Aucun doute, Steven Lee Olsen est le type à voir le verre à moitié plein. Plutôt que de se laisser emporter par la déception de voir ses spectacles estivaux annulés en raison du coronavirus — spectacles qui lui auraient permis de promouvoir ses quatre nouvelles chansons lancées en mars sur son étiquette SLO Circus —, il a mis son autre chapeau, soit celui d’auteur-compositeur très demandé pour des stars du country.

Joint au téléphone à Nashville, Olsen confie que le confinement a été très bénéfique pour sa créativité. « Toutes mes collaborations se font via Zoom ces derniers temps, et j’ai commencé à écrire pour moi de plus en plus », dit-il. « La majorité des chansons sur lesquelles j’ai travaillé récemment m’ont permis d’aller plus loin, d’écrire des couplets complets et de commencer à bâtir la chanson dans mon studio. Au lieu de simplement présenter un titre ou une idée, je peux présenter un couplet ou une ébauche et de dire “voici de quoi ça pourrait avoir l’air”. Les interprètes aiment ça. »

C’est en 2004, qu’Olsen a quitté Newmarket, en Ontario, pour s’installer à Nashville, mais c’est véritablement en 2017 qu’il a finalement été admis dans le cercle des meilleurs auteurs-compositeurs de Nashville. Il a coécrit le succès No.1 de Kip Moore « More Girls Like You », mais la pièce qui l’a vraiment mis sa carrière en mode turbo est l’album double-platine de Keith Urban « Blue Ain’t Your Color ». Elle a été nommée Chanson de l’année par la NSAI et simple de l’année aux CMA en plus de recevoir deux nominations aux Grammys. Et c’est sans parler des 274 millions de visionnements de la chanson sur YouTube.

« Le titre m’est venu en plein milieu de la nuit », se souvient Olsen. « Je me suis réveillé pendant une trentaine de secondes et il m’est apparu en tête, alors je l’ai écrit. Quand la créativité s’empare de vous, il faut s’emparer d’elle. Je crois que j’ai habituellement une fenêtre de 20 minutes pour vraiment saisir une idée, un concept, un “beat’ de batterie, un ‘riff’ de guitare ou des paroles qui me viennent en tête. Si tu ne surfes pas sur cette vague, tu vas la rater. »

Cette chanson qui allait changer sa vie devait initialement figurer sur son premier album sur un « major ». Columbia Nashville l’a mis sous contrat en 2014, mais des changements à la maison de disques ont vu l’album sur lequel il travaillait depuis un an tabletté. « “Blue’ aurait sans doute été mon prochain simple », confie Olsen. « Ça m’a brisé le cœur, mais en fin de compte, c’est une des meilleures choses qui me soit arrivée, puisque ça m’a permis de la proposer à Keith. Tout le monde savait que c’était une bombe, mais ça n’a quand même pas été facile de la laisser aller. »

« Si tu ne surfes pas sur cette vague, tu vas la rater »

Le prix de la NSAI qu’il a reçu représente beaucoup pour lui. « Recevoir ce prix de tes pairs quand t’es un auteur-compositeur, il n’y a pas de meilleure sensation », dit-il.

Outre ces deux succès aux palmarès américains, Olsen a également coécrit « Drop », le « hit » certifié platine de Dallas Smith, ainsi que des chansons pour Garth Brooks, Billy Currington, Rascal Flatts, The Judds, Emerson Drive, Craig Morgan, Melissa Lawson, et d’autres. 

La nature fondamentalement optimiste d’Olsen lui a donné le courage de s’établir à Nashville pour y poursuivre son rêve alors qu’il n’avait que 19 ans. « Tous mes amis étaient à l’université, mais moi je ne pensais qu’à la musique », se souvient-il. J’étais si jeune et je ne réalisais pas que je pouvais échouer, et ça me semblait une aventure très emballante. Je n’avais aucun plan B. »

Steven et la SOCAN

Prix No. 1 SOCAN
* « Drop » — interprétée par Dallas Smith — palmarès Nielsen BDS Country — 8 août 2019
* « Blue Ain’t Your Colour » — interprétée par Keith Urban — palmarès Nielsen BDS Country et Billboard Hot Country Songs — 28 nov. 2016 et 19 nov. 2016
* « Raised by a Good Time » — Interprétée par Steven Lee Olsen — palmarès CMT Canada Countdown — 3 avril 2015

Camp de création SOCAN/CCMA
Camp de création SOCAN/CCMA 2020, du 19 au 24 janvier 2020
Olsen raconte : « Je participais au camp en tant qu’interprète. On écrivait tous une chanson pendant la journée puis le soir venu on se réunissait dans cet immense chalet en bois rond pour écouter nos chansons et prendre un verre. C’était génial de voir tout le monde dans sa zone et je me suis fait plusieurs belles amitiés. »

Prix Musique country SOCAN
* « Raised by a Good Time » – 2016
* « Make Hay While The Sun Shines » – 2011

Il a immédiatement signé un contrat d’édition, une coentreprise avec son gérant de l’époque, Ron Kitchener de RGK Entertainment Group et ole, mais ça ne voulait pas dire que tout était rose. « Je ne gagnais même pas assez d’argent pour payer mes assurances automobile, et je me faufilais dans les bureaux de ole après leur fermeture pour y dérober du papier de toilette et des collations », admet-il. « Je n’ai pas connu le succès avant de nombreuses années, mais j’aimais sincèrement ce que je faisais. J’ai dû écrire 1000 chansons pourries avant d’en écrire une bonne. »

« Même avant de commencer à recevoir des chèques de redevances, la SOCAN a joué un rôle crucial pour moi grâce à son programme d’avances qui m’a permis de m’en sortir. C’est une bouée de sauvetage incroyable pour les interprètes et les auteurs-compositeurs ; je suis très fier de pouvoir dire que la SOCAN est mon organisation de droit d’exécution. » (voir encadré)

Olsen a lancé son premier EP en tant qu’artiste solo, Introducing Steven Lee Olsen, en 2009. Deux simples, « Now » et « Make Hay While the Sun Shines » se sont inscrits aux palmarès canadiens, et cette dernière a remporté un prix SOCAN en 2011. Il connaîtra de nouveau le succès en 2014 avec son simple « Raised by a Good Time » qui a été certifié or au Canada. Puis, en 2018, il a signé un nouveau contrat d’édition avec Rhythm House. « Cette compagnie est une coentreprise entre Roc Nation, de Jay-Z, et Warner/Chappell Music », explique-t-il. « Ça me parlait de signer avec eux à cause de la diversité de mon écriture. J’aime écrire des chansons Top 40, pop et rap. »

Après l’avoir presque rencontré une fois, Olsen est impatient de pouvoir un jour enfin rencontrer Jay-Z, mais comme il le dit en riant, « j’imagine que si je finis par lui rapporter assez d’argent, ça finira par arriver ! »

Olsen ne peut pas encore nous dire qui elles sont, mais de grosses vedettes country ont déjà enregistré ou réservé plusieurs autres de ses co-créations. Il y a donc fort à parier que ses chances de rencontrer Jay-Z continueront d’augmenter !



Membres de la SOCAN ! Vous êtes-vous déjà demandé qui prend les décisions qui peuvent influencer le cours de votre carrière ? Dans cette série d’articles intitulée Décideurs/Décideuses, le magazine en ligne de la SOCAN vous présente des entrevues avec certains de ces décideurs/décideuses afin de découvrir ce qui les fait courir.

« Je ne peux gérer que des artistes qui touchent mon âme ». C’est écrit tel quel sur le site web de Comme C’est Beau, la petite entreprise culturelle d’Emmanuelle Girard fondée au mois de mars 2019.

À peine arrivée pour l’entrevue dans son café préféré de la Petite-Italie, elle affirme tout de go : « je connais mes limites personnelles comme humain, et là, je suis ‘’topée’’ à mon max avec les trois filles. Je crois au polissement du joyau ».

Elle ajoute : « je sais que j’ai une personnalité intense et que je fais les choses à fond comme lorsque j’étais encore athlète. Je ne suis pas une mélomane, je n’aime pas tant que ça aller voir des shows. J’écoute Chilly Gonzales en boucle, un peu de jazz et blues le soir, c’est tout ».

Emmanuelle Girard, Alexandra Streliski C’était avant la pandémie. Elle préparait son voyage à Saskatoon avec Alexandra Stréliski (grâce à son disque Inscape sur le label montréalais Secret City Records) pour le gala canadien des Junos. Trois nominations, un duo en direct avec Dallas Green (City and Color), ça regardait drôlement bien pour la pianiste néo-classique qui venait de rafler trois Félix. On a refait le point récemment.

« Les plus créatifs vont s’en sortir, faut être flexible. Je n’ai pas eu de dates d’annulés pour l’instant, mais je travaille autant qu’avant, il faut toujours mettre dans la balance le bien-être de l’artiste. Mais j’ai ‘’freaké’’ au début. Nous étions déjà sur place depuis quelques jours pour préparer son numéro. On avait choisi ensemble son kit de tapis rouge, celui de scène… La plus grande qualité pour quelqu’un qui travaille en musique c’est l’adaptation ».

« Quand l’artiste a du succès, ensuite c’est gérer la demande. Dans le cas d’Alex, on reçoit beaucoup de demandes de gratuité, de fondations, d’écoles ou de jeunes qui font des vidéos sur YouTube et demandent une licence pour utiliser sa musique. On en donne beaucoup ».

Emmanuelle Girard, Maude Audet« Dans le cas de Beyries, on devait sortir son deuxième album au printemps, mais elle n’était pas prête alors on a tout décalé ». Qu’à cela ne tienne, le développement à l’international est bien amorcé avec Stréliski et Beyries.

« Beyries (en licence chez Bonsound) a obtenu plus de 12 millions d’écoutes sur Spotify pour sa chanson The Pursuit of Happiness qui a connu beaucoup de succès en Turquie; elle a joué dans une salle de 150 personnes à Istanbul qui connaissaient par cœur la chanson !  Et la synchro, ce marché indispensable aux éditeurs de musique ? « C’est ça qui l’a mis sur la carte. Elle a fait une reprise en 2016 de la chanson de Paul Daraîche, Je pars à l’autre bout du monde et ça s’est retrouvé dans Unité 9 ! ».

Maude Audet, qui a fait paraître Tu ne mourras pas (Grosse boîte) en février dernier est, selon Girard, très ‘’France-années 70, Francoise Hardy,’’ dans sa facture musicale. « Mon travail est avec elle est vraiment différent, c’est un projet entièrement francophone. On se fait des meetings et elle m’envoie par la suite un recap de notre conversation ! »

Avant de lancer la carrière de Beyries en 2015, elle a entre autres travaillé pour le Canadien de Montréal pour finalement aboutir chez Cossette, la prestigieuse boîte de publicité. « Être conseillère en gestion entre le client et les créatifs, c’est exactement ce que je fais en ce moment ».

Emmanuelle Girard, BeyriesAncienne joueuse de handball avec l’équipe canadienne, Girard, 40 ans, a mis fin à sa carrière d’athlète d’élite à l’âge de 28 ans. Prise sous son aile par Sonia Cesaratto (à l’époque relationniste de presse chez Universal France), puis par Brigitte Matte (Anacrouse) qui gérait les musiciens Yann Perrau, Michel Rivard et Catherine Major, elle a fait ses classes dans deux excellentes écoles, avec deux femmes chevronnées.

Girard a même demandé à Jacques Primeau d’être son mentor. Primeau, plus occupé que la moyenne des ours (RBO, Tout le monde en parle, Quartier des spectacles, agent d’artiste et maintenant directeur général chez Spectra) a tout de suite vu le potentiel de Girard. Les deux ont formé un partenariat à l’automne 2019.

« Grâce à lui, on a fait une demande de subvention commune à la SODEC parce que mon entreprise est trop jeune pour être éligible à certaines subventions. Il m’aide à chercher des sous. Mais on n’est pas partenaires d’affaires, je suis la seule actionnaire de mon entreprise. Les Productions Jacques K Primeau mettent à disposition son adjointe avec laquelle je parle souvent. Jacques m’aide à me structurer et à grandir ».

« Mon modèle d’affaires, c’est que je voyage avec mes artistes, je vois ce qui se passe sur le terrain, je rencontre les gens, je comprends mieux la business. Je suis une fille de St-Lambert-de-Lévis qui vient d’une famille modeste et je suis fière d’être une ‘’self made woman’’.



Ça n’aura pas été facile.

Les artistes de studio d’enregistrement, les musiciens, les interprètes et les auteurs-compositeurs n’avaient pas vu venir la suspension soudaine des spectacles en direct. Pour dire la vérité, nous avons encore du mal à nous adapter.

Malgré l’incertitude qui règne face à l’avenir, plusieurs essaient de profiter le mieux possible de cette période de temps libres que personne n’avait prévue – et de continuer de créer dans des conditions qui sont loin d’être idéales.

 

Maintes fois récompensé aux galas des prix Grammy pour la musique latine et des prix JUNO, Alex Cuba fait ce qu’il faut pour rester à flot.

« Il y a des hauts et des bas », concède-t-il depuis chez lui à Smithers, en C.-B.  « Il y a des bons jours et des mauvais jours. Quand je suis d’attaque, je continue de faire mon métier, j’écris des chansons, je m’enregistre. Je produis une musique positive et réconfortante, et c’est une chose dont on a besoin plus que jamais à l’heure actuelle. »

Mais Cuba, dont le dernier simple, « Concéntrica Canción », sort le 12 juin, admet que la pandémie a éveillé chez lui des sentiments qui l’ont surpris.

« Cette période me donne le goût de me montrer plus ouvert et plus vulnérable que jamais face à ma musique », explique-t-il. « J’ai horreur de quitter mon public sur une vibe triste : j’arrive à voir le bon côté des choses dans tout ce que je fais. Aujourd’hui, avec la quarantaine, j’éprouve un regain de créativité, peut-être à cause de ces longues vacances de luxe qui nous sont offertes », conclut-il en éclatant de rire.

 

L’artiste de la côte Est Rose Cousins, de son côté, n’avait présenté que deux spectacles de la tournée de promotion de son album Bravado quand le gouvernement a subitement fermé les salles. « Il m’a fallu deux mois pour me réorienter », raconte-t-elle, bien que la transition entre la scène et l’écriture ait été moins difficile pour elle grâce à la tradition qu’elle observe normalement en juin.

« D’ordinaire, à ce temps-ci de l’année, je me retrouve avec des amis bostonnais dans un atelier d’écriture qui se tient dans une île du New Hampshire », explique-t-elle. C’est la première fois en dix ans que ça n’a pas lieu. J’ai également collaboré à l’écriture de six chansons sur Zoom pour ne pas perdre la forme. Pour moi, le mois de juin est le temps des fleurs. »

Comme Cuba, Cousins s’acclimate au jour le jour à la réalité actuelle.

« C’est une adaptation continue », reconnaît-elle. « J’aimerais avoir une idée précise de mon attitude face à ce qui se passe actuellement et pouvoir comprendre ce que tout cela veut dire. C’est pas comme si la pandémie était terminée et que je pouvais maintenant en faire des chansons. Mon lien avec moi-même n’est plus pareil. Je passe beaucoup de temps seule avec moi-même, et c’est ce qui m’a permis de composer une bonne partie de mon dernier album, mais ça ne veut pas dire que je me sens complètement à l’aise dans ma solitude actuelle parce que ce n’est pas moi qui l’ai choisie. »

 

Rejoint à Los Angeles, Robert Alfons, du TR/ST, ne semble pas regretter que son isolement l’ait empêché d’entreprendre la tournée de promotion de Destroyer Part II, le dernier album du groupe. « Ça me laisse beaucoup plus de temps pour élaborer des idées, et j’arrive mieux à me concentrer quand j’ai moins de choses à faire en dehors de ma cour », confesse-t-il.

Ses collaborations le tiennent occupé, et il compte lancer divers projets durant cette transition forcée. « Je préfère les albums, mais les œuvres de plus longue haleine et les collaborations m’intéressent également », précise-t-il. « J’ai beaucoup de trucs à lancer. Mais c’est sûr que ça ne sera pas un album. »

Alfons s’adapte bien à la simplicité de son quotidien. « Quand on me dit de rester chez moi et de créer des choses parce qu’il est hors de question qu’on parte en tournée, il y a là quelque chose de positif et de productif pour moi. »

 

 

Nate Hilts, de Dead South, raconte qu’il a adopté une attitude attentiste quand la pandémie a éclaté. « Sur le coup, je suis entré en état de choc », avoue-t-il. « Pour être honnête, j’ai laissé ma guitare de côté parce que je ne comprenais pas ce qui nous arrivait. Mais nous avons discuté avec notre gérance de ce que nous pouvions faire comme groupe, et nous avons filmé quelques vidéoclips en isolement. »

Hilts explique que, en ce moment, il a autre chose en tête que la créativité. « On avait prévu de passer 2020 en tournée et de prendre congé durant l’hiver pour entreprendre la composition d’un nouvel album », raconte-t-il.

Au lieu de ça, Hilts tâche de reprendre son souffle. « Je ne vous mentirai pas, ça fait des années que je suis incapable de passer un petit bout de temps à rien faire à la maison », confie-t-il. « On a un rythme de deux mois de travail suivis de quelques jours de relâche depuis des années. Ça finit par épuiser un gars. Tu ne te rends même pas compte de ta fatigue. J’ai commencé à prendre de saines habitudes de vie et repris contact avec ma famille et mes amis, et j’en profite pour m’améliorer.

« J’en connais plusieurs qui font la même chose ces temps-ci. »