Le Torontois d’origine Matthew Tishler a de bonnes raisons de se sentir comme un gamin dans une confiserie : la vidéo de sa chanson « Kid in a Candy Store », qu’il a coécrite pour la chanteuse, vedette de la télé et sensation YouTube JoJo Siwa, a été visionnée plus de 74 millions de fois.

Mais « Kid in a Candy Store » n’est que le plus récent coup d’éclat du jeune homme désormais établi à L.A. : depuis le début de sa carrière, il a écrit, coécrit ou réalisé des projets dont les ventes totalisent plus de 15 millions d’exemplaires de ses pièces pour Disney et les artistes de la J-Pop et de la K-Pop.

« Je suis éhontément commercial et pop », avoue Tishler sans ambages. Je travaille bien avec Disney parce que j’arrive à concrétiser une vision avec eux. »

C’est aussi parce qu’il sait comment écrire pour les jeunes. Tishler a collaboré avec la vedette de High School Musical Ashley Tisdale, l’actrice du « sitcom » pour ados Liv and Maddie, Dove Cameron, la vedette de Girl Vs. Monster Olivia Holt, ainsi que Ross Lynch de Austin & Ally, en plus d’avoir écrit la chanson thème de la série télé Girl Meets World, toutes des propriétés de Disney. Écrire des chansons pour la télévision est sa niche de marché.

« J’ai rencontré les gens de Disney lorsque je me rendais souvent à L.A. pour des séances de créations, au début de ma vingtaine », explique le jeune homme aujourd’hui âgé de 31 ans. « C’est à l’époque ou Hannah Montana était au sommet de sa popularité, et j’ai toujours su que ce genre de chanson me vient tout naturellement. Ça cadre bien avec Disney, car nos motivations s’harmonisent : j’aime vraiment ce qu’ils font. J’aime écrire des chansons pour le cinéma et la télé et ce genre de musique centrée sur une histoire et des personnages m’attire énormément. Disney et moi c’est comme le couple idéal. »

Tishler affirme par ailleurs qu’il excelle lorsqu’il arrive à se placer dans le même espace mental que la personne avec qui il collabore. « On en revient à ce personnage. Il faut arriver à se placer dans cet état d’esprit. On devient un peu zozo et ça aide de tout simplement parler avec ces artistes afin d’apprendre à les connaître », explique le jeune créateur qui a récemment complété 26 chansons pour une série animée de Disney Jr. de 52 épisodes qui sera diffusée cet été.

« JoJo Siwa est particulièrement sûre d’elle-même. Plus je discute avec elle, plus j’apprends ce qui la motive, ce qui l’excite, plus j’apprends à la connaître. Évidemment, ça aide de collaborer. JoJo contribue beaucoup aux paroles, alors nous nous assurons ensemble qu’elles conviennent à sa voix d’un point de vue lyrique. »

« Je suis éhontément commercial et pop. Je travaille bien avec Disney parce que j’arrive à concrétiser une vision avec eux. »

L’autre marché que Tishler a développé et entretient et celui de la J-Pop/K-Pop — comme dans Japanese Pop et Korean Pop — où il a écrit pour des artistes comme EXO, Taeyeon, BTS, AOA, Koda Kumi et la légende J-Pop qui prendra bientôt sa retraite, Namie Amuro.

Les trois conseils de Matthew Tishler pour les jeunes auteurs-compositeurs :

  1. « Suis ta voix et trouve ta niche. Ç’a été crucial pour moi et je suis reconnaissant d’avoir trouvé ces niches plutôt que de me taper la tête sur un mur en tentant de faire quelque chose qui ne me vient pas naturellement. »
  1. « Ne te compare pas aux autres. C’est une chose d’être inspiré par des gens talentueux et d’en tirer une motivation, mais j’essaie toujours de ne pas me comparer, surtout si c’est par compétitivité ou par envie. C’est la meilleure manière de se sentir embarrassé. Mon meilleur travail, je le fais toujours lorsque je regarde vers l’avant, que je suis concentré et que je fais ce que je fais le mieux. »
  1. « Un conseil pratique qui m’a toujours aidé : toujours garder le contexte à l’esprit. C’est facile de simplement commencer à jouer de la musique, alors j’essaie toujours de me préparer un max avant de jouer une seule note. Qu’est-ce qu’on écrit ? Pourquoi ? Qui écoutera cette chanson ? Prenez le temps de vraiment réfléchir au projet, à l’artiste, au moment, au ton souhaité et au résultat final. Bien comprendre ces choses avant de commencer à écrire aide à organiser ma pensée et à trouver une direction, comme ça, l’exécution est beaucoup plus amusante et facile. »

« Nous avions trois chansons sur son album Finally, et il s’est écoulé à deux millions d’exemplaires physiques », raconte Tishler. « C’est quasiment du jamais vu. Je ne me rappelle pas qui est la dernière personne ici à avoir vendu autant d’exemplaires physiques ; Adele, peut-être. »

Tishler explique que c’est son ancien agent, le regretté Brandon Gray, qui l’a introduit au marché asiatique alors qu’il habitait toujours Toronto. « Il avait des contacts dans ce marché et il leur a envoyé mes chansons », explique-t-il. Ils répondaient totalement au genre de musique que je faisais, d’une manière à laquelle je ne me serais jamais attendu. Avec le recul, je crois que j’ai compris pourquoi. Je suis très fort en mélodies, et c’est la chose la plus importante dans ce marché. Les paroles ce n’est pas ma force, ce n’est donc pas surprenant que mon premier succès dans ce marché ait été une chanson dont ils ont totalement changé les paroles », se souvient-il en riant.

Mais malgré son succès dans ces marchés, ce n’est qu’il y a trois ans que Tishler a visité la Corée du Sud pour la première fois, et il visitera le Japon pour la première fois en avril. « Nous avons travaillé à distance pendant toutes ces années », explique-t-il. « J’écrivais mes chansons à Toronto, puis à Los Angeles, je les envoyais, et nos contacts là-bas nous retournaient leurs commentaires et directives. On effectuait des révisions puis on leur retournait les versions finales. Je n’ai jamais rencontré qui que ce soit en personne durant ce temps. Maintenant, nous allons en Corée une fois l’an et on participe à des camps de création organisés par une des grosses maisons de disque à Séoul. »

Séoul a été une sorte d’épiphanie pour Tishler. « Il faut être sur place pour réellement comprendre l’importance que la musique a peur eux », dit-il. « Elle est une partie intégrale de la culture. Ce sont de vrais fans de musique. Ils aiment les chansons, ils aiment les artistes et ça se voit où qu’on aille. »

Écrire pour une autre langue demeure un défi particulier, mais Tishler explique qu’il a appris des techniques pour gérer l’interprétation. « On apprend des astuces pour écrire des mélodies qui se traduisent bien, ainsi que certains phrasés qui fonctionnent mieux que d’autres », confie-t-il. « On peut aussi compter les syllabes, mais rien ne bat la collaboration et la cocréation en personne. »

Quoi qu’il en soit, comme le dit Tishler, le test décisif est la qualité. « En fin de compte, que la meilleure chanson gagne. »