« Je me suis lancée en musique à cause de problèmes de santé, confie Céleste Lévis, l’auteure-compositrice de 26 ans originaire de Timmins, en Ontario. J’ai eu une chirurgie au cerveau à l’âge de 14 ans parce qu’il appuyait sur ma colonne vertébrale. Aujourd’hui, ça ne va pas super bien. Je subis des traitements une fois par semaine (allers-retours à Toronto) pour enlever la douleur. Mes maux à la tête se rendent parfois jusqu’aux jambes. Les seuls moments où je ne ressens pas de douleur, c’est lorsque je chante sur l’adrénaline. Mais ce n’est pas le fun juste après. Et c’est pour ça que j’écris des chansons : pour avancer ! »

Celeste LevisSi tu veux tout savoir, son quatrième album qui vient de paraître ne s’encombre pas de l’inutile et aligne d’emblée huit chansons homogènes dans un format folk-rock de bon aloi. Un fagot ficelé pendant la pandémie avec son mari, le multi-instrumentiste Marc-Antoine Joly qui a réalisé les confidences de la chanteuse dans le studio aménagé dans le sous-sol du couple qui habite désormais à Ottawa.

« L’objectif, admet Lévis, était de s’approcher d’un rock indépendant, avec un son de drum plus assumé, des chansons plus pop, on voulait surtout un projet en band », elle qui est habituée aux duos.

Des chansons d’amour ? « J’aime rester vague là-dessus, ce n’est pas vraiment un disque sur les relations amoureuses, nous dit la nouvelle mariée. Elles témoignent des douze derniers mois sur le plan personnel, si tu veux tout savoir sur moi, faut les écouter ! »

Il ressort de ce travail peu commun une véritable personnalité, tous ses textes sont réunis par un fil conducteur, par une ambiance, un climat. « J’arrive en studio avec les mélodies, les accords et le texte. En pandémie, j’avais ce questionnement : est-ce que j’ai déjà tout dit, tout chanté ? J’avais cette crainte-là. »

Les guitares s’épousent pour le meilleur et en tirant la quintessence de sa voix de tête : « j’ai toujours eu une voix plus grave, j’ai compris cette fois-ci que c’est un instrument, je me suis poussé davantage avec des notes plus nuancées et des mélodies plus complexes. J’avais peur de cette voix de tête, maintenant je la découvre. » Même si l’on ne débusque pas de chansons révolutionnairement novatrices, on sent une influence majeure chez elle, le duo américain The Civil Wars et bien d’autres charmantes contradictions.

Elle habite dans Hochelaga-Maisonneuve en 2015, époque où elle est candidate à La Voix. Moisi Moé’ssi de Fred Fortin est l’une de ses interprétations, elle triture sa Gibson SG-200 avec minutie. « Même si ce n’était pas ma chanson, elle me représentait bien. J’avais déjà participé à des concours comme Ma Première Place des Arts (2013) et le Festival international de la chanson de Granby (révélée à Ontario Pop). Suite à La Voix, elle est signée chez Tandem musique : en première partie de Francis Cabrel, elle enfile dix-huit spectacles. Six chansons en vingt minutes chaque soir.

C’est difficile de chanter en français dans le nord de l’Ontario ? Et ce, nonobstant du legs musical de Robert Paquette ou du groupe Cano, par exemple ? « Contact ontarois, le pendant de Rideau au Québec, et le Gala Trille Or aux deux ans permettent une meilleure visibilité, le contexte est plus favorable qu’avant pour les auteurs et compositeurs de la province. J’ai aussi eu la chance d’enregistrer des sessions live au studio Madame Wood à Montréal en pleine pandémie pour propulser les chansons de mon album Donnes-moi le temps (2018). Je suis sereine de ce côté, les réseaux de communication et de promotion sont de plus en plus efficaces ».

« La petite communauté francophone se retrouve en Ontario, même à dix heures de route ! On est privilégié parce qu’on n’est pas un grand nombre d’artistes à y œuvrer, mais en contrepartie, il n’y a souvent qu’une salle par ville où l’on peut jouer et une fois que tu es passé, ça peut prendre 3-4 ans avant d’y revenir », déplore-t-elle.

Un album de Noël paru en 2020 et baptisé Noël Tout autour s’est glissé dans son écriture de chansons en temps de pandémie. Elle y reprend même Marie-Noël de Robert Charlebois. Avec des mots qui grimpent au ciel. Elle les présentera sur les routes de l’Ontario, avec un détour par Montréal.