Corb Lund n’est pas le genre d’artiste qui écrit des chansons country en suivant une recette. Non. Cet auteur-compositeur albertain prend toujours grand soin d’explorer tout un éventail de styles et de sujets sur ses enregistrements, et son plus récent, Cabin Fever, ne fait pas exception à la règle.

Cela est notamment attribuable à sa démarche artistique lorsqu’il écrit des chansons, une démarché qui est aussi influencée par son côté « country boy » que par l’approche DYI de son ancien groupe, les alt-rockers The Smalls. « Lorsqu’il est question de démarche, j’ai beaucoup plus en commun avec les groupes indie rock » explique Lund. « C’est une scène musicale où l’on vous encourage à trouver votre propre voix, et plus elle est étrange, mieux c’est. »

Il n’y a aucun doute que Lund possède sa propre voix, sans parler d’un talent hors pair pour raconter des histoires hors du commun, ce qui lui a valu de nombreuses accolades, dont notamment le prix CCMA de l’artiste Roots de l’année pendant sept années consécutives (2004 à 2010) et un auditoire de plus en plus vaste au Canada, en Australie, au Royaume-Uni, en Irlande et en Europe. Et grâce à la parution, en 2009, de Losin » Lately Gambler et de ce nouveau Cabin Fever en 2012 sur étiquette New West Records, sa popularité chez nos voisins du sud a été portée par une vague de fond.

« J’essaie d’écrire sans arrêt, mais parfois ça ne vient tout simplement pas. Certaines de mes chansons sont tout simplement meilleures que d’autres. Je rejette beaucoup de trucs. »

La majeure partie de Cabin Fever a été créée à la suite du décès de son oncle et de l’échec d’une relation à long terme tandis que Lund s’était isolé dans un chalet qu’il s’est construit au pied des Rocheuses. Et bien qu’il affirme que ces événements n’ont pas directement influencé les thèmes et les idées qu’il explore sur cet album, il ne nie pas qu’ils ont certainement contribué à l’atmosphère « généralement sombre » de certaines des pièces. Il n’est pas impossible, ajoute-t-il, qu’ils aient également contribué au fait que l’album lui a demandé plus de temps à écrire.

Lorsqu’il a commencé à travailler sur les chansons de Cabin Fever il y a trois ans, les choses ne bougeaient pas vite. Mais plus le moment d’enregistrer les chansons approchait, plus de nouvelles pièces se manifestaient, incluant celle qui est devenue le premier extrait de l’album, « September ». Pourquoi cela s’est-il produit? « Aucune raison particulière, je crois; c’était une simple coïncidence. Ça opère par cycles, vous savez? J’essaie d’écrire sans arrêt, mais parfois ça ne vient tout simplement pas. Certaines de mes chansons sont tout simplement meilleures que d’autres. Je rejette beaucoup de trucs. »

Et bien que Lund ait passé de nombreuses semaines isolé dans sa retraite montagnarde, cet environnement n’a été que partiellement responsable de l’atmosphère généralement sombre de l’album, comme sur « Gettin’ Down on the Mountain » et « Dig Gravedigger Dig ». « Ce serait très romantique de pouvoir dire ça, mais en réalité, tout ce dont j’ai besoin pour écrire – quand l’inspiration est au rendez-vous – c’est d’être seul. Ça pourrait aussi bien être dans un appartement en ville, mais le fait d’être isolé a quand même eu son petit effet. »

Mais en un mot comme en mille, Cabin Fever marche nettement sur la mince ligne entre sombre et lumineux. Même la meurtrière ballade « Priceless Antique Pistol Shoots Startled Owner » témoigne de l’humour décapant de Corb Lund. « J’ai toujours été amateur de disques qui ont un vaste éventail, et pas seulement du point de vue stylistique, mais aussi en ce qui a trait aux ambiances », confie-t-il. « Je crois qu’il est aussi important d’avoir des chansons sombres que des chansons amusantes. Je suis sans aucun doute un gars d’albums. C’est pour cela que j’accorde énormément de temps au séquençage des pièces. C’est vraiment important d’avoir un fil conducteur. »

Tout aussi importante a été la contribution des membres du groupe de longue date de Lund, The Hurtin » Albertans – le multiinstrumentiste Grant Siemens, le contrebassiste Kurt Ciesla et le batteur Brady Valgardson – et de l’approche qu’ils ont adoptée pour les séances d’enregistrement avec Steve Christensen.

« La moitié du temps, j’ai une assez bonne idée du résultat final que je veux obtenir lorsque je présente mes nouvelles chansons au groupe, explique Lund, mais l’autre moitié du temps, ils me surprennent et transporte la pièce dans une direction totalement différente. Cabin Fever est presque entièrement “live”, même les voix – aucune piste métronome, aucun tour de passe-passe. »