Lorsque T. Thomason faisait des siennes lorsqu’il était enfant, ses parents l’envoyaient réfléchir dans sa chambre et ils se tenaient en silence de l’autre côté de la porte en supprimant leurs rires tandis qu’ils l’écoutaient écrire des chansons tristes au sujet de sa situation. « Ils m’écoutaient chanter ma tristesse d’être si tannant » rit-il en se remémorant ces moments. « J’ai toujours écrit des histoires et des chansons avant même de savoir écrire. »

T Thomason

Aujourd’hui âgé de 23 ans, Thomason utilise toujours l’écriture comme moyen de se comprendre et de comprendre le monde qui l’entoure. Originaire de la Nouvelle-Écosse, il a lancé son premier album, Through the Static, à l’âge de 14 ans et est parti en tournée un peu partout dans la province avec le soutien actif de sa mère, l’actrice et auteure Shelley Thompson, bien connue pour son rôle de Barb Lahey dans la très populaire série Trailer Park Boys.

Cet album lui a valu deux nominations de Music Nova Scotia en plus de donner une direction claire à sa carrière musicale en pleine ascension à mesure que ses chansons grimpaient dans les palmarès en plus d’être utilisées dans des séries télé comme Degrassi : The Next Generation. Ses albums suivants, Beauty Queen (2011) et Columbus Field (2014) lui ont valu de nombreux honneurs et prix, notamment celui de jeune artiste de l’année aux Canadian Folk Music Awards en 2011.

« Chaque fois que je mettais la main sur une guitare, j’écrivais une chanson complète en une heure ou deux », se souvient-il au sujet de son style créatif des débuts. « Et je ne changeais rien. Elles sortaient d’un trait. Chaque fois que je prenais une guitare. »

Mais à mesure qu’il vieillissait et prenait la mesure du monde qui l’entoure, sa créativité musicale ralentissait. C’est alors qu’il travaillait dans un centre d’aide pour les jeunes itinérants que Thomason est entré dans une phase d’introspection et qu’il a entrepris une hormonothérapie à la testostérone afin de changer le genre qu’on lui avait assigné à la naissance.

« Je n’écrivais plus et je m’en sentais coupable », se souvient-il. « Je me sentais détaché de ma carrière musicale. Je n’osais même pas regarder ma guitare tellement je me sentais coupable. »

Mais par-dessus tout, il était inquiet du changement de sa voix en raison de son hormonothérapie. « Quand on commençait à prendre de la testostérone, on courait le risque de ne plus jamais pouvoir chanter — du moins, c’est ce qu’on croit. Les gens y croient dur comme fer », dit-il avant d’expliquer qu’il ne trouvait peu ou pas de ressources étayant ses recherches.

« Je me sentais comme si j’allais devoir choisir entre deux choses dont j’avais besoin pour survivre », se souvient-il. « Ce n’était pas amusant. »

« Tout le monde doit trouver une façon de faire correspondre leur vie intérieure avec la version externe de leur personne telle que le reste du monde la voit. »

Il a fait connaissance avec Lucas Silveira du groupe The Cliks qui a vécu la même transition, en plus de retenir les services du coach vocal Ali Garrison avec qui il travaillait plusieurs fois par semaine tout au long de cette transition.

C’est finalement en avril 2015 qu’il a dévoilé sa nouvelle identité avec ses fans dans un message d’une grande candeur sur Facebook et qu’il a entrepris de redonner un sens à tout cela grâce à la musique.

« Il y a plusieurs chansons qui sont issues de différentes étapes de cette époque », dit-il. « J’essayais de comprendre tout ce qui était arrivé. C’est la seule façon que je connaissais pour tenter d’y arriver. Il est facile de sentir qu’on a perdu le contrôle de soi-même et de son avenir dans une telle situation… De se sentir incertain au sujet de ce qui va vous arriver et de l’impact sur votre carrière. »

En 2016, il a lancé de manière indépendante son premier EP sous son nouveau nom, Sweet Baby, et il l’a lancé de nouveau en 2017 sur le label Coax Records de Rae Spoon. Thomason travaille actuellement à la création d’un album qu’il espère lancer au début de 2019. Le premier extrait, « Bliss », etait lancé en août 2018.

Citant des influences aussi diverses que Joan Jett, Bob Dylan et Carly Rae Jepsen, il travaille sur cet album en compagnie de Dave Henriques de Coalition Music, à Toronto et décrit le processus comme étant « collaboratif d’une manière que mon travail n’a jamais été auparavant ». Il affirme que Henriques, qui est également coauteur des pièces en plus d’être réalisateur, l’a forcé à sortir de sa zone de confort afin d’explorer de nouvelles avenues et de trouver sa nouvelle identité musicale.

« On ne s’est pas assis pour écrire des chansons ; Dave m’a aidé à les exploser et à les réarranger », explique l’artiste. « Il m’a appris à relaxer et à laisser les choses aller là où elles le veulent. J’ai appris des leçons incroyables, personnellement et musicalement. Il y a eu beaucoup de chevauchements. »

Thomason confie que ses expériences des dernières années lui ont fait grandement apprécier la recherche d’honnêteté, tant en musique que dans la vie.

« Je souhaite faire partie d’une catégorie de musiciens qui sont les porte-étendard d’une attitude honnête », dit-il. « Pas question de produire et de vendre un produit de consommation facile à digérer. Nous mettons notre auditoire au défi de se regarder dans le miroir lorsqu’il écoute notre musique. »

Mais Thomason se dépêche d’ajouter que même s’il est fier de faire partie de la communauté LGBTQ, il veut éviter d’être identifié comme artiste s’adressant à un seul auditoire : « Je ne veux surtout pas m’aliéner quiconque est touché par ma musique simplement parce qu’il ou elle n’est pas “queer” ou trans. »

Au contraire, il croit que son propre parcours afin de se trouver en tant que personne et en tant que musicien lui a permis de réaliser que chacun d’entre nous cherche sa place dans le monde.

« Tout le monde doit trouver une façon de faire correspondre leur vie intérieure avec la version externe de leur personne telle que le reste du monde la voit », croit-il « C’est difficile pour tout le monde. »