Les moments de répit sont peu nombreux pour Rymz ces jours-ci. En plus de sa tournée qui se poursuit un peu partout au Québec et de son emploi d’éducateur en foyer de groupe auprès des enfants, le rappeur de 28 ans planche sur l’écriture d’un troisième album.
Lorsqu’on rencontre le Montréalais chez lui lors de sa seule journée de congé de la semaine, on s’attend à le voir détendu, bien assis sur son divan à décompresser avant de partir pour la fin de semaine à Woodstock en Beauce. Bien au contraire, on le croise plutôt les deux mains dans la peinture, à piloter un chantier d’envergure avec ses colocs. « Je suis pas quelqu’un qui aime avoir rien à faire », dit-il, tout sourire, juste après avoir déposé son pinceau. « Ç’a toujours été de même.»
Depuis la parution de Petit prince au printemps 2016, le Montréalais d’adoption ne voit plus le temps passer. Figure déjà bien connue de la scène rap québécoise, Rymz en est devenu l’un des représentants les plus notables dans les derniers mois. Bien au-delà de ses propres attentes, ce deuxième album solo lui a permis d’obtenir un intérêt plus accru de la part des médias et des organisateurs de festivals, notamment M pour Montréal, les FrancoFolies et le Festival d’été de Québec. « On m’a comme un peu découvert », observe-t-il, sans trop savoir à quoi attribuer ce succès.
Chose certaine, ce n’est certainement pas en raison d’un adoucissement de sa proposition artistique ou d’un quelconque virage pop. Même s’il propose une trame musicale résolument plus moderne que tout le reste de son catalogue, fruit des efforts concertés des producteurs Gary Wide, Shash’U, Farfadet, NeoMaestro et Ruffsound, Petit prince met en scène un Rymz toujours aussi insouciant et vulnérable, prompt à flancher devant les vices qui l’incombent.
« J’me disais que, d’ici quelques années, tout ce qui resterait de moi, ce sont ces chansons-là. Je pensais vraiment que j’allais crever à 27 ans… »
Au centre des thèmes qu’il évoque, la dualité entre le bien et le mal ressurgit tel un ensemble de contradictions. « Des fois, y a des fans qui essaient de me coincer en me demandant, par exemple, pourquoi je dis que je veux plein d’oseille dans une chanson, alors que je dis qu’elle est un mauvais maitre dans une autre. Je leur réponds que je donne aucune réponse dans mes textes, que je pose des questions tout simplement. Ça me représente bien, car je suis moi-même une personne contradictoire : le jour, je travaille avec les enfants, et le soir, je fais des shows pis j’bois des shots. J’ai beaucoup d’amour à donner, mais aussi beaucoup de violence à sortir… En fait, c’est surprenant que je sois devenu quelqu’un de bien. »
Natif de Saint-Hyacinthe, Rymz a vécu une adolescence mouvementée. Derrière lui pour de bon, cette époque de délinquance laisse encore ses traces aujourd’hui, autant dans sa vie personnelle que dans ses chansons. « Toi, t’as regardé La Haine, moi j’ai grandi avec », comme il le dit dans Ma Zone, tirée de son dernier album.
L’ensemble de son œuvre avec Mauvais Acte, duo qu’il a instigué au milieu de la décennie 2000 avec son acolyte O-Lit, fait foi de cette période trouble où il cultivait une vision beaucoup plus fataliste du monde. « J’ai été très productif durant cette période, car, dans ma tête, j’enregistrais à titre posthume. J’me disais que, d’ici quelques années, tout ce qui resterait de moi, ce sont ces chansons-là. Je pensais vraiment que j’allais crever à 27 ans… »
« C’est vraiment mon choix de carrière qui m’a changé, poursuit-il. Plus ça allait dans mes années d’études, moins j’avais envie de faire des conneries. Avec du recul, y a aucun vol qui m’a autant rapporté que des bonnes heures de travail bien payées à aider les jeunes. »
À travers cet emploi du temps, la musique apparait comme un exutoire essentiel pour le rappeur signé sous Joyride Records. Le récent engouement qu’il génère vient toutefois avec son lot de nervosité. « Y a une ostie de pression en ce moment. C’est fatigant », avoue-t-il à propos de la création de son troisième album, dont la sortie est prévue d’ici la fin de l’année. « J’appréhende la réaction des autres, même si c’est pas quelque chose auquel je pense quand j’écris. »
Sans jouer la carte de « l’album mature », Rymz proposera un opus à la mélancolie moins marquée et à l’ambiance « moins agressive ». « C’est un album pour chiller pis turn up en fumant des gros bats. En l’écoutant, tu comprends que ça va mieux dans ma vie. Le thème du voyage et de l’évasion revient beaucoup aussi. Un peu comme si, après avoir passé le cap des 27 ans, j’essayais d’entrevoir ce que l’avenir me réserve. »