Il serait tout à fait normal de penser que « non » ne fait pas du tout partie du vocabulaire de Jared Miller lorsqu’on jette un rapide coup d’œil aux compositions listées sur son site Web.

Jared Miller

Jared Miller, à gauche, s’amuse avec l’orchestre.

On y retrouve un total de 43 œuvres composées depuis 2006 — piano solo, longues ou courtes, pour petits ou grands ensembles — et il y a de toute évidence très peu de commandes que le musicien de 31 ans désormais établi à New York a refusées. Nous avons joint Miller le globetrotteur au téléphone alors qu’il était à Nashville, à peine revenu d’un voyage en Espagne où il a dirigé l’Orchestre national des jeunes du Canada pour l’interprétation de sa composition Under Sea, Above Sky, une commande de la Fondation SOCAN et de l’orchestre. C’est à Nashville, deux jours plus tard, qu’il assistera à la première américaine de Ricochet—Reverb—Repeat, une œuvre commandée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada pour l’orchestre symphonique de Victoria, qu’interprètera l’orchestre symphonique de Nashville.

Né à Los Angeles, Miller arrivera avec sa famille à Burnaby, en Colombie-Britannique, alors que Jared est âgé d’un an. Il est demeuré dans cette province pendant les deux décennies suivantes et il a complété son baccalauréat à l’université de la Colombie-Britannique. « À ma grande surprise et pour mon plus grand bonheur, on m’a ensuite accepté dans le programme de maîtrise de Julliard. Je suis donc déménagé à New York il y a neuf ans et après avoir complété ma maîtrise, je me suis inscrit au programme de doctorat en musique. J’y suis resté encore cinq années et depuis je suis pigiste. » De 2014 à 2017, pendant l’obtention de son doctorat, il était compositeur en résidence de l’orchestre symphonique de Victoria et il faisait régulièrement la navette entre New York et la Colombie-Britannique.

Et n’allez pas croire que l’objectif de Miller était la productivité : la constance de la qualité de ses compositions le dément avec éloquence. En 2012, il a remporté le Morton Gould Award d’ASCAP et la Juilliard Orchestra Competition et il a remporté le Prix de la Fondation SOCAN pour les jeunes compositeurs en 2011, 2015 et 2019.

Quel est donc le secret de cette impressionnante créativité ? « Je ne peux pas me concentrer sur une seule chose pendant très longtemps, je suis comme ça », explique-t-il. « Ça veut dire que j’entreprends plusieurs projets, parfois même plusieurs de front. » Mais ce n’est pas seulement la quantité et la qualité du travail de Miller qui sont impressionnantes. C’est avant tout son éclectisme et son intelligence créative.

Traffic Jam, la première commande qu’il a reçue, était destinée aux Jeux olympiques d’hiver de Vancouver en 2010. On pourrait penser qu’un jeune compositeur qui reçoit sa première commande lucrative aurait tendance à écrire quelque chose de sérieux, monumental et héroïque pour un tel événement athlétique. Non : « j’ai écrit un morceau satirique au sujet des problèmes de congestion et de construction avec lesquels Vancouver a dû composer en raison de la tenue des jeux », explique Miller. Traffic Jam a depuis été jouée par des orchestres symphoniques partout dans le monde.

En 2017, il a reçu une commande de l’orchestre symphonique de Toronto et de l’orchestre symphonique de Victoria, et le résultat, Buzzer Beater, est une ode musicale aux Raptors de Toronto où les musiciens imitent les trompettes et les sifflets que l’on entend lors d’un intense match de basketball.

Toujours en 2017, Miller a été engagé par l’orchestre symphonique de Détroit et il a écrit une œuvre intitulée Lustre. « On m’a donné carte blanche », raconte-t-il. « J’ai donc fait mes recherches au sujet de la riche histoire musicale de Détroit. Il s’est concentré sur les sonorités de du house et du techno, des genres musicaux nés dans cette ville. “J’ai voulu réimaginer et recréer les différents sons que l’on entend dans le techno, mais dans un contexte orchestral”, explique le musicien.

Les mois à venir verront Miller faire des apparitions un peu partout au Canada — 27 octobre à Hamilton, 10 décembre à Montréal, 29 janvier 2020 à Winnipeg — et il n’y a aucun doute que de nombreux projets sont à prévoir. “Quand je ne travaille pas sur plusieurs œuvres en même temps, je suis toujours en train de penser à plusieurs œuvres”, confie le prolifique compositeur. “C’est comme ça que je fonctionne le mieux.”