Pour une deuxième fois dans sa carrière, Jenna Andrews semble bien partie pour la gloire.
L’une de ses premières réussites majeures fut une collaboration directe sur le mégasuccès Butter de BTS en 2021, aux côtés de son complice Stephen Kirk et d’autres collaborateurs — qui a remporté un prix Prix de Musique Pop SOCAN en 2022 et un Prix No. 1 SOCAN en 2024. Aujourd’hui, elle surfe sur le phénomène de l’été 2025, le film d’animation KPop Demon Hunters (produit par Netflix), pour lequel elle et Kirk ont signé deux pièces mémorables, « Free » et What It Sounds Like.
À quel point le film coréalisé par la Torontoise Maggie Kang fait-il fureur? Centré sur Huntr/x, un trio pop fictif de chasseuses de démons, KPop Demon Hunters cumule plus de 266 millions de visionnements à ce jour! Depuis sa sortie en juin 2025, c’est tout simplement le film le plus regardé de l’histoire de Netflix, toutes catégories confondues — animation, films en anglais, et au classement général. Et les deux chansons signées Jenna Andrews et Stephen Kirk? Ensemble, elles ont franchi le cap des 350 millions d’écoutes. L’album de la bande originale a atteint la première place du classement Billboard Top 200. Rien que ça.
« Ça n’a juste pas de bon sens! », nous a confié récemment Jenna Andrews depuis Graffiti Sound, le studio et base des opérations de la maison de disques qu’elle partage à Nashville avec son complice Stephen Kirk. « Stephen et moi on se disait que c’est peut-être le plus gros projet auquel on a jamais participé. C’est incroyable : le film est sorti depuis même pas trois mois, et j’ai l’impression que ça ne fait que commencer. »
À la demande du patron de Sony Pictures, elle et Kirk ont travaillé pendant deux ans sur le projet avant son lancement, une aventure qui a été ponctuée de quelques défis.

Cliquez sur l’image pour démarrer la vidéo de la chanson Free, tirée de KPop Demon Hunters sur YouTube
« Je pense que ce que [le coréalisateur] Chris [Applehans] et Maggie voulaient vraiment dès le départ, c’était un film porté par la musique, explique Andrews. C’est l’approche qu’on a choisie, les chansons ont servi à écrire le film. Ils écrivaient le scénario pendant qu’on écrivait les chansons. »
Comme nous l’a raconté Jenna Andrews, c’est la chanson Free qui a été écrite en premier. « Free s’est faite très vite », se souvient-elle. « On a écrit une première version, et ils étaient ravis. » En revanche, What It Sounds Like a été le fruit d’un processus plus complexe. « Stephen a dû produire 147 versions, parce que c’était la chanson finale, celle qui devait boucler toute l’histoire. Ça a pris un an et demi. »
Grâce au succès de KPop Demon Hunters, qui a même eu droit à une brève sortie en salle et donné naissance à un spectacle en aréna, Andrews croit que son duo créatif est en bonne position pour l’avenir des groupes pop animés et mythologiques qui risquent de devenir la nouvelle tendance. « Je pense que ce phénomène est là pour une bonne dizaine d’années », affirme-t-elle.
KPop Demon Hunters n’est que la plus récente réussite à ajouter au palmarès de Jenna Andrews, qui s’est d’abord fait connaître comme autrice-compositrice-interprète chez Def Jam Records. Même si elle a connu un modeste succès avec Tumblin’ Down, elle a vite compris qu’elle préférait travailler dans les coulisses. « En 2013 ou 2014, ils ont décidé de ne pas renouveler mon contrat et c’est à ce moment-là que j’ai commencé à prendre l’écriture de chansons vraiment très au sérieux », se souvient-elle.
« Le défi, quand tu connais un tel succès, c’est de le répéter »
Elle a collaboré avec le duo R&B torontois Majid Jordan, contribué au développement de Lennon Stella, puis, en 2018, s’est jointe à la maison de disques RECORDS de Barry Weiss – ancien cadre de Jive Records et Universal Music Group – à titre de consultante en A&R, avant de cofonder avec lui la maison d’édition TwentySeven Music Publishing. Sa réputation s’est solidement établie grâce à ses collaborations avec des artistes comme Drake, Sabrina Carpenter, Noah Cyrus et d’autres — tant comme autrice-compositrice qu’en production vocale.
C’est en 2020 qu’elle connaît son véritable premier grand succès avec Supalonely, , une chanson coécrite et interprétée par Benee. Elle est constamment demandée depuis. « C’était ma première chanson à se rendre dans le Top 10 des radios pop, et après ça, ç’a été un véritable tourbillon pendant deux ans avec l’aventure BTS. Il y a eu Dynamite [pour laquelle elle a produit les pistes vocales, mais n’a pas participé à l’écriture], Permission to Dance, Butter, puis Heartbreak Anthem de Little Mix. Depuis Benee, j’ai vraiment l’impression que tout s’enchaîne avec une énergie incroyable. »
Cette lancée l’a menée à collaborer avec Ed Sheeran, David Guetta, Jessie Murph, Jennifer Lopez, Nelly Furtado et Mickey Guyton, et, ultimement, à vendre son catalogue à Warner Chappell Music Publishing en 2024. Andrews et Kirk récemment ont ouvert Graffiti Sound et y ont organisé des camps de création en plus de fonder une maison de disques du même nom.

Cliquez sur l’image pour démarrer la vidéo de la chanson What It Sounds Like tirée de KPop Demon Hunters sur YouTube
Andrews, qui explique recevoir des propositions et des invitations de la part de sa maison d’édition, de ses imprésarios et d’artistes, affirme que le statut de « A » rend les choses à la fois plus simples et plus complexes à mesure que sa carrière progresse.
« C’est très simple : le défi, quand tu connais un tel succès, c’est de le répéter, n’est-ce pas? Tu te concentres sur des détails complètement différents quand tu arrives à un niveau de compréhension comme le nôtre, même si on parle seulement de la production vocale. Prends le producteur suédois Max Martin ; il n’écrit que huit chansons par année, mais elles deviennent toutes des Numéros 1, et il y a une raison pour ça. Il peut passer un mois ou deux à peaufiner une phrase, mais le résultat final en vaut la chandelle », explique-t-elle.
« Quand j’écris une chanson spéciale, l’idée initiale me vient dans les 20 premières minutes, mais la minutie, les aspects techniques et tous les détails qui bouclent la boucle, et ensuite la préparation des pistes vocales et la production en tant que telle, tout ça prend deux ou trois mois pour que ça prenne la forme qu’on veut. C’est crucial d’accorder une grande importance aux détails si on veut qu’une chanson soit un “hit”. Mais ça arrive qu’on soit super chanceux, comme pour “Supalonely” qu’on a pondue en une heure et qui était très proche de sa version finale. Ce genre de cas est très rare. »
Il va sans dire que son ancienne vie d’artiste interprète et sa carrière parallèle de productrice de pistes vocales informent quand même son travail d’autrice-compositrice. « Tu finis par connaître les trucs et les pièges, surtout quand tu travailles directement avec l’artiste interprète » dit-elle. « Il y en a qui jouent toujours à la police de la chanson. Ça se voit tout de suite quand un artiste n’aime pas vraiment une idée, mais il y a des auteurs qui insistent pour l’imposer, ou qui étouffent complètement l’inspiration dans la pièce. »
« Et en production vocale, tu proposes différentes contre-mélodies et certains ad-libs pour créer une dynamique particulière, et ça finit par faire partie de la chanson. Même un ad-lib tout simple peut même devenir l’un des passages les plus accrocheurs de la chanson. Donc, la production vocale, ce n’est pas juste du montage, c’est en grande partie de l’arrangement. »