Rachael Kennedy est l’une des trois membres de l’équipe de création et de production L I O N C H I L D, qui a notamment vu une de ses chansons figurer sur l’album de Britney Spears paru en 2016, qui a participé à la troisième édition du camp de création Kenekt de la SOCAN en 2017, et qui a récemment signé sa première entente d’édition avec Alex Da Kid de Kid in a Korner. Comme c’est toujours le cas, la route a été longue pour en arriver là. Voici comment elle y est parvenue, avec quelques conseils qui pourraient vous être utiles dans votre propre carrière d’auteur-compositeur :

L I O N C H I L D

L I O N C H I L D signe sa première entente d’édition avec Alex Da Kid.

Quand j’avais 14 ans, dans ma chambre à coucher, j’ai écrit ma première chanson et pleuré ma vie. C’est l’une des seules fois de ma vie où je peux affirmer sans l’ombre d’un doute que j’ai vécu une épiphanie : je serais auteure-compositrice pour le reste de mes jours. Ce que je ne savais pas, à ce moment, c’est que ça, c’était la partie facile et que j’étais sur le point d’entreprendre un voyage en dents de scie complètement fou, excitant, incroyable, épuisant et transformant d’une dizaine d’années.

Avant d’aller plus loin, je dois préciser que je n’ai jamais rencontré deux auteurs-compositeurs qui ont la même histoire de parcours, et ce que je veux souligner par là, c’est qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise manière d’aborder cette industrie musicale complètement folle et en constante évolution. Tout ce que je peux dire, c’est qu’il y a beaucoup de gens très talentueux qui tentent aussi leur chance et que la seule chose qui ne sera jamais entièrement sous votre contrôle, c’est votre motivation, alors… DANS L’FOND, MON LÉON !

La période d’hibernation
J’aime décrire la première partie de ce voyage comme une période d’hibernation qui s’est étendue de l’âge de 14 à 17 ans et durant laquelle j’ai canalisé toute mon angoisse adolescente dans l’écriture de chansons, ce que je faisais à la moindre occasion : avant l’école, après l’école, après ces horribles partys du secondaire… Cette étape est très importante, parce qu’elle portait uniquement sur l’art. Je me suis créé un style d’écriture « en ermite » et j’ai développé des instincts qui sont devenus les bases du reste de ma carrière d’auteure-compositrice.

Arrêtez de vous prendre pour un autre : collaborez
Oui, oui, on le sait tous, c’est votre art, personne ne vous comprend vraiment, vous avez un style unique, etc. Grand bien vous fasse, mais si vous souhaitez faire carrière comme auteur-compositeur, tout ça ne vaut pas grand-chose si personne ne vous connaît. Ce n’est que lorsque j’ai commencé à collaborer avec d’autres artistes que ma carrière a réellement commencé. Lorsque vous collaborez avec d’autres gens, non seulement élargissez-vous vos horizons, mais vous réseautez — vous créez des relations qui vous ouvrent des portes sur d’autres relations qui pourraient devenir des opportunités auxquelles vous n’auriez pas eu accès si vous étiez demeuré dans votre chambre à coucher à écrire des chansons avec pour seule compagnie votre guitare ; rien ne vous empêche de continuer à le faire pour satisfaire votre côté « emo ».

En corollaire, puisqu’il est question de collaboration, je m’en voudrais de ne pas souligner l’importance d’être un bon être humain comme élément clé d’une carrière d’auteur-compositeur couronnée de succès. Si vous êtes un trouduc, ou que travailler avec vous est pénible, ou que votre égo est plus gros que le studio d’enregistrement, personne ne voudra travailler avec vous. Il y a trop de gens talentueux dans cette industrie, et si ce n’est pas agréable d’être en votre présence, il y a plein d’autres auteurs-compositeurs aussi talentueux que vous qui sont plus gentils et avec qui il est plus plaisant de collaborer.

Réseautage
Lorsque j’avais 19 ans, j’ai contacté la SOCAN et j’ai dit « je veux aller à Nashville et écrire des chansons avec des auteurs-compositeurs hallucinants… Par où je commence ? » La SOCAN m’a mis en contact avec son représentant à Nashville, Eddie Schwartz, qui m’a présenté à quelques personnes et m’a expliqué les grandes lignes de la scène nashvilloise. Environ neuf mois plus tard, après plusieurs allers-retours entre Toronto et Nashville pour participer à des séances de création, j’ai décidé qu’il serait bénéfique d’élargir mes horizons vers une autre grande capitale de la musique, Los Angeles. J’ai donc réservé la Maison SOCAN de Nashville pour une semaine et la Maison SOCAN de L.A. la semaine suivante. J’ai fait mes bagages, je suis montée dans ma voiture et j’ai roulé jusqu’à Nashville, où j’ai de nouveau rencontré Eddie, et il m’a dit que puisque je me dirigeais vers L.A., je devrais envoyer mes chansons à Chad Richardson, le directeur du bureau local de la SOCAN.

Chad est devenu mon premier porte-étendard, la première personne qui a vraiment cru que j’avais du potentiel, et il s’est occupé de planifier toutes mes premières séances là-bas. Je suis tombée amoureuse de la ville et de l’énergie qui s’en dégage. De retour à Toronto, j’avais trois emplois entre mes allers-retours afin d’amasser le plus d’argent possible pour pouvoir passer trois mois à L.A. et réseauter avec le plus de gens possible et écrire autant que je le pouvais avant d’obtenir mon visa de travail afin de pouvoir officiellement m’installer là-bas. Une fois de plus, j’ai fait me bagages et roulé jusqu’en Californie, et je me suis mise à réseauter comme s’il n’y avait pas de lendemain. Je disais oui à tout. Je « bookais » deux sécances d’écriture par jour, j’ai participé à l’atelier d’écriture Lester Sill de l’ASCAP, et c’est là que j’ai rencontré des auteurs-compositeurs nommés aux Grammys et que j’ai bâti des relations que j’entretiens encore aujourd’hui. Je participais à tous les événements de l’industrie, les partys, les spectacles… J’étais partout. Et pendant ce temps, j’ai fait ma demande de visa. Trois mois plus tard, alors que j’étais avec ma sœur dans une épicerie d’une banlieue ontarienne, j’ai appris qu’elle avait été acceptée. Une fois de plus, j’ai pleuré ma vie.

Le saut 
La prochaine étape allait tout changer : je suis déménagée à L.A. À l’époque, quand je disais aux gens que j’allais déménager, tout le monde me disait que c’était immense comme projet, à quel point c’est affolant de déraciner sa vie pour s’installer à l’autre bout du continent. Pour moi, ça semblait parfaitement normal. Je n’ai pas trouvé ça affolant du tout, car je savais en mon tréfonds ce que j’avais à faire et j’étais prête à tout pour réaliser mon rêve. Je crois sincèrement que lorsqu’une passion vous anime et vous donne une direction, rien n’est hors de portée, car tenter de l’atteindre est purement intuitif et complètement naturel.

L I O N C H I L D

L I O N C H I L D avec Latthew Chaim à lédition 2017 du camp de création Kenekt de la SOCAN au Nicaragua.

N’ayez pas peur. Si vous avez peur de l’échec, ce métier n’est pas pour vous. La vie est trop courte et va beaucoup trop vite pour s’empêcher de faire quelque chose parce qu’on a peur de l’échec ou de ce que les gens vont penser de nous. Alors si vous vous lancez, il faut y donner TOUT ce que vous avez.

À L.A., je me suis rapidement liée d’amitié avec ceux qui sont devenus mes meilleurs amis et mes partenaires de création, et nous avons fondé notre boîte de création/production nommée L I O N C H I L D en 2015. Nous avons écrit des centaines de chansons ensemble et sommes même parvenus à en placer une sur l’album de Britney Spears paru en août 2016. Cela ne se serait jamais produit si nous n’avions pas passé des années, séparément et ensemble, à bâtir un réseau de relations qui finirait par nous offrir une telle opportunité. Puis, en 2017, on nous a invités à participer à la troisième édition du camp de création Kenekt de la SOCAN au Nicaragua. Puis, après une année de rencontres avec des éditeurs, il y a environ six semaines, nous avons signé notre première entente d’édition avec Alex Da Kid de Kid in the Korner.

À suivre…
L’une des leçons les plus importantes que j’ai apprises, c’est que le voyage comportera de nombreuses étapes, et elles seront probablement très différentes de ce que vous aviez imaginé, et c’est très bien comme ça ! Ayez des objectifs et une vision claire de ce que vous voulez, et où vous souhaitez être, mais demeurez ouvert au fait que le chemin pour y arriver pourrait changer en cours de route. Mais par-dessus tout, faites de la musique avec des gens que vous aimez, et profitez des petits plaisirs du métier : déconner en studio, les mauvaises prises de vos démos de voix, la galère, les réunions pas très réussies, les réunions incroyables et tous les gens que vous rencontrerez tout au long de votre route. Car, on va se dire les vraies choses : les auteurs-compositeurs sont les personnes les plus cool de la planète !