La Bronze n’est pas tout à fait une nouvelle venue sur la scène montréalaise. Un premier EP autoproduit est paru en 2012. « J’avais fait ça à la bonne franquette, c’était pour moi une carte de visite. » Lancé en septembre dernier, son premier album complet homonyme ne risque pas de passer inaperçu.

Née à Montréal de parents marocains, Nadia Essadiqi, mélomane aux goûts éclectiques, de Lhasa à James Blake en passant par les Black Keys, a grandi dans l’Outaouais à Aylmer, puis s’est ré-enracinée à Montréal. Sa pop décloisonnée est aux confluents des genres : textes forts. par moments slammés, angles rock, touches d’électro qui évoquent les claviers de Metronomy. La principale intéressée parle aussi « d’accents trip hop. » 

« Le bronze est à la fois doux et rough, sale et propre. J’aime la poésie qui en découle. »

Cette fusion des genres culmine sur Explose-moi, une chanson dans laquelle La Bronze donne tout, s’arrache le cœur de la poitrine et l’offre encore tiède et fumant à l’élu :

J’aurais voulu être celle que tu veux toujours pour dessert
J’aurais voulu être celle qui te manque même quand je suis là
J’aurais voulu être celle que ta mère préfère

Elle déclame avec une fougue juvénile et on la devine magnétique sur scène, où elle joue de la batterie debout, flanquée d’un claviériste et d’un guitariste. Les occasions de la voir à l’automne se sont faites plutôt rares considérant la rumeur qui s’est mise à bourdonner autour d’elle (plus de 28 000 téléchargements de La jeunesse féline sur iTunes!), mais on aura plus de chances de la voir à l’hiver et au printemps 2015.

« Oui je te le confirme. J’ai changé de booker. Je me sens en confiance avec l’équipe actuelle. Je n’ai pas vraiment d’attentes, je ne sais pas trop comment les choses sont supposées se dérouler, à quelle vitesse, ni dans quel ordre. J’apprécie ce qui m’arrive et je suis prête pour la suite, » dit celle qui a eu l’occasion de présenter en juin son spectacle devant des membres de l’industrie musicale de Los Angeles. La Bronze s’est produit dans le cadre de trois showcases organisés par la SOCAN, notamment sur la mythique scène du Sunset Marquis Hotel. « Super expérience, ma musique a été bien reçue là-bas et le fait que je chante en français ne freine rien, même qu’il semble y avoir un préjugé favorable… Ils ont trouvé ça exotique! »

Si La Bronze était moins présente sur scène à l’automne, on a pu voir Nadia Essadiqi dans Le cœur animal, une pièce qu’elle a signée et jouée au Théâtre La Chapelle à la fin d’octobre et qui traite des mêmes thèmes que ses chansons : passion fulgurante, pulsion amoureuse, désir, quête de liberté… « J’ai écrit la pièce et les chansons de l’album en même temps! » C’est par le jeu que l’artiste de 28 ans a initié sa trajectoire d’artiste. On peut la voir aujourd’hui dans les téléséries grand public comme 30 vies et Toute la vérité aussi bien qu’au cinéma, dans Incendies par exemple, où elle joue « un petit rôle de secrétaire un peu bitch, un moment cocasse dans le grand film de Denis Villeneuve. »

« Parallèlement à tout ça, j’ai toujours été attirée par la musique. J’ai commencé à en faire lorsque je suis venue m’établir à Montréal, avec des groupes de percussions de rue, c’est par les rythmes que je suis arrivée à la musique. De fil en aiguille, jouer de la percussion m’a donné envie d’écrire mes chansons et de les chanter. » Nadia Essadiqi est une instinctive; en chanson et en art dramatique, sa démarche est surtout autodidacte, avec quelques cours privés et ateliers de perfectionnement.

Alliage de cuivre et d’étain, le bronze est connu pour sa résistance à la corrosion et ses propriétés de conductivité électrique. On en fait des armes, des médailles, des bijoux. « Moi j’aime ce que ce nom évoque : l’idée du métal et de la couleur vibrante, les contrastes. Le bronze est à la fois doux et rough, sale et propre. J’aime sa sonorité, la poésie qui en découle. »

Retenez ce nom et cette (jolie) tête. L’âge de Bronze a commencé.

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En cette époque où la découverte d’artistes – interprète de variété aussi bien qu’auteurs-compositeurs du champ gauche – se fait notamment via différents concours où leur talent est mis en lumière, La Bronze a elle aussi tenté sa chance… En vain. « J’ai soumis ma candidature trois années de suite aux Francouvertes et je n’ai jamais été retenue. À un moment donné, je me suis dit que j’allais y arriver autrement, en passant par un autre chemin. J’étais un peu déçue, mais finalement, j’ai lâché prise et j’ai tourné la page. »



Écoutez les albums de Kiran Ahluwalia, de Kashish-Attraction à Sanata: Stillness, et vous remarquerez l’évolution unique de cette auteure-compositrice primée qui a enchanté les auditeurs partout à travers le monde en traversant les frontières musicales avec élégance, intrépidité et une qualité artistique hors du commun.

Ahluwalia dit de Sanata qu’il s’agit « de la réalisation de nombreuses idées musicales que je préparais depuis longtemps .» Ces idées prennent racine dans les genres musicaux indiens et pakistanais dans lesquels elle joue depuis toujours, et particulièrement le ghazal, cette forme très ancienne de chanson d’amour dont les couplets et refrains riment. Mais ses chansons reflètent également son intégration très personnelle des sonorités du blues saharien qu’on a vu poindre sur Wanderlust (2007), son quatrième album. « Je suis complètement en amour avec ces sonorités », se remémore-t-elle. « Ce blues africain très électrifié et groovy tout en étant très relax me parlait et j’ai commencé à l’explorer en profondeur. »  Son cinquième album, primé au prix Junos, Aam Zameem: Common Ground (2011) mettait d’ailleurs en vedette deux collaborations avec deux groupes de musiciens touaregs, et l’aventure se poursuit.

« Jamais je n’aurais cru que je réussirais à vivre de la musique ».

« Avec Sanata: Stillness, j’ai voulu créer un hybride en collaboration avec ces musiciens touaregs où j’approchais leur musique d’une perspective indienne, mais en demeurant au sein de mon propre groupe. » Dans ce processus d’hybridation entre le blues saharien et la musique indienne, Ahluwalia s’attarde d’abord aux rythmes avant de laisser mélodies et paroles trop prendre forme, puis elle présente ses idées au guitariste et arrangeur Rez Abbasi pour un échange créatif avant de faire intervenir tablas, claviers et autres éléments jazz.

Sanata: Stillness est également une première en ce que l’écriture d’Ahluwalia est désormais à l’avant-scène. « Sur mes trois premiers albums, j’ai découvert d’incroyables poètes ghazal à Toronto, des gens nés au Pakistan et que je n’aurais jamais rencontrés si je n’étais pas déménagée ici. J’étais vraiment privilégiée d’avoir accès à un tel coffre aux trésors de textes », explique-t-elle. Toutefois, tandis que sa palette musicale s’élargissait au fil des trois derniers albums, elle a également vu sa plume devenir plus active. « J’ai commencé à écrire des poèmes qui s’accordaient avec les mélodies que je composais, le besoin était là », explique l’artiste.

Pour elle, la musique est au centre de sa vie depuis sa plus tendre enfance. Elle a commencé à étudier la musique en Inde et a poursuivi ses études une fois établie à Toronto avec sa famille, alors qu’elle avait neuf ans. Puis, après avoir obtenu son diplôme universitaire, elle a effectué un court passage sur le marché du travail, elle est retournée en Inde pour y poursuivre ses études en musique pendant un an.

« C’est à ce moment que j’ai vraiment eu la piqûre », rigole celle qui est désormais établie à New York. Ainsi, pendant près d’une décennie, elle partageait son temps en Inde où elle étudiait la musique de manière intensive pendant plusieurs mois, et le Canada, où elle revenait pour gagner suffisamment d’argent pour son prochain voyage. Et pendant tout ce temps, elle donnait des spectacles et enrichissait son répertoire. « Jamais je n’aurais cru que je réussirais à vivre de la musique», confie-t-elle. « Je voulais habiter au Canada, mais j’étais convaincue que jamais je n’arriverais à vivre de la musique en chantant dans une autre langue .»

Ahluwalia traduit les paroles écrites en urdu dans le livret de ses albums, mais ses chansons ont une éloquence qui va bien au-delà des langues et vous touchent droit au coeur.

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Les commendes provenant d’autres artistes – particulièrement celles de la danseuse Jahanara Ahklaq et de la violoniste Parmela Attariwala – ont marqué un tournant pour Kiran Ahluwalia. «Ça m’a donné un erre d’aller», raconte-t-elle. «On m’encourageait à créer pour moi-même, mais je trouvais cela difficile, notamment parce que ma formation en musique indienne classique était axée sur son aspect improvisation. Puis sont arrivées ces personnes qui avaient certains critères, une date de livraison et qui croyaient beaucoup plus en moi que je ne le faisais moi-même à l’époque. Mais après cela, j’ai appris à aimer la composition.»



Il a assuré la première partie d’artistes tels que Robert Plant et Willie Nelson et il a accompagné les Feist, Kathleen Edwards et Jason Collett.

On pourrait donc s’attendre, en toute légitimité, qu’Afie Jurvainen, mieux connu sous le pseudonyme de Bahamas, en aurait marre d’être à 6 mètres du bord de la scène afin de pouvoir montrer au monde qu’il sait faire plus que les chœurs ou l’accompagnement à la guitare grâce à son jeu précis et savoureux.

« J’écrivais des chansons bien avant que ça devienne ma profession et je suis sûr que je continuerai à en écrire bien après aussi. »

Il y a quelques années, donc, Bahamas a choisi de se concentrer sur sa propre musique, ce qui explique, de toute évidence, le titre de son troisième album, Bahamas Is Afie. Tant et tellement qu’il dit de cet album que c’est « une version pleinement accomplie de moi-même. » Bahamas précise toutefois qu’il voulait dire par là que c’était lui qui avait joué la plupart des instruments sur l’album.

« Pas tous, mais une si grande majorité que cela confère un ton particulier à l’album », explique l’artiste. « ‘est une façon risquée d’enregistrer qui peut facilement verser dans le narcissisme et l’égocentrisme. Je ne sais vraiment pas si je vais tenter l’expérience de nouveau, mais j’ai tout de même eu bien du plaisir à l’essayer .»

Bahamas raconte que pendant l’enregistrement de son album, « j’ai commencé à utiliser une méthode de réalisation très amusante où je me demandais à moi-même, par exemple « qu’est-ce que le Van Morrison des années 80 ferait s’il était le réalisateur de cette pièce? » ou encore « que ferait John Williams avec cette même pièce? » L’artiste raconte qu’il cherchait ainsi à repousser les limites de ce qu’il avait en tête au moment de l’écriture.

« Très souvent, on finit par se rendre compte que notre instinct premier était le bon et on revient à l’idée de départ », avoue Bahamas. « Toutefois, c’est une occasion en or d’expérimenter avec différentes directions musicales et c’est un processus très agréable. Par contre, je n’aime pas vraiment l’étape du mixage, même que souvent je n’y participe tout simplement pas. C’est à l’étape de l’enregistrement que je fais toutes mes expérimentations. »

C’est ainsi que son côté givré, ludique, est devenu un album mieux apprécié avec des écouteurs et qui regorge de magnifiques arrangements, de flaveurs très variées et bien sûr, de la voix désinvolte de Bahamas. Vu le nombre incroyable de chansons traitant des affaires du cœur, nous avons voulu savoir comment l’auteur-compositeur parvient à écrire des chansons sur les relations de couple sans tomber dans les clichés.

« Les gens écrivent des chansons d’amour depuis la nuit de temps, c’est un sujet intarissable, mais la seule façon d’en parler de manière légitime et unique est de parler de notre expérience, de notre point de vue », nous confie l’artiste. « Même si c’est « ma » chanson, j’espère que les auditeurs pourront s’y identifier. »

Alors, comment Bahamas aime-t-il se retrouver à l’avant-scène?

« Disons simplement que je n’ai pas encore eu de mégasuccès ou de vidéoclip ultra populaire, alors ma vie au jour le jour n’est pas différente de ce qu’elle était il y a 12 ans. J’écrivais des chansons bien avant que ça devienne ma profession et je suis sûr que je continuerai à en écrire bien après aussi. »

Faits saillants
Éditeur : Downtown Songs DLJ
Discographie: Pink Strat (2009), Barchords (2012), Bahamas is Afie (2014)
Site web:  www.bahamasmusic.net
Membre de la SOCAN depuis 2002

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« J’ai rencontré Carlin Nicholson et Mike O’Brien au secondaire. Ils étaient une année au-dessus de moi et je les admirais beaucoup, musicalement. Nous avons commencé à jouer ensemble et à nous enregistrer et c’est ainsi qu’un tout nouveau monde musical s’est offert à moi. Des musiques originales! Écrire des chansons! Ces deux gars-là m’ont énormément inspiré et m’inspirent encore 15 ans plus tard. Ils sont occupés par Zeus et moi je fais autre chose, mais nous sommes toujours aussi proches, nous écrivons et jouons toujours ensemble. Ils ont changé ma vie quand j’avais 16 ans et je leur en serai éternellement reconnaissant. »