La saison KILLY bat son plein.

Cinq ans après sa première prestation dans un club, Khalil Tatem, alias KILLY, de Scarborough, fait tout un tabac : ses pièces, dont notamment « Killamonjaro » et « No Romance », lancées en 2017, accumulent des écoutes et visionnements qui grimpent dans les huit chiffres.

Aujourd’hui, à la veille du lancement de son album indépendant de 11 pièces intitulé Surrender Your Soul et d’une tournée estivale qui le verra se rendre aussi loin que Varsovie, le jeune homme de 20 ans signale haut et fort au monde entier que « The 6ix » a produit un troisième innovateur R&B/hip-hop qui semble prêt à marcher dans les traces de Drake et The Weeknd.

« On parle d’un son qui est plus grand que la ville », se vante KILLY au sujet de son « flow » — inspiré de 808 s & Heartbreak où se mélangent improvisation et jargon, et où la voix est traitée électroniquement en bercée par des échantillonnages en boucle de claviers et de synthés. « Personne d’autre ne fait ça ailleurs. »

Si l’on considère la réaction du public comme épreuve de vérité, il n’a pas tort de se vanter : Collectivement, les pièces de KILLY, incluant celles lancées en 2017 ne figurant pas sur Surrender Your Soul – « Distance », « Forecast », et « No Romance » – approchent les 50 millions de diffusions en continu tandis que ses vidéos sur YouTube en récoltaient 33 millions au moment d’écrire ces lignes. « C’est cool de voir que les gens le réalisent et le remarquent enfin », dit KILLY. « Pour moi, il ne s’agit que d’une année. »

KILLY a raison lorsqu’on se limite à sa visibilité et au nombre grandissant de ses fans. Mais lorsqu’on s’attarde à la progression de sa carrière, comme il le souligne lui-même dans « Surrender (Intro) », il a « donné son premier show à 15/sorti son premier vidéo à 16 » (Had my first show at the end of ’15 [yeah]/First video came summer ’16 [yeah]). De vastes pans de Surrender Your Soul portent sur son ascension fulgurante, et le fait que cet album soit lancé de manière indépendante sur sa propre étiquette, Secret Sound Club, est d’autant plus impressionnant.

« Killamonjaro » a été le moment décisif où KILLY n’était plus qu’une sensation dans l’underground : c’est la pièce où instinct et spontanéité se sont mariés pour mettre en valeur la magie KILLY. « Pour “Killamonjaro”, j’ai entendu le “beat” et composé la structure, et j’ai dit à mon ingénieur, “faut enregistrer cette chanson immédiatement”. On s’est réunis et on l’a fait. Rien de plus, rien de moins, vraiment. »

« J’arrive en studio, on me joue un beat, et j’écris une chanson sur-le-champ. Si elle a besoin d’un peu plus de production, on y ajoute des guitares ou des impros. Penser moins, ressentir plus. Pour moi, c’est très libre, très libéral — ça arrive comme ça, comme je le sens. Je n’écris pas de paroles, tout se fait dans le feu de l’action. Je saisis l’énergie du moment. »

Mais comme c’est le cas de la plupart des artistes, nul n’est une île. Pour Surrender Your Soul, KILLY a fait appel à une communauté de producteurs qui sont à parts égales des vedettes établies et des nouveaux venus. Dans la première catégorie, on retrouve Boi-1da (Drake, Eminem, Kendrick Lamar), Daxz (Drake, Travi$ Scott), WondaGurl (Drake, Jay Z, SZA), 1Mind (French Montana, Lil Yachty) et Wallis Lane (Drake, Logic, PARTYNEXTDOOR, Trey Songz).

Pour KILLY, le niveau d’expérience de ses collaborateurs ne l’impressionne pas. « Ça m’importe assez peu s’ils ont besoin de cette visibilité ou s’ils sont déjà très connus. Si tu fais de la bonne musique, tu fais de la bonne musique », dit-il simplement. « Je me fous si t’as 50 chansons dans le Top 100 ou pas. J’ai 16yrold qui produit pour moi (“No Romance”) et j’ai aussi Boi-1da. Peu importe l’âge, le statut social, c’est juste une belle chose lorsque tout le monde s’unit. La plus grande notoriété d’être bien établi — c’est simplement qui fait de la bonne musique. »

« J’arrive en studio, on me joue un beat, et j’écris une chanson sur-le-champ. »

Originaire de Toronto, KILLY a passé la première partie de son adolescence dans sa maisonnée barbado-philippine de Victoria, en Colombie-Britannique, avant de revenir à Toronto, il y a quelques années, obsédé par son désir de faire sa marque, inspiré qu’il était par Speaker Knockerz, Kanye West, Tame Impala, Joey Bada$$ et James Blake.

« Je fais ça depuis que je suis tout jeune », poursuit KILLY. « Je ne me souviens pas d’un moment où je ne le faisais pas. C’est la première chose à laquelle je pense en me réveillant. Ç’a toujours été comme ça, même avant que je connaisse un quelconque succès. »

Il s’est rapidement bâti un réseau de contacts en s’impliquant dans le nightlife torontois. « Ça s’est fait rapidement », dit-il. « J’ai commencé par m’imprégner de la culture, des partys et des autres créatifs. Juste comme ça, tu vois ? Et de fil en aiguille, je me retrouvais dans la même pièce que tous ces gens dont j’écoutais la musique. Ç’a fait boule de neige. »

Le secret de son succès c’est d’être en contact avec ses émotions. « La musique se base sur mon mood, sur mon énergie », dit KILLY, qui a récemment lancé son nouveau simple « No Bad No Sad ». « C’est la meilleure façon de capter comment je me sens et comment les gens autour de moi se sentent. Mon environnement, mon espace mental — tout ça est capté par les sons. »

Il fournit les mots, ses producteurs fournissent les sons. Au risque de se répéter, KILLY choisit ses liens professionnels en fonction des vibrations personnelles qu’il perçoit. « Ce sont tous des amis, et pour moi, si nous pouvons établir une connexion personnelle, nous pourrons connecter au niveau musical. Ce sont mes potes. »

Bien qu’il soit avare de détails, tout semble indiquer que KILLY se prépare à jouer un rôle de mentor et à créer sa propre dynastie. « Tout ce qu’on fait, ou le fait ensemble », dit-il. « Secret Sound Club. Tout est fait maison. » « Secret Sound Club a été fondé par KILLY et c’est le label qui publie toute sa musique », explique son relationniste. « C’est une maison de disque indépendante. Nous n’avons pas officiellement annoncé les autres artistes qui font partie de l’écurie Secret Sound Club. »

KILLY a récemment dépassé les frontières nord-américaines pour la première fois afin d’enregistrer quelques pièces en Jamaïque avec « ma bonne amie » WondaGurl. « On a passé du temps à St. Elizabeth et à Kingston et on a rejoint des musiciens locaux. J’en ai fumé du bon et les “vibes” étaient bonnes. Je peux pas me plaindre. »

Il espère lancer le résultat de ce travail à l’automne, mais d’ici là, il vit l’« état euphorique » de ses prestations devant public, public auquel il fait découvrir Surrender Your Soul. Que ses chansons portent, un jour ou l’autre, sur un autre sujet que lui-même, KILLY n’a aucun remords à se mettre ainsi en valeur.

« Personne ne nous connaît aussi bien qu’on se connaît soi-même, alors pourquoi ne pas en parler ? » demande-t-il de manière purement rhétorique. « Ce sont mes histoires qui me conviennent le mieux. »