Depuis ses premiers balbutiements en 2004, le duo Alfa Rococo n’a jamais cessé d’évoluer sur le plan musical. Après un premier opus prometteur (Lever l’ancre en 2007) chargé à bloc de brûlots électro-pop vitaminés et calibrés pour les radios FM, David Bussières et Justine Laberge proposaient Chasser le malheur en 2010, une œuvre plus mature et aboutie certes, mais aussi passablement plus sombre. C’est en septembre dernier que le chic tandem larguait Nos cœurs ensemble, une troisième parution au son davantage organique, se permettant de flirter autant avec la new-wave des années 1980 que la pop ensoleillée et moderne du Bostonnais Passion Pit. Bref, du beau boulot et une galette efficace offrant 11 bombes pop aussi rassembleuses que dansantes.

Pour David, une bonne chanson pop doit d’abord et avant tout être accrocheuse sur le plan mélodique, mais doit également posséder des paroles que l’auditeur sera en mesure de retenir. Il précise sa pensée : « La simplicité est de mise. C’est comme un bon riff de guitare. Ça doit être court, punché pour qu’on s’en souvienne. Une chanson pop efficace, c’est surtout une belle adéquation entre la musique et le texte. Les deux doivent aller de pair et transmettre la même énergie. Il faut que ça coule et que ça groove tout en restant accessible. »

« C’est tout un défi de parler d’amour de façon sincère. »

L’amour en chanson

Exit les sombres mélopées, les tiraillements et les textes individualistes de Chasser le malheur.  Sur cette nouvelle livraison, le tandem Laberge/Bussières opte pour une approche plus positive. Après l’orage, l’arc-en-ciel. « À peu près 98% des chansons d’amour parlent de ruptures amoureuses. Pour la création de cet album, on était dans un état d’esprit très positif. On voulait parler de la force de l’amour. On est ensemble depuis 15 ans, alors c’est notre réalité. Tout de même, c’est tout un défi de parler d’amour de façon sincère. Pas évident de trouver le bon angle, le bon ton. Difficile de ne pas sombrer dans le quétaine. Avec le recul, je pense qu’on a assez bien réussi, » assure Bussières.

Nouvellement mariés, David et Justine souhaitaient célébrer l’amour avec Nos cœurs ensemble. Et on les comprendra. Pour le guitariste et chanteur, être un couple dans une situation de création favorise, voire simplifie grandement, le partage d’idées. Il explique : « Plus ça va et plus c’est une force pour nous. On est notre premier public et Justine est ma première oreille. Ton meilleur chum te dira pas toujours la vérité. En couple, c’est plus facile de se dire les vraies affaires. On est tout le temps en train d’échanger des idées et de mijoter des chansons. C’est un boulot à plein temps. J’imagine que pour certains, c’est peut-être aliénant de travailler avec sa douce moitié, mais pas pour nous. »

Nouveaux départs

Maintenant signé sur Coyote Records, Alfa Rococo poursuit sa route et entame un nouveau chapitre de son histoire. Un changement de décor nécessaire pour la paire. Bussières : « Ça a été très positif. Ajouter du sang neuf dans le projet, ça fait du bien et ça relance la motivation. On s’appelle souvent. On se tient au courant. Notre relation avec les gens de la compagnie est très proactive. De plus, c’est un défi pour nous parce qu’il faut aussi livrer la marchandise. Ça nous pousse à nous surpasser. »
Le couple est aussi propriétaire de son propre studio-maison depuis novembre 2013. Une précieuse acquisition qui facilite le travail de création pour les tourtereaux. « C’est un petit laboratoire qui nous aide aussi à limiter les accidents de parcours entre le moment où on a une idée et celui où on enregistre la chanson. Disons que ça limite les déplacements. Très souvent, on a des idées le matin, alors c’est à portée de la main. Bref, on peut travailler en tout temps. Par contre, on ne voit pas beaucoup de monde lorsqu’on est en mode création. On peut même développer une certaine misanthropie, » avance David.

Alors que Justine donnait naissance à un premier enfant en janvier, Alfa Rococo reprend le collier en avril prochain côté spectacles. Pour le duo, pas question de prendre une année sabbatique à longer les murs. La scène : voilà ce qui compte véritablement. « C’est important de continuer, d’être en mouvement. La naissance de notre enfant, c’est un beau moment et on veut en profiter, mais on a besoin de jouer! Le show demeure un work in progress. On l’améliore tout le temps. Jouer sur scène, c’est comme une récréation après le travail. C’est ce qu’on aime faire dans la vie, alors être coupé de ça pendant longtemps, ce ne serait pas bon pour notre santé mentale! »

Tourner la page
« J’ai fait l’album Soley en 2004 avec Dobacaracol. C’était le fun, mais j’avais besoin de mon projet à moi. J’avais envie de plus. J’ai ensuite travaillé pour le Cirque du Soleil et je me suis dit : je vais partir en tournée, jouer le soir et le jour on va composer des chansons. On a commencé Alfa Rococo à peu près à cette période tout en ramassant de l’argent pour produire notre premier album. Début 2005, on est partis pendant un an en tournée européenne. On s’installait dans des chambres d’hôtel et on a composé la majorité des chansons du premier disque de cette façon. » David Bussières, Alfa Rococo