Il n’y a pas d’alchimistes dans l’industrie de la musique: personne n’a la capacité de créer une chanson en fer, d’agiter une baguette magique au-dessus de celle-ci et de la voir se transformer en or.

Il existe toutefois des compositeurs qui semblent posséder un don, qui comprennent intuitivement le point où la musique populaire croise leur vision de la zeitgeist musicale et dont chacune des pièces qu’ils composent et arrangent avec une extrême minutie connaît du succès.

Pour chaque Max Martin, néanmoins, il y a d’innombrables Max Kerman. Kerman, l’auteur-compositeur principal du groupe Arkells, aimerait bien savoir quels éléments de son écriture ou de sa composition ont permis à son groupe de devenir aussi populaire, mais, comme bien des artistes, il est pratiquement impossible d’isoler ces éléments qui créent un lien avec les auditeurs. Ils existent, et c’est tout.

« Nous n’écrivions pour personne et je crois qu’en fin de compte, c’est ce qui a rejoint les gens». – Max Kerman, Arkells

« Je crois que notre groupe a un je ne sais quoi de plus, mais je suis conscient que tous les groupes se disent sans doute la même chose », confie Kerman. « Ce qui nous a donné un coup de pouce, initialement, c’est évidemment d’avoir tourné à la radio, et nous sommes conscients que c’était essentiellement de la chance. »

Soit, mais il n’en demeure pas moins que, comme bien des groupes qui ont réussi, Arkells a su créer sa propre chance. Les membres du groupe sont venus à Hamilton pour étudier et tenter leur chance dans l’industrie de la musique et sont repartis… en fait ils ne sont jamais repartis. Ils ont obtenu leurs diplômes de l’université McMaster, ont changé le nom de leur groupe pour le nom de la rue où ils habitent dans l’ouest de la ville et, de fil en aiguille, ont fini par s’identifier à cette ville. Leurs spectacles dans des salles de taille modeste telle que The Casbah sont devenus des événements un peu plus courus d’une fois à l’autre, et de fil en aiguille, la ville a fini par s’identifier à Arkells. The Boss Is Coming, le simple qui les a fait connaître du grand public, était inspiré par les Constantines et date de la belle époque du Casbah et il était très différent de la majorité des succès rock qui tournent à la radio.

« Les groupes que nous écoutions pendant l’écriture de Jackson Square étaient tous des groupes indie », se souvient Kerman. « Constantines, Joel Plaskett, Weakerthans, Cuff the Duke – tous ces groupes ont eu une très belle carrière, ils étaient aimés de la scène indie, mais ils n’ont jamais vraiment tourné à la radio commerciale. Peut-être que la différence entre eux et nous, c’est que notre esthétique pop est mise de l’avant de façon plus évidente .»

An août 2014, Arkells a lancé High Noon, son troisième album, qui s’est immédiatement inscrit en troisième position au palmarès Soundscan. Le disque, produit par Tony Hoffer (Phoenix, M83) et dont certaines chansons ont été enregistrées par Eric Ratz (Metric), est un petit bijou aux accents pop et à la production assez polie pour plaire à la masse sans pour autant aliéner les fans indie de la première heure.

« Nous avons toujours eu la chance d’avoir une grande facilité à composer des chansons », confie encore Kerman. « Nous n’écrivions pour personne et je crois qu’en fin de compte, c’est ce qui a rejoint les gens. Maintenant, on sait que si on écrit des chansons en toute honnêteté et en suivant nos instincts esthétiques, on peut espérer qu’elles seront bonnes. »

La mécanique interne du processus de création du groupe est très fluide, car chacun des membres du groupe a sa zone d’expertise. « Chacun de nous a des opinions très fortes sur certains sujets », poursuit Kerman, « mais c’est souvent sur un sujet qui importe peu pour les autres membres du groupe. Nous nous complétons. Nous partageons tous l’opinion que ce qui compte le plus, c’est la chanson et nous devons tout faire pour être à son service. Cela signifie que si vous devez jouer quelque chose de vraiment ennuyeux pendant tout un couplet, c’est ce que vous devez faire, un point c’est tout. »

Depuis le lancement de High Noon, les gars d’Arkells ont dû faire face – avec succès – à quelques nids de poule sur leur parcours professionnel. Par exemple, le départ de Dan Griffin, un des membres fondateurs, aurait très bien pu dérouter le groupe, mais le claviériste Anthony Carone l’a remplacé avec brio tout en apportant une nouvelle dimension à la dynamique du groupe. En septembre dernier, Arkells a attiré les foules les plus importantes de sa carrière lors du passage du groupe au festival Supercrawl de Hamilton, en plus d’avoir joué trois soirs consécutifs au Danforth Music Hall de Toronto, en novembre, une première.  Malgré cela, les gars d’Arkells savent que la réussite est une maîtresse versatile et c’est pour ça qu’ils ne tiennent rien pour acquis et qu’ils sont souvent sur la route.

« Nous avons vraiment l’impression d’être encore bien loin du but», confie Kerman. «Nous avons une bonne notoriété à Hamilton et dans le reste du Canada, mais nous passons beaucoup de temps à l’étranger et nous travaillons très fort pour bâtir notre auditoire. Bien des endroits où nous jouons nous rappellent l’époque du Casbah, et on adore ça. »

Faits saillants
Éditeur:
Arkells Music Inc.
Discographie: Deadlines EP (2007), Jackson Square (2008), Michigan Left (2011), High Noon (2014)
Membres de la SOCAN depuis 2007 (Dan Griffin), 2008 (Max Kerman, Tim Oxford, Nick Dika), 2009 (Mike DeAngelis), 2010 (Anthony Carone)
Site web: www.arkells.ca

Tourner la page
« Ça s’est produit le jour où nous nous sommes tous rendu compte que pas un seul d’entre nous n’avait un emploi», raconte Kerman. «Nous avions tous des emplois à temps partiel afin de pouvoir partir en tournée, puis un jour – je crois que nous étions sur la route dans notre minifourgonnette – j’ai regardé les gars et je me suis écrié « je n’ai plus d’emploi à temps partiel, et vous non plus! » Maintenant, quand on rentre de tournée, on a le temps de relaxer et de se concentrer sur notre musique. C’était vraiment chouette de réaliser que le groupe est devenu notre emploi à temps plein et qu’on arrive à en vivre. »