Si certains joueurs du disque québécois se désolent devant une industrie qui redéfinit ses paradigmes et où certains piliers se déplument en mode accéléré, d’autres fins renards trouvent leur compte en se tournant plutôt vers les multiples options que la nouvelle ère entraîne avec elle. En ce sens, le montréalais Jean-Phi Goncalves – entouré de quelques complices de taille –  fait fière figure avec sa boite de conception sonore XS Music. Et si la façon de faire « post-hiératique » en déroute plusieurs, le cas de cette « petite boite à musique qui fait du gros son » se démarque haut la main dans le paysage actuel.

Jean-Phi GoncalvesCréée en 2011 – alors que Goncalves venait de clore la stellaire aventure de Beast, et lançait un dernier gravé avec la formation Plaster –, l’entreprise germée lorsque l’auteur-compositeur s’est fait offrir de signer la musique du long métrage Filière 13, en rencontrant l’humoriste, acteur et réalisateur Patrick Huard sur le plateau de l’émission de télé Tout Le Monde En Parle. Voilà pour la petite histoire.

« Ensuite, tout s’est placé assez naturellement. Je ne suis pas quelqu’un qui fonctionne avec un plan trop spécifique à la base. Dans l’espèce de flot de se qui se passait à ce moment là, il y a eu des opportunités et je les ai saisi, en gros. »

Il ne fait aucun doute, selon lui, que l’ensemble de ses projets sont inter-reliés : « Plaster et Beast ont fait en sorte que les gens savaient un peu plus ce que je faisais. C’est devenu les portes d’entrées vers ce nouveau monde là – et je dirais que même encore aujourd’hui, ce sont des points qui positionnent les choses dans la tête de bien des gens. »

La « question qui tue » : Est-ce que le le créateur est devenu homme d’affaires? « Je ne fais pas du business, je fais de la musique à temps plein et je gère à temps partiel. Disons que je fais 25% d’administration pour 75% de création. »

Si l’on compare les démarches du créateur au sein d’un groupe et celle de créer un pitch pour un client, comment on distingue la chose? « Quand je crée pour des projets, quels qu’ils soient, il y a des contraintes et des paramètres qui définissent les élans de la création. C’est un défi ou un enjeu, selon la perspective. Il y a des moments où c’est quelque chose de très bénéfique parce que je crois fermement qu’il n’y a pas pire personne que soi-même pour se mettre des barrières. Si on prend le cas du cirque, il y a des numéros qui guident la création. »

« Dans le cas d’une pub, ils débarquent souvent avec des éléments très spécifiques en main, sinon carrément des musiques qui les inspirent… Donc parfois, ça facilite les choses, tu atteints plus vite le bull’s eye, mais à d’autres moments, les paramètres choisis ne sont pas nécessairement les bons, ça te dirige vers quelque chose qui n’est pas toujours optimal. C’est vraiment un double tranchant. »

Récemment mandaté à la direction musicale du spectacle, l’artiste signait le troisième volet de la série hommage du Cirque du Soleil, Stone, dédié aux répertoire de Luc Plamondon (suivant Hommage à Beau Dommage, en 2015, et Tout écartillé dédié à Robert Charlebois en 2016) – en plus d’avoir aussi signé la musique originale du spectacle ID pour le Cirque Éloize il y a quelques années: « Jeannot Painchaud a tout enclenché dans mon cas avec le cirque, il aimait Beast et voulait quelque chose qui sonnait moderne. Et de fil en aiguille, on m’a approché pour le spectacle de Beau Dommage qui a donné de beaux résultats. »

Sachant qu’un album pourrait découler de l’aventure Plamondon, il la décrit comme l’un des très beaux mandats dans son parcours: « C’est sûr qu’un contexte comme celui-là est quand même assez idéal. C’est un show musical à la base alors la musique est mise au premier plan et ça m’ajoute une pression supplémentaire qui me stimule vraiment. »

Et si Goncalves ne rejette pas l’idée de revenir à un projet musical en bonne et due forme éventuellement, il se découvre un malin plaisir dans le rôle de « rat de studio » qu’il devient : « Il y a quelque chose de très éphémère en tournée. Alors qu’en studio, c’est plus palpable, c’est écoutable. C’est pratiquement comme bâtir une maison, il y a quelque chose de plus concret, et ça, ça me branche vraiment. »