony Martin. Et à partir de là, Andy Williams l’a aussi interprétée, et de nombreuses autres personnes par la suite. C’était difficile de garder le compte. Un soir, Joan et moi regardions le Ed Sullivan Show, et Tony Martin s’est mis à chanter ma chanson. On ne s’attendait pas à ça. C’était magnifique.

« Walk Hand in Hand » est devenue un classique dans les mariages. Comment vous sentez-vous par rapport à ça??
C’est amusant, car les gens pensent souvent que c’est une chanson religieuse, mais pas à mes yeux. C’est une chanson d’amour. De temps en temps, je reçois un appel de quelqu’un qui n’arrive pas à en trouver la partition, alors je leur envoie une photocopie afin qu’ils puissent l’entendre à leur mariage. Je suis ravi à chaque occasion que j’ai de permettre à quelqu’un de chanter « Walk Hand in Hand ».