Cet été, pendant que les fans des Raptors de Toronto célébraient la victoire historique de leur équipe, la plupart d’entre eux le faisaient au son de la musique de Just John x Dom Dias, le dynamique duo torontois dont la chanson « Pull Up » fait partie de la playlist officielle des Raptors aux côtés d’immenses succès comme « Nonstop » de Drake et « Press » de Cardi B.

« C’est vraiment cool », nous répond Just John (John Samuels) depuis sa demeure à Toronto. « Beaucoup de fans des Raptors ont connecté avec cette chanson et ont commencé à nous suivre. Ils faisaient jouer notre chanson après certains matches victorieux. »

« Nous sommes vraiment chanceux et reconnaissants de faire partie de l’histoire, de cet héritage », ajoute Dom Dias.

D’aucuns qualifient leur inclusion à la fameuse playlist de « talent et d’un parfait “timing” », mais quant au duo, il s’agit simplement d’« énergie », un concept auquel ils doivent tout, même le fait de travailler ensemble.

Début 2018, Dom Dias a vu une publicité mettant Just John en vedette sur Instagram. Intrigué, il l’a immédiatement contacté en lui proposant un « beat ».

« John a vraiment aimé mon beat et nous nous sommes retrouvés en studio dès le lendemain », raconte Dias. « Ce beat, c’était précisément “Pull Up”, celui que les Raptors ont choisi. » Les deux artistes ont immédiatement trouvé dans l’autre un je ne sais quoi qu’ils recherchaient. « J’ai été frappé par son style, sa personnalité et son lyrisme. Aussitôt que nous sommes entrés en studio, tout allait de soi. »

Quant à Just John, fondateur de Blank Canvas, un collectif d’artistes primés, Dom lui apportait la vision aux multiples facettes dont il est avide. « C’est comme si mes vœux avaient été exaucés, car j’étais à la recherche de gens qui comprennent l’énergie que je tente de capter. Et c’est aussi quelqu’un qui me pousse à m’améliorer sans cesse. Dom était, et il est toujours, cette personne. »

« On fait des trucs qu’on aime. On crée des vibrations. » — Just John

Dom a offert à John un espace où les nombreuses disciplines de son collectif peuvent s’entrelacer avec autant de puissance à travers sa musique. « Je me suis fait les dents dans la scène artistique indépendante », explique John. « Bon nombre de mes idées sont fondées sur le concept de prendre sans honte tout l’espace qui nous revient. Il faut demeurer fidèles à nous-mêmes. Vivre entouré d’amour, pas de crainte. Je m’exprime beaucoup au sujet de mon expérience, de la brutalité policière. Parfois, je ne me rebelle que contre l’énergie, l’énergie même d’une chanson. Quand les gens viennent nous voir, ils vibrent au diapason de cette énergie. Ils veulent se laisser aller et se libérer. Je crois que c’est une des choses que nous apportons à la musique. »

Il n’est pas rare que les deux musiciens travaillent ensemble tous les jours. Dom crée des beats et les fait entendre à John en personne. « Je connais John depuis assez longtemps pour savoir quand il aime vraiment un de mes beats et quand il ne l’aime vraiment pas », explique Dom. Lorsque John adopte un beat, il passe quelques jours avec celui-ci.

Just Dom: critiques dithyrambiques

  • « La collaboration entre Just John et Dom Dias lui a permis de faire exploser son énergie et les a rendus impossibles à quitter des yeux. » – NOW Magazine, 16 nov. 2018
  • « Ils ont déjà généré un niveau de “hype” irrésistible, incluant des spectacles à guichets fermés et des offres par des maisons de disques. » – Exclaim, 30 avril 2019
  • « Un mariage sonore parfait… Le duo torontois fait d’importantes vagues depuis sa création grâce à quelques chansons et vidéoclips remarquables, dont notamment l’incroyable “Soundboi”. » – Complex, 21 avril 2019

« C’est un processus très indépendant et autonome », poursuit John. « Dom crée un beat ; je lui fais confiance pour ça, et lui me fait confiance sur la manière de l’interpréter et d’écrire les paroles. Nous sommes ouverts à la synergie collaboratrice qui peut exister dans cet espace négatif. Nous sommes constamment en train d’éditer nos trucs. “Comment pouvons-nous améliorer ce morceau ? Comment pouvons-nous le rendre plus cool ? Ooooh, ça c’était une erreur. Ooooh, cette erreur est de la bombe ! On peut s’en servir.”

Puisant son inspiration dans divers genres musicaux comme le hip-hop et le punk tout en canalisant leur énergie frénétique et tapageuse, le duo a récemment lancé son EP intitulé Don III ainsi qu’un vidéoclip pour « Pull Up ». Ils travaillent également à la production du nouvelle musique qu’ils décrivent comme une combinaison « de l’énergie frénétique d’un mosh-pit et d’un merveilleux rêve éveillé ». Et pas question pour eux de tenter de se conformer au « son de Toronto ».

« On n’est jamais en mode “essayons de sonner comme ça” », affirme Dom, qui n’hésite pas une seconde à utiliser des sons de caisse claire complètement déjantés ou des barrissements d’éléphants afin de transporter l’auditeur dans un univers sonore audacieux. (Les éléphants ne touchent pas de redevances pour leurs barrissements, avoue-t-il en riant.) « C’est toujours “essayons de créer une émotion”. »

John est tout à fait d’accord. « On fait des trucs qu’on aime. On crée des vibrations. Il doit y avoir quelque chose d’innovant, il faut être visionnaire. Il faut accepter que ce n’est pas tout le monde qui va comprendre du premier coup, il faut être son propre porte-étendard. Si on s’inspire de nos contemporains, on est déjà en retard. »



Le récital de fin d’année du Regent Park School of Music en fut un que les étudiants n’oublieront jamais.

Le torontois Frank Dukes, l’un des rois de la production de musique pop contemporaine avec des collaborations avec les plus grands noms de la musique — Camilla Cabello, Drake et Post Malone — a passé trois jours avec les étudiants du RPSM, en hiver 2018-2019, pour l’enregistrement de Parkscapes, une approche caritative de sa propre initative révolutionnaire, Kingsway Music Library.

Frank Dukes (alias Adam Feeney) a révolutionné le domaine des échantillonnages en créant sa propre librairie de « loops » atmosphériques et éthérées pour lesquelles il octroie des licences afin de contourner le long processus de libération des droits. La prémisse de Parkscapes, qui est disponible par le biais de Kingsway, était que Dukes fournirait des échantillonnages et des arrangements exclusifs tandis que les jeunes du RPSM joueraient les instruments.

« C’était des trucs qui étaient déjà écrits », explique Dukes au téléphone depuis Los Angeles. « J’avais enregistré des démos au piano et d’autres trucs que j’ai faits moi-même. J’enseignais ensuite les accords aux jeunes et on trouvait des idées d’arrangements. Si je jouais du piano, par exemple, ce que vous entendrez sur Parkscapes sera ces jeunes qui chantent ou jouent une mélodie de steel-drum. Même écriture, arrangements différents. »

Dukes confirme que tous les revenus de Parkscapes seront versés directement à l’école. « Alors, disons que quelqu’un souhaite utiliser ces échantillonnages pour une chanson de Drake. Ils paieront les droits et ces revenus seront versés à l’école, puis, comme pour le reste des échantillonnages de ma librairie, des redevances suivront. Au fil des deux prochaines années, ces redevances serviront à financer le programme. »

Ce généreux geste de Dukes ne pouvait arriver à un meilleur moment étant donné les coupures majeures du financement des arts et des organismes à but non lucratif qu’a imposées le gouvernement conservateur de Doug Ford.

Dukes explique que son vieil ami Rana Chatterjee, un ancien animateur d’émission hip-hop à la radio et directeur de création adjoint pour l’agence publicitaire BBDO Canada à Toronto, l’a approché avec cette idée. « Au début, il me semble qu’il voulait proposer une idée du genre « Sample School » où je demanderais aux jeunes de Regent Park School of Music de venir jouer pour moi afin que j’utilise leur musique dans une de mes librairies, et on est partis de là. »

« Nous avons peaufiné l’idée et avons conclu que ce serait cool de créer une librairie musicale. C’est vraiment excitant, car il y a tout ce potentiel pour contribuer au financement de l’école, pourvu que la librairie soit populaire. Et jusqu’à maintenant, cette librairie a été utilisée par Drake, Kendrick Lamar, Logic, et bien d’autres. »

Dukes, qui a contribué à l’essor d’artistes torontois connus comme Bad Bad Not Good, River Tiber et Mustafa, a été très impressionné par les jeunes qui ont participé à l’enregistrement. « Le degré de talent de ces jeunes est remarquable », dit-il. « Ce sont tous des jeunes très, très spéciaux et doués. De mon côté, ça me donnait l’occasion de créer un pont entre des trucs qu’ils écoutent peut-être et ce qu’ils font à l’école. »

Dukes le Grand
Frank Dukes n’a jamais été plus demandé qu’il l’est actuellement et ses projets à venir incluant ceux  de James Blake, Post Malone et, bien entendu, le deuxième album de Camilla Cabello qui paraîtra dans la foulée de son mégasuccès planétaire « Havana ».

« Ç’a été pour eux une grande révélation de constater que les possibilités sont infinies et que si on s’applique vraiment quand on est passionné, il est possible de transformer cette passion en carrière et de faire ce que l’on a vraiment envie de faire. »

L’un des effets secondaires de la production de Parkscapes a été l’enthousiasme dont ont fait preuve certains jeunes plus timides inscrits à ce programme. « Je parlais avec quelques profs peu de temps après, et ils me disaient “Wow ! C’était fou ! Certains de ces jeunes sont très réservés, on ne les entend presque jamais et ils s’impliquent peu dans leurs cours au jour le jour, mais de voir à quel point ils étaient engagés, excités et revigorés par ce projet était tout simplement génial !” Je suis vraiment heureux que nous ayons pu vivre cette énergie le temps d’un projet. »

Dukes, qui a vendu son premier échantillonnage au rappeur américain Lloyd Banks pour la coquette somme de 5000 $, affirme que sa spécialité est l’émotion. « C’est une question de “feeling”, pour moi », confie-t-il. « Un signe qui ne trompe pas, c’est quand j’entends une chanson lorsque j’écoute une de mes “loops” et que je peux l’écouter sans arrêt sans me lasser, quand c’est quelque chose que je pourrais écouter indéfiniment. »

Dukes affirme qu’il y aura d’autres Parkscapes. « C’est un modèle que je souhaite transposer ailleurs, dans d’autres villes, d’autres pays. J’aimerais développer pour que ça devienne un projet encore plus grand que ce que je peux imaginer pour l’instant, quelque chose qui a un impact positif réel sur les jeunes, surtout dans des endroits comme Regent Park. »



Si on vous demande quel trio canadien a vendu plus de trois millions d’exemplaires de ses albums, joué à la Maison Blanche, gagné trois JUNOs et été reçu dans l’Ordre du Canada, vous devrez sans doute y penser un bon moment — ou vous demander quel président américain est un fan de Rush.

Mais il y a fort à parier que vous ne penseriez pas d’emblée à Sharon, Lois and Bram, le groupe issu de la scène folk des années 70 à Toronto et qui est devenu l’un des porte-étendards de la musique jeunesse grâce à ses chansons à répondre parlant d’éléphants, de moustiques et de chiens salés. Il est facile de tenir la musique jeunesse pour acquise, mais Sharon, Lois et Bram méritent la reconnaissance qui leur a été accordée ne serait0ce que parce qu’ils sont fait connaître plusieurs styles musicaux aux enfants, sans parler de leur avoir présenté des thématiques comme la paix, l’amour et la tolérance à travers leurs paroles.

Sharon Hampson, Lois Lilienstein et Bram Morrison étaient des musiciens de la scène folk torontoise qui se sont connus grâce à Mariposa in the Schools, un programme du festival Mariposa qui envoyait des musiciens jouer pour les enfants dans les écoles. Ils ont enregistré leur premier album intitulé One Elephant, Deux Éléphants en 1978 et sont partis en tournée l’année suivante lorsque leur album a commencé à devenir très populaire. Cette tournée s’est poursuivie, avec quelques pauses, pendant quatre décennies, propulsée par de nombreux autres albums et une émission de télé, avant d’être interrompue, temporairement, par le départ à la retraite et la mort de Lois Lilienstein. Mais voilà qu’une nouvelle génération prend la relève afin que le spectacle continue.

« Les réactions ont été magnifiques », confie Sharon. « Dès que nous commençons à chanter, les gens chantent avec nous. Nous avons rencontré tellement de gens qui nous disent avoir grandi avec notre musique et qui reviennent nous voir avec leur petite famille. Il n’y a rien de plus touchant que de les voir chanter nos chansons à leurs enfants. On ne peut pas espérer mieux. »

Mais la vie en tournée est épuisante, et Sharon et Bram vont — peut-être — prendre leur retraite à la fin de leur tournée d’adieu de 40e anniversaire à la fin de l’été. Ils ont précédé cette tournée d’un passage en studio pour enregistrer des chansons écrites par Joe Hampson, le défunt mari de Sharon et membre du groupe folk The Travellers. Puis, en septembre prochain, ils lanceront un livre inspiré de leur célèbre chanson « Skinnamarink » (adaptation originaire par Sharon, Lois & Bram) qui a été ré-enregistrée avec de nouvelles paroles par la fille de Sharon, Randi, une avocate torontoise.

Cette soudaine poussée créative a commencé lorsque Sharon et Bram ont été invités à participer à un album jeunesse enregistré par Josh Lovelace de NeedtoBreathe qui a toujours affirmé que c’est grâce à Sharon, Lois and Bram qu’il s’est tourné vers la musique. « Quand je les ai vus en studio et que j’ai constaté à quel point ils aimaient ce qu’ils faisaient et à quel point ils étaient bons, je leur ai demandé pourquoi ils n’avaient jamais enregistré en tant que duo durant toutes ces années », explique Randi. « Au même moment, il était question d’un projet de livre autour de “Skinnamarink”, et je me suis dit “Cette chanson n’est pas assez longue pour en faire un livre. Elle pourrait bénéficier de quelques ajouts – est-ce que vous me donnez la permission de tenter ma chance ?” C’est à ce moment que nous avons abordé la question d’enregistrer certaines des chansons de mon père et de les bonifier. »

Randi a écrit les paroles de plusieurs chansons avec la bénédiction de Sharon et Bram. « Je m’amuse à bidouiller les paroles de chansons depuis de nombreuses années », raconte-t-elle. « Quand j’étais étudiante en droit, je réécrivais des chansons pour un spectacle de variétés. Quant à “The Colour Song”, je savais qu’il fallait inclure un couplet au sujet d’un arc en ciel. Ça me semblait la bonne chose à faire. Ç’a été vraiment incroyable d’avoir la confiance de maman et de Bram et d’avoir la chance de faire connaître la musique de mon père. C’est une expérience incroyable d’être dans la salle et de les entendre chanter mes textes. »

Ces autres chansons, qui seront toutes lancées en simple, sont « The Hug Song », « Different » et « Talk About Peace » où Jim Cuddy a été invité à chanter. « Je suis réellement ravie quand j’entends la voix de Jim », confie Sharon. « Quel magnifique chanteur ! »

« Different », qui se veut une célébration de la diversité à l’aide de strophes comme « It would be an awful shame if everyone were the same » (librement, pour la rime : ce serait vraiment dommage si tout le monde avait la même image), a été lancée pour coïncider avec la participation de Sharon et Randi dans le défilé de la Fierté, à Toronto, en juin dernier. « C’est tellement un message important », affirme Sharon. « On se dit que les choses s’améliorent et qu’on ne devrait plus avoir besoin de ces messages, mais les messages dans les chansons de Joe continuent d’être nécessaires. »

Plusieurs indices laissent croire que Sharon n’a pas complètement fermé la porte sur un éventuel retour. « Toute cette route, ça ne me manquera pas, mais je vais m’ennuyer énormément de monter sur scène pour chanter avec les spectateurs », avoue-t-elle. « Je ne sais pas ce que l’avenir nous réserve, mais je sais qu’on n’a pas fini de chanter. »