Pour Dan Swinimer, la clé d’une collaboration musicale réussie est le respect mutuel. « Il faut respecter tout le monde, d’abord et avant tout », dit-il. « À moins qu’on vous donne une raison d’agir autrement, cela tombe sous le sens, non?? De plus, le pouvoir que vous accordez aux jeunes artistes, auteurs ou producteurs lorsque vous leur donnez confiance en eux et les inspirez à persévérer est incommensurable. »

L’auteur-compositeur, producteur et propriétaire de Manicdown Productions établi à Victoria, en Colombie-Britannique possède une vaste expérience prouvant le bien-fondé de son approche, ayant écrit, produit et tourné avec plusieurs groupes dont les lauréats du concours Vancouver Seeds — présenté par la station 99,3 The Fox — Superbeing et Beyond the Fall, ainsi que Todd Kerns avant de joindre les rangs de Jet Black Stare (JBS), en 2007.

« Nous avons été mis sous contrat chez Island/Def Jam et tout semblait aller pour le mieux. Notre premier simple s’est rendu sur le Top 30 aux États-Unis. Puis la récession est arrivée et tout s’est arrêté pratiquement du jour au lendemain. On faisait la première partie des plus grands groupes au monde, et le lendemain tout était fini. »

La pilule a été dure à avaler, mais en cours de route, Swinimer a croisé la route de gens qui ont cru en lui et l’ont respecté, ce qui lui a redonné confiance. « C’est pour cette raison que je suis passé de créateur médiocre à créateur à succès », croit-il. « Respecter les gens est la bonne chose à faire à tous les niveaux et — sivous l’analysez sous cet angle —, c’est bon pour les affaires, car ça inspire les gens à donner le meilleur d’eux. »

« Jamais je ne travaillerai avec des gens avec qui je n’ai pas envie de travailler, peu importe leur talent ou leur succès. »

Miner le moral d’une personne sans relâche en décourage plus d’un à abandonner leur carrière artistique. C’est ce qui lui est presque arrivé. « Je suis rentré de la dernière tournée de JBS totalement déconfit. C’était une tournée digne de Spinal Tap. » La tournée de JBS avait de nombreuses dates canadiennes, mais JBS n’y attirait pas les foules. « Les promoteurs nous criaient dessus et nous disaient que nous étions surpayés », raconte-t-il. « Ce fut une expérience humiliante. »

Après cette désastreuse tournée, Swinimer a décidé de quitter le show-business. Peu de temps après, toutefois, il a composé une chanson intitulée « Welcome to the World » pour sa fille de quatre ans. C’était la première fois depuis belle lurette qu’il créait par pur plaisir. Il l’a fait parvenir à ses parents qui eux l’ont fait parvenir à la cousine de Dan, Stephanie Beaumont, une chanteuse country bien établie qui a sont tour l’a fait parvenir à Ron Kitchener, le directeur de RGK Entertainment et d’Open Road Recordings.

Et c’est ainsi que tout a changé. Sur la foi de quelques autres chansons qu’il a fait parvenir à Kitchener, une série de séances de création ont été organisées à Nashville. Alors qu’il séjournait là-bas dans la Maison SOCAN, il a fait la connaissance est est devenu ami avec l’auteur-compositeur professionnel Tim Hicks, un artiste avec qui il a fréquemment collaboré depuis.

« J’étais vraiment excité à l’idée de ne plus laisser la musique me prendre en otage », raconte-t-il. « Ça m’a libéré d’une grande quantité de stress, et je me suis retrouvé devant cette opportunité et j’ai décidé de tenter ma chance, mais à une seule condition non négociable : Jamais je ne travaillerai avec des gens avec qui je n’ai pas envie de travailler, peu importe leur talent ou leur succès. » Il applique depuis une seule règle, sans exception : « Aimez ce que vous faites et ceux avec qui vous le faites. »

Prenez l’exemple du premier contrat offert par Manicdown Productions, en 2011 : il s’agissait d’un contrat de développement avec Madeline Merlo, une jeune artiste de 17 ans qu’il a réussi à mettre sous contrat chez Open Road en plus d’une entente d’édition chez Rogue 11 Publishing de Nashville. Les deux premiers simples de Merlo, « Sinking Like a Stone » et « Alive » ont été produits et coécrits par Swinimer et sont devenus des succès radio au Canada, méritant même à Swinimer et Merlo un prix aux Canadian Country Music Awards et de nombreuses nominations au British Columbia Country Music Awards.

« Je crois que ce que je recherche dans un artiste est différent de ce que la plupart des gens recherchent », confie Swinimer. « Madeline est douce, gentille et, de toute évidence, elle est bourrée de talent, mais elle a également un petit quelque chose auquel je suis sensible : lorsqu’elle entre dans une pièce, on a l’impression que quelqu’un vient d’allumer la lumière. Elle possède un charisme naturel qui ne s’apprend pas. »

Bien que Dan Swinimer ait passé la majorité de sa carrière dans le monde du rock, il a grandi dans un environnement baigné par la musique country. Son père était maniaque de country et il passait tous ses étés en Nouvelle-Écosse, chez des membres de sa famille musiciens, dont notamment son grand-oncle Fiddlin » Jim Swinimer, un violoneux intronisé au Panthéon de la musique de la Nouvelle-Écosse qui a tourné avec Hank Snow.

Peu importe son passé rock, la majorité des gens avec qui Swinimer a collaboré depuis sa première visite à Nashville sont des artistes country, incluant Tim Hicks, Heather Longstaffe, Elizabeth Lyons, Billy Currington, Lanie McAuley, Danica Bucci et Jojo Mason.

Jojo Mason

Le chemin qui a mené à la conclusion d’une entente de développement avec Mason, en 2014, est le fruit d’une étrange série d’événements. « J’avais une séance d’écriture ce jour-là et nous nous creusions la tête au sujet d’une des phrases, “sipping moonshine out of a jar” (librement, siroter de la bagosse dans un bocal), ce que je faisais dans ma jeunesse, mais le mec avec qui je collaborais trouvait que la phrase n’avait aucun sens. Le même soir, je me suis rendu dans une fête de Noël, et Jojo est arrivé avec un bocal de bagosse dans les mains. J’ai commencé à parler avec lui et on a pris des “selfies” afin de les envoyer à cet artiste avec qui j’avais collaboré plus tôt. »

Tout comme Merlo, Mason avait le même je-ne-sais-quoi. « Il a illuminé la pièce et en a complètement changé l’atmosphère », raconte Swinimer. « Tout le monde est attiré par sa présence. » Bien que Mason était un fan de musique country, il n’avait jamais chanté pour d’autres auparavant, mais Swinimer percevait une telle énergie émanant de lui qu’il a organisé une séance de création.

Comme Dan Swinimer allait le découvrir, Mason a une voix exceptionnelle. « J’aimerais prendre le crédit de son talent vocal et permettre aux gens de croire que je suis le génie qui a créé un chanteur à partir de cet artiste qui n’avait jamais chanté auparavant, mais je ne peux pas. On a peaufiné certains détails, mais 90 % de ce que vous entendez lorsque vous entendez Jojo Mason, il le possédait avant qu’on se rencontre. »

« Une des choses les plus difficiles lorsqu’on travaille avec quelqu’un qui n’a jamais écrit de chansons auparavant, c’est de les convaincre qu’il n’y a pas de mauvaises idées. »

Offrir des opportunités aux jeunes artistes bourrés de talent est incroyablement important, affirme Swinimer. Lorsqu’il a commencé à collaborer avec Madeline Merlo, elle n’était pas auteure-compositrice. Il a suggéré qu’elle travaille sur cet aspect du métier en lui expliquant que ce serait pour elle une tout autre expérience de chanter ses propres mots et que plus elle développera son talent, plus elle pourra aisément gagner sa vie grâce à la musique.

Madeline Merlo« Une des choses les plus difficiles lorsqu’on travaille avec quelqu’un qui n’a jamais écrit de chansons auparavant, c’est de les convaincre qu’il n’y a pas de mauvaises idées », confie Swinimer. « Certaines de mes meilleures idées sont nées de mes pires idées. C’est très fréquent. »

À l’inverse, jouer la carte égocentrique « j’ai connu le succès et pas toi est contreproductif. Je respecte les gens qui ont connu le succès, mais lorsque vous êtes dans la même pièce afin d’y collaborer, tout ce qui compte c’est de faire sortir le meilleur de cette personne. Et la première et plus importante chose à faire afin de faire sortir ce qu’ils ont de meilleur c’est qu’ils se sentent en confiance, il faut que vous accordiez de l’importance à leurs idées et créiez une atmosphère où ils pourront sans crainte émettre une idée qui ne fonctionne en apparence pas. Ces idées sont importantes. Peut-être qu’elles ne serviront pas dans le produit final, mais elles pourraient influencer la façon dont on aborde la chanson. »

« C’est le résultat final qui compte », dit-il. « Tout ce que vous faites est dans le but d’arriver à un produit fini dont vous êtes fiers et qui touchera les gens. Je travaille beaucoup avec des artistes qui n’ont pas beaucoup d’expérience en tant qu’auteurs-compositeurs. Les voir grandir — ce processus de développement — est ce dont je suis le plus fier. »

« M est devenue une auteure-compositrice incroyable et une des personnes avec qui je préfère collaborer, pourtant la première fois qu’elle s’y est mise, elle était réservée et nerveuse. Il fallait que je creuse pour lui soutirer des idées. Maintenant, elle a une plume incroyable et elle écrit la majorité de ses chansons. On ressent une sorte de fierté paternelle lorsqu’une personne avec qui vous avez travaillé, une personne que vous avez observée travailler fort et en arracher, grandit et connaît le succès. Ainsi, cette décision que j’ai prise à mes débuts de ne travailler qu’avec des gens avec qui j’ai envie de travailler, parce que je m’y suis tenu, a fait basculer ma carrière et ma vie. »