Sally Folk est apparue dans le paysage musical en 2010 avec un premier album en anglais qui révélait l’empreinte laissée par les Ronettes, les Supremes et Cher sur sa musique, des affinités avec le style rétro-chic des sixties qui en ont fait d’emblée la petite cousine québécoise des Amy Winehouse et Duffy. Revoici Sally Folk pour un deuxième tour de piste… en français cette fois. Surprise de taille quatre ans plus tard, alors que la chanteuse propose un album homonyme dans sa langue maternelle.
« La transition vers le français s’est opérée tout naturellement, explique Sally. J’avais déjà quelques chansons en anglais. Mon gérant m’a suggéré d’en traduire une, pour voir. On n’écrit pas de la même façon en français. Le travail sur les métaphores et la sonorité des mots est très différent. Les mots ont souvent plusieurs significations et le jeu sur les niveaux de sens est intéressant. En anglais, tu peux répéter baby quatre fois en ligne, les gens vont aimer ça quand même. Changer de langue, c’est comme délaisser la physique pour la chimie. Je ne dis pas que je ne reviendrai jamais à l’anglais, mais j’ai ajouté une belle carte à mon éventail de possibilités. »
La candeur avec laquelle Sally Folk aborde son métier étonne et ravit. Elle démontre un solide sens de la fête, une maîtrise de l’art de se mettre en scène, beaucoup de curiosité et elle sait s’entourer. « Plus jeune, j’ai été en affaires, dit l’ancienne copropriétaire du bar Le Sofa à Montréal. J’ai évolué dans un milieu proche de l’univers musical, celui des boîtes de nuit. » Jusqu’à ce qu’elle décide de vendre ses parts pour partir en voyage et que l’envie d’écrire, de composer et de chanter la gagne.
« Les relations hommes-femmes, quel sujet inépuisable! Je m’inspire des situations inconfortables de la vie amoureuse. »
La femme d’affaires s’organise et finance elle-même la production d’un premier album. « Ça m’a coûté cher, j’ai misé tout ce que j’avais… À un moment donné, tu arrives à un âge où tu te dis : “Je fais un autre album ou je m’achète une maison?” » Dilemme. C’est alors que Sally Folk s’est tournée vers Entourage, la compagnie de production qui propulse Annie Villeneuve, Boom Desjardins, Stéphanie Bédard et Marianna Mazza. « La prise en charge de ma carrière par Entourage m’a permis de me concentrer sur la musique. Avant, comme je gérais tout, mon break je l’avais quand je montais sur scène pour m’éclater. Je suis contente d’être passée par là, car aujourd’hui je comprends bien les étapes de la chaîne déployée derrière l’artiste. D’ailleurs, la production continue à m’intéresser et j’ai des ambitions de ce côté. J’aimerais aider certains interprètes à éclore. C’est un projet que je me réserve pour plus tard. »
On la croirait évadée du Pulp Fiction de Tarantino avec sa chevelure noire coupée au carré, ses lèvres assorties à ses ongles carmin et cet air coquin qu’elle affiche. Sally Folk est l’alter ego de Sophia D’Aragon. « C’est plus qu’un rôle de composition. Les histoires que je raconte, je les assume. En leur ajoutant la touche fatale, le costume et la coquetterie de Sally Folk, qui me permettent de m’exprimer. Il y a une petite dévergondée qui sommeille en chaque femme. Sally est une extension de ma personnalité. »
Loin d’être mielleux, les textes entraînent l’auditeur en eaux troubles. Dans ces chansons de désamour, les infidèles sont heureux, les filles séduisantes et séductrices, les hommes du quartier sont irrésistibles et les amoureux, volages, préfèrent les effeuilleuses. On entre au cabaret. « Les relations hommes-femmes, quel sujet inépuisable! Je m’inspire des situations inconfortables de la vie amoureuse. » Et Sally a l’embarras du choix, puisant à la fois dans son expérience et dans celles de ses copines.
Musicalement, elle se permet quelques touches d’americana et de superbes arrangements de cuivres et de cordes signés Michel Dagenais (Jean Leloup, Marc Déry, Breastfeeders), grand complice des débuts, qui réalise l’album une seconde fois en plus d’y jouer comme musicien. « Je lui ai dit que musicalement, j’avais envie d’aller vers de nouvelles sonorités. » Dagenais venait d’enregistrer le superbe Chic de ville de Daniel Bélanger. On reste dans la palette country-lyrique, et tout cela avec une apparition de Bélanger lui-même sur « Les hommes du quartier ». « C’est si précieux à mes yeux. Un autre apprentissage que j’ai fait dans mon ancienne vie de femme d’affaires, c’est qu’on ne change pas une formule gagnante. Sally Folk, c’est mon visage, mais c’est aussi de précieux partenaires avec qui construire. Je sens que le projet prend son envol, c’est excitant. »
Et gageons qu’avec ses chansons en français, de nouvelles portes s’ouvriront dans les grands festivals estivaux, en ville, en région et pourquoi pas en Europe? « C’est mon souhait, car ma musique, je la fais pour la partager avec le plus de monde possible. En spectacle, je vis l’expérience exposant 1000 et l’aventure prend tout son sens. »